PORTRAITJean-Michel Gentil, un magistrat chez les gendarmes

Jean-Michel Gentil, un magistrat chez les gendarmes

PORTRAITLe juge d’instruction, connu du grand public pour avoir mis en examen Nicolas Sarkozy, est pressenti pour prendre la tête de l’IGGN, l'Inspection générale de la gendarmerie, à la rentrée
Thibaut Chevillard

Thibaut Chevillard

L'essentiel

  • Premier vice-président chargé de l’instruction au tribunal judiciaire de Paris, Jean-Michel Gentil a rejoint la gendarmerie en qualité de numéro deux de l’IGGN (Inspection générale de la gendarmerie nationale) en septembre dernier.
  • Connu du grand public pour avoir conduit les investigations dans le cadre de l’Affaire Bettencourt, le magistrat est désormais pressenti pour succéder au général Alain Pidoux à la tête de l’inspection.

Le juge Jean-Michel Gentil détient un record. « J’étais en poste comme juge d’instruction depuis trente-sept ans. Ça va être difficile à battre », s’amuse le magistrat. Premier vice-président chargé de l’instruction au tribunal judiciaire de Paris, il a rejoint la gendarmerie en qualité de numéro deux de l’IGGN, l'Inspection générale de la gendarmerie nationale, en septembre dernier. « Son expérience, son expertise, son regard extérieur, constituent une véritable plus-value pour la qualité des décisions que nous prenons collectivement », explique ce jeudi le général Alain Pidoux. Le haut gradé quittera à la rentrée la gendarmerie. Et le juge Gentil est désormais pressenti pour lui succéder à la tête de l’inspection, qu’il commande depuis trois ans.

« Je suis arrivé pour prendre la place d’adjoint, et pas autre chose », assure cependant le magistrat, qui a commencé sa carrière comme juge d’instruction à Dunkerque. Après sept années passées dans le Nord, il est nommé à Nanterre (Hauts-de-Seine) dans les années 1990, où il s’attaque aux réseaux de proxénétisme parisien. « J’ai été ensuite dix-huit ans à la tête de juridictions spécialisées dans la lutte contre la criminalité organisée. Mon dernier poste était la juridiction nationale, à Paris, que je coordonnais. »

L’ancien président de l’Association française des magistrats instructeurs est notamment connu du grand public pour avoir conduit les investigations dans le cadre de l’Affaire Bettencourt, entre 2010 et 2013. Réputé indépendant et opiniâtre, il avait fait la une des médias en plaçant l’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, en examen. Ce dernier a finalement bénéficié d’un non-lieu dans ce dossier.

« Comme dernier poste, j’en ai rêvé ! »

Puis le magistrat s’est décidé à répondre à l’appel d’offres lancé par l’IGGN. « Il y a eu un appel à candidatures, 17 ont répondu pour le poste, dont quatre magistrats de très hauts niveaux, qui ont été auditionnés », rapporte le général Alain Pidoux. « Le poste m’a beaucoup intéressé, c’est très clair », souligne Jean-Michel Gentil. « Ce qui m’a plu, c’est que les valeurs représentées au sein de l’IGGN sont les mêmes que celles d’un juge d’instruction : transparence, impartialité, on va au bout des enquêtes. »

Au cours de sa carrière, le juge Jean-Michel Gentil a traité de nombreux dossiers sensibles « qui mettent en cause soit des policiers, soit des gendarmes ». « Donc on a l’habitude des enquêtes internes. » A l’IGGN, il a apporté « le regard du magistrat ». Il peut ainsi aider les enquêteurs à faire la part des choses entre « ce qui pourrait être perçu comme un commandement un peu ferme et ce qui pourrait être appelé du harcèlement ».



Depuis son arrivée, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a souhaité nommer des magistrats à la tête des inspections de la police et de la gendarmerie. Agnès Thibaut-Lecuivre a ainsi succédé, en juillet dernier, à la commissaire Brigitte Jullien à la tête de l’IGPN. Le juge Gentil est, lui, pressenti pour prendre la succession du général Pidoux dans quelques mois. « Il y aurait ainsi une certaine continuité », souligne le haut gradé, qui prendra sa retraite à partir du 31 juillet. Son décret de nomination n’a pas encore été signé. Mais le magistrat s’imagine déjà à la tête de l’IGGN. « Il faut quelqu’un en fin de carrière, qui a eu une certaine liberté de ton, d’indépendance. Moi aussi, je m’arrêterai dans quelque temps. Alors comme dernier poste, j’en ai rêvé ! »