« Je suis la voix »Nouvelles mises en examen dans l’affaire de la voyante et du maire à Agde

Hérault : Nouvelles mises en examen dans l’affaire de la voyante et du maire d’Agde

« Je suis la voix »Deux cadres importants d’Eiffage sont soupçonnés d’avoir participé au financement occulte de travaux au domicile de la voyante
Jérôme Diesnis

Jérôme Diesnis

L'essentiel

  • Le maire d’Agde a été mis en examen pour détournements de fonds par une personne dépositaire de l’autorité publique, prises illégales d’intérêts et corruption. Une voyante également, pour escroqueries, recel de détournements de fonds par une personne dépositaire de l’autorité publique, recel de corruption et travail dissimulé.
  • Lors de l’enquête menée sur les activités de la voyante, deux cadres d’Eiffage ont été mis en examen des chefs d’abus de confiance, de faux et d’usage de faux. L’un d’eux a été également mis en examen du chef de corruption active et son subordonné du chef de complicité de corruption.
  • Gilles d’Ettore, le maire (LR) d’Agde a été placé en détention provisoire. Alors qu’il clame son innocence, sa demande de remise en liberté doit être étudiée ce mardi par la chambre de l’instruction.

Alors qu’ils enquêtent sur l’affaire rocambolesque de la voyante et de Gilles d’Ettore (LR), le maire d’Agde, les membres de la brigade financière du service interdépartemental de la police judiciaire de Montpellier ont effectué de nouvelles découvertes. Deux cadres importants de la société Eiffage sont soupçonnés d’avoir participé au financement occulte de travaux au domicile de la voyante. Dans ce volet de l’enquête, un chef d’entreprise de l’Aude a également été placé en garde à vue.

Les deux cadres d’Eiffage ont été mis en examen des chefs d’abus de confiance, de faux et d’usage de faux. L’un d’eux a été également mis en examen du chef de corruption active et son subordonné du chef de complicité de corruption. « Le premier a été placé en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention. Son subordonné a été sous contrôle judiciaire. »

Il a interdiction « de se rendre dans les locaux de la société Eiffage, d’exercer une activité de direction d’une société ou d’une agence d’une société et de rentrer en contact avec plusieurs personnes en lien avec la procédure en cours », précise Raphaël Balland, le procureur de la République de Béziers.

Corruption et recel

Les deux principaux protagonistes de cette affaire ont été mis en examen le 21 mars et placés en détentions provisoires. Le maire d’Agde pour détournements de fonds par une personne dépositaire de l’autorité publique, prises illégales d’intérêts et corruption. La voyante pour escroqueries, recel de détournements de fonds par une personne dépositaire de l’autorité publique, recel de corruption, et travail dissimulé.

Son mari, devenu directeur technique des services de la ville, pour recel de prise illégale d’intérêts, recel de détournements de fonds par une personne dépositaire de l’autorité publique, recel de corruption. Il est reproché à la femme de n’avoir déclaré qu’une partie de ses revenus dans le cadre de son activité d’autoentrepreneuse à Agde de voyante, médium et « guérisseuse ». Cette activité lui avait permis de développer une clientèle importante en acquérant une certaine notoriété.

« La voix »

Au cours de sa garde à vue, la voyante a reconnu avoir utilisé un stratagème consistant à modifier sa voix auprès de nombreux interlocuteurs. En utilisant au téléphone cette voix d’apparence masculine, posée et rauque, elle réussissait à leur faire croire qu’ils étaient en conversation avec un être surnaturel provenant de l’au-delà. Cette « voix » incitait principalement ses interlocuteurs à se soucier du bien-être de cette femme, y compris matériellement.

Le maire d’Agde était devenu l’un de ses plus proches amis depuis leur rencontre en mai 2020. Elle était parvenue à lui faire croire à l’existence de « la voix ». L’édile est soupçonné pour sa part d’avoir commis le délit de prises illégales d’intérêts dans le cadre du recrutement des cinq personnes de l’entourage de cette femme et d’avoir détourné des fonds ou des biens de la commune ou de l’agglomération pour lui offrir de nombreuses largesses ou prestations.

Au cours de sa garde à vue, il a reconnu être convaincu de l’existence de « la voix » et que cette femme, qu’il considérait comme sa fille, était douée de pouvoirs surnaturels. Il nie avoir commis un quelconque délit. Sa demande de mise en liberté est étudiée aujourd’hui par la chambre de l’instruction. « Les personnes mises en examen bénéficient toujours à ce stade de la présomption d’innocence », rappelle Raphaël Balland.