Tribunal : Les procédures amiables seront multipliées pour réduire le nombre de procès
DÉLAIS•Face à l’engorgement des tribunaux, conciliation préalable, audience de règlement amiable et procédure de césure sont désormais préféréesJulie Polizzi pour 20 Minutes
La justice française est depuis longtemps considérée comme trop longue et complexe. Un procès civil peut en effet prendre jusqu’à 18 mois en première instance (tribunal judiciaire) et jusqu’à 3 ans et demi en appel, d’après le bilan 2022 du ministère de la Justice.
Malgré de récents renforts, le système judiciaire manque encore et toujours des moyens humains et matériels nécessaires à son bon fonctionnement.
Afin de « réduire par deux les délais de nos procédures civiles d’ici 2027 », le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti a donc annoncé en janvier 2023 sa volonté de « mettre au vert tous les feux de l’amiable ». Et les premières mesures sont entrées en vigueur.
Un nouveau préalable au procès
Tenter de résoudre certains litiges à travers une démarche amiable avant de saisir le tribunal, c’est obligatoire depuis le 1er octobre 2023. Cela dit, ce n’est pas si nouveau que ça : le législateur a introduit cette procédure dès 2016, avant de l’étendre en 2019.
Sauf qu’en septembre 2022, le Conseil d’État a mis un coup d’arrêt au dispositif en jugeant l’une de ses modalités trop imprécise. Quelque mois plus tard, le gouvernement a donc pris un nouveau décret pour rétablir cette obligation.
Dès lors, tout litige civil dont les demandes ne dépassent pas 5.000 € implique d’essayer d’abord de trouver une solution amiable.
Cela vaut également, quel que soit le montant, pour les troubles anormaux du voisinage, les demandes relatives au bornage, au curage de fossés et canaux, aux distances de plantations ou à l’élagage d’arbres ou encore pour certaines servitudes et respect des distances de constructions telles que des clôtures.
Vous pouvez alors, au choix, vous adresser à un conciliateur de justice (une solution gratuite), à un médiateur professionnel ou opter pour une procédure participative mise en œuvre par un avocat.
Par exception, cette démarche n’est pas imposée en cas d’urgence manifeste, de circonstances rendant impossible cette tentative amiable ou s’il faut plus de 3 mois pour obtenir une première réunion avec le conciliateur saisi (le Conseil d’État avait sanctionné le précédent texte parce qu’il se contentait de mentionner « un délai manifestement excessif »).
Deux nouvelles options pendant le procès
Même une fois l’action en justice lancée, il est encore possible de trouver une solution consensuelle. Deux nouveaux mécanismes ont pour cela été mis en place le 1er novembre 2023.
Le juge saisi d’un conflit peut dorénavant convoquer les parties, d’office ou à la demande de l’une d’elles, à une « audience de règlement amiable » qui sera tenue par un autre magistrat, extérieur au dossier, remplissant le rôle de conciliateur.
Cette procédure agit alors comme une parenthèse puisque les délais sont suspendus et que le contenu de cette audience reste confidentiel (sauf cas extrêmes). Si la conciliation échoue, le procès reprend son cours. Mais si elle aboutit, un procès-verbal d’accord est transmis au juge du litige.
D’autre part, la nouvelle « césure du procès » propose un jugement en deux temps. Là encore l’action en justice a déjà été enclenchée mais, ici, demandeur et défendeur ont décidé de régler une partie de leur litige par un autre biais (médiation, conciliation).
Notre dossier « Justice »Ils demandent alors la clôture partielle de l’instruction pour que le tribunal ne tranche que certaines prétentions déterminées à travers un jugement partiel. Il peut par exemple s’agir de se mettre d’accord sur le principe de responsabilité et de laisser au juge le soin d’évaluer l’indemnisation ou vice versa.