ESCLAVAGE MODERNEDeux ans ferme pour un patron breton qui exploitait des sans-papiers

Bretagne : Deux ans ferme pour le patron d’une entreprise de volailles qui exploitait des sans-papiers

ESCLAVAGE MODERNELe gérant de la société Prestavic a été reconnu coupable de traite d’êtres humains
Les travailleurs devaient ramasser des volailles chez des éleveurs bretons pour les charger dans des camions vers l'abattoir.
Les travailleurs devaient ramasser des volailles chez des éleveurs bretons pour les charger dans des camions vers l'abattoir.  - Tristan Reynaud/SIPA
Jérôme Gicquel

J.G. avec AFP

Il a vendu du rêve à des Africains sans-papiers avant de les traiter comme des esclaves, les faisant travailler comme des forçats pour un salaire de misère et les logeant dans des hébergements insalubres. Le gérant de la société de ramassage de volailles Prestavic a été condamné ce jeudi à deux ans de prison ferme pour traite d’êtres humains par le tribunal correctionnel de Brest.

Le chef d’entreprise a également été condamné à 15.000 euros d’amende ainsi qu’à une interdiction définitive d’administrer ou de gérer une société. Sa conjointe, jugée pour complicité, a quant à elle été condamnée à un an de prison, dont six mois avec sursis.

Le tribunal a également condamné le gérant, individuellement ou solidairement avec sa femme, à verser 167.000 euros de dommages et intérêts à seize de ses anciens employés, majoritairement des Ivoiriens. L’avocat du couple franco-ivoirien Maître Pierre Tracol s’est dit « un peu perplexe » quant à la condamnation de sa cliente, pour laquelle il avait plaidé la relaxe.

Salaires faibles, repos journalier pas respecté

Cette dernière, ancienne ramasseuse de volailles arrivée de Côte d’Ivoire en 2017, était poursuivie pour avoir participé au recrutement de plusieurs de ses compatriotes, à qui le couple promettait une régularisation. « Elle a pu appeler les uns ou les autres mais, de là à dire qu’elle a pu participer à embaucher des gens, ça nous semble contestable », a déclaré Maître Tracol.

Lors de l’audience, qui s’est déroulée le 25 mai, le gérant avait réfuté avoir promis des papiers à ses employés. Il avait toutefois admis avoir « été un peu léger dans la gestion » des nouvelles recrues, auxquelles il ne demandait pas des papiers en règle, par manque de personnel. Les conditions de travail ressemblaient finalement à de l’esclavage moderne avec des salaires faibles, des contrats « de façade », des amplitudes horaires importantes (de 17 heures à 6 heures ou 7 heures le lendemain matin et parfois plus lors des périodes de fêtes), un repos journalier pas respecté et des insultes.



Les travailleurs, qui ramassaient des volailles chez des éleveurs bretons pour les charger dans des camions vers l’abattoir, étaient également logés dans des hébergements insalubres ou impropres à l’habitation. Les heures de transport et d’attente entre deux chargements n’étaient par ailleurs pas ou peu rémunérées. « Si tu réclamais, on te disait : on va te rapatrier à Paris », avait témoigné l’un d’entre eux à la barre.