compte rendu« Dans le stup, une erreur peut coûter cher », lâche un accusé de torture

Marseille : « Dans le stup, une erreur peut vite coûter cher », lâche un des accusés de torture

compte renduQuatre hommes, soupçonnés d’appartenir à un réseau de trafic de stupéfiants, sont jugés jusqu’à vendredi par la cour d’assises d’Aix-en-Provence. Ils sont accusés d’avoir séquestré et torturé un jeune venu de Chartres (Eure-et-Loir)
Alexandre Vella

Alexandre Vella

L'essentiel

  • Quatre hommes, âgés de 22 à 30 ans, sont jugés jusqu’à vendredi par la cour d’assises d’Aix-en-Provence pour « enlèvement, séquestration avec torture ou acte de barbarie ».
  • La victime, 16 ans à l’époque des faits, est un jeune venu d’une autre région de France avec l’espoir de gagner facilement de l’argent en travaillant dans un réseau de trafic de drogue.
  • Ce mercredi, le principal accusé a été interrogé sur le fond alors qu’un expert psychologue est venu, malgré lui, au secours de la défense.

A la cour d’assises d’Aix-en-Provence,

Quatrième jour d’audience à la cour d’assises d’Aix-en-Provence, qui juge quatre hommes accusés d’avoir séquestré et torturé un minot pour avoir dealé à Félix Pyat sans l’autorisation du réseau. Ce lundi, la victime, Mathieu*, 16 ans en 2019 à l’époque des faits, est venu témoigner de sa nuit de calvaire.

Une nuit passée attachée à une chaise, dénudé dans un local associatif désaffecté et brûlé avec des mégots de cigarettes et un chalumeau. Il a pu aussi désigner A. comme son principal tortionnaire, en l’identifiant par son timbre de voix. Une accusation soutenue également par un témoignage anonyme.

Un alibi venu de Lyon

Cette accusation, A., qui comparait détenu pour avoir été condamné à dix ans de prison pour un braquage commis en 2017, a tenté de la réfuter. Interpellé en 2019 une poignée de semaines après les faits qui occupe la cour d’assises ce jour, l’accusé, s’est avancé au micro derrière la glace du box des détenus. « Peut-être il y en a qui veulent me faire porter le chapeau parce que j’ai déjà une longue peine », a-t-il formulé. Avant d’expliquer qu’il ne se trouvait pas à Marseille au moment des faits.

« En fait, j’étais à Lyon parce que je me savais recherché pour le braquage », a avancé le jeune homme d’une vingtaine d’années, dégradé et t-shirt gris. Il aurait été hébergé tantôt par une connaissance, une certaine Délia, tantôt par un cousin, ou bien à l’hôtel. Autant de témoins potentiels qu’il n’a pas cités. « Je ne voulais les mettre là-dedans et pensais que cette histoire n’irait pas plus loin. » Il encourt une peine de trente ans de prison.

En audition face au juge d’instruction, A. a montré peu d’empathie : « Ce sont des choses qui arrivent tous les jours à Marseille. La violence qu’il y a ici, quand on a grandi dans les quartiers Marseille, ça choque, mais c’est là. » Face à la cour, il a repris ce même positionnement, assez détaché des faits. « C’est horrible ce qu’il a vécu. Mais moi, je vis dans ma bulle. » Avant de poursuivre, un peu plus tard : « Personne ne mérite ça, je n’aurais pas aimé être à sa place. Mais dans le trafic de stup, une erreur peut vite coûter cher. Et on le voit avec la violence qui monte de plus en plus. »

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Alors que ses coaccusés doivent être entendus ce jeudi sur le fond, A. dont l’histoire de Lyon ne semblait pas vraiment avoir convaincu la cour, a finalement reçu un coup de pouce inattendu avec l’audition d’un expert psychologue visiblement pas très pointilleux. Dans son rapport, le psychologue écrit que A. lui aurait dit être sur les lieux au moment des faits. De même, au sujet d’un de ses coaccusés, l’expert dit que ce dernier a reconnu une gifle. Mais problème : si l’un des accusés reconnaît bien une gifle, il ne s’agit pas de celui à qui il prête ces confessions. « J’ai peut-être bien fait une erreur », a admis l’expert, suscitant l’agacement de l’avocat général. Le verdict est attendu ce vendredi.