Tribunal« Ce procès est une infamie », assène le ministre Dupond-Moretti à la barre

Procès Dupond-Moretti : « C'est une infamie », assène le ministre au premier jour de l'audience

TribunalS’il est reconnu coupable de « prise illégale d’intérêts », le ministre encourt cinq ans d’emprisonnement, 500.000 euros d’amende, ainsi qu’une peine complémentaire d’inéligibilité et d’interdiction d’exercer une fonction publique
Justice : Comment juge-t-on un ministre en exercice ?
20 Minutes avec AFP

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C’est une première pour un ministre de la Justice en exercice. Éric Dupond-Moretti est devant la Cour de Justice de la République (CJR) ce lundi. Son procès s’est ouvert à Paris, peu après 14 heures. L’ancien avocat, jugé pour conflits d’intérêts dans le cadre de ses fonctions, est entré dans la grande salle d’audience du palais de Justice de Paris l’air grave et un épais dossier sous le bras.

« Pour moi et pour mes proches, ce procès est une infamie » a d'emblée déclaré à la barre Eric Dupond-Moretti. « Jusqu'à ces dernières heures, je ne me suis pas défendu », « au fond pour ne pas que mon ministère et mon action soient éclaboussés ». « J'entends me défendre dignement, complètement, mais j'entends me défendre fermement », a-t-il ajouté.

« Monsieur le président, ce procès à mes yeux est d'abord un procès en illégitimité », a poursuit le Garde des sceaux en rappelant que les syndicats de magistrats, à l'origine de la plainte déposée contre lui, avaient qualifié sa nomination place Vendôme de « déclaration de guerre ». « J'ai été avocat trente-six ans, certains avocats m'ont reproché de ne plus l'être, certains magistrats de l'avoir été », a-t-il aussi avancé. « Naturellement », a-t-il conclu, « je répondrai à toutes les questions ».

Quatre magistrats témoins

S’il est reconnu coupable de « prise illégale d’intérêts », le ministre encourt cinq ans d’emprisonnement, 500.000 euros d’amende, ainsi qu’une peine complémentaire d’inéligibilité et d’interdiction d’exercer une fonction publique. L’ancien ténor du barreau se dit « innocent » et répète n’avoir fait que suivre « les recommandations » de son ministère en lançant des enquêtes administratives contre quatre magistrats avec qui il avait eu des différends quand il était avocat.

Une table recouverte d’une nappe bleue a été installée pour Éric Dupond-Moretti dans le prétoire, face à la cour. Dès le début de la lecture du rapport il a commencé à prendre des notes appliquées. Une petite bouteille d’eau était posée sur la table, comme devant les places des avocats généraux et des membres de la CJR, juridiction mi-juridique mi-politique, composée de trois magistrats de la Cour de cassation et de douze parlementaires de tous bords.

Les avocats d’Éric Dupond-Moretti, Mes Rémi Lorrain et Jacqueline Laffont se sont assis sur les bancs du premier rang, derrière lui. Sur les bancs de l’autre côté de la salle avaient pris place les quatre magistrats à l’encontre desquels il avait ouvert les enquêtes administratives. Ils sont témoins à ce procès, et ont donc dû quitter la salle. Leur audition est prévue mercredi.

Un ministre « serein », soutenu par le gouvernement

Éric Dupond-Moretti, « serein » et qui a « hâte » de s’expliquer selon son entourage, devrait avoir la parole pour une déclaration liminaire dès la fin d’après-midi. Son interrogatoire est prévu mardi matin.

L’ex-avocat, l’une des rares personnalités connues de la macronie, avait continué à être soutenu par le président de la République malgré sa mise en examen. « En tant que garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti a toute ma confiance », a déclaré lundi la cheffe du gouvernement Élisabeth Borne sur France Inter, vantant son « excellent travail » et son « droit à la présomption d’innocence ». La Première ministre a précisé qu’elle avait elle-même souhaité qu’il reste à son poste et « puisse à la fois assurer sa défense et qu’on s’organise pour que le ministère de la Justice puisse tourner ».