Langues régionalesEn France, des débats en catalan dans les conseils municipaux sont illégaux

Pyrénées-Orientales : Selon la justice, l’usage du catalan dans les débats en conseil municipal est illégal

Langues régionalesSelon le tribunal administratif, les débats doivent se tenir uniquement en français. Plusieurs communes ont annoncé leur intention de faire appel
Jérôme Diesnis

Jérôme Diesnis

L'essentiel

  • Saisi par le préfet des Pyrénées-Orientales, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l’autorisation, prise par les conseils municipaux de cinq communes du département, de délibérer en catalan.
  • La justice considère que l’utilisation d’une langue régionale par les conseillers municipaux pour présenter les projets de délibérations et pour débattre et n’utiliser le français qu’en guise de traduction est contraire à l’article 2 de la Constitution et à la loi Toubon de 1994.
  • Plusieurs communes ont annoncé leur intention de faire appel de ce jugement. Elles estiment notamment que l’usage du catalan dans les débats ne remet pas en cause la primauté du français comme langue de la République.

«Les séances du conseil municipal doivent d’abord avoir lieu en français, et l’utilisation de la langue catalane est permise en traduction. » Saisi par le préfet des Pyrénées-Orientales, Rodrigue Furcy, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l’autorisation, prise par les conseils municipaux de cinq communes du département, de délibérer en catalan. En avril 2022, Elne, suivi par les communes d’Amélie-les-Bains-Palalda, Tarerach, Saint-André et Port-Vendres avaient, à tour de rôle, modifié leur règlement intérieur. Ceci afin d’autoriser les débats en catalan, avec une traduction immédiate en français.

Le tribunal a considéré que l’utilisation d’une langue régionale par les conseillers municipaux pour présenter les projets de délibérations et pour débattre et n’utiliser le français qu’en guise de traduction était contraire à l’article 2 de la Constitution. Lequel, s’appuyant sur l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539, stipule que « la langue de la République est le français ». Ainsi qu’à l’article 1er de la loi Toubon du 4 août 1994 qui précise que « (…) la langue française est un élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France. Elle est la langue de l’enseignement, du travail, des échanges et des services publics ».

« Une avancée significative pour les langues régionales »

Avocat de trois des cinq communes attaquées par le préfet, Matthieu Pons-Serradeil voit dans ce jugement « deux enseignements nouveaux par rapport à l’ensemble des décisions rendues jusqu’à présent concernant l’usage des langues régionales dans les assemblées délibérantes. L’annulation n’est pas fondée sur le caractère antidémocratique de l’usage du catalan, comme cela a pu être le cas avec des jugements concernant d’autres langues régionales. La seconde, c’est qu’au nom de la primauté de langue française, le français ne peut pas être une langue de traduction. Le catalan peut être une langue de traduction, mais pas la langue principale. Cela fait donc entrer légalement l’usage des langues régionales dans les débats d’une assemblée délibérante, c’est une avancée significative ».

Malgré tout, au moins quatre maires des cinq communes (celui de Saint-André ne s’est pas encore prononcé) ont annoncé leur intention de faire appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Toulouse. « Cette décision est critiquable, car la Constitution instaure la primauté, ce qui ne signifie pas la primeur. Ce sont les délibérations qui créent le droit, et non pas les débats. Or, les délibérations sont rédigées exclusivement dans la langue française, reprend l’avocat. D’ailleurs, les délibérations qui ont fait l’objet de débat en catalan et rédigées en langue française n’ont pas été annulées, ce qui l’a été, c’est la modification du règlement intérieur autorisant les débats en catalan ».

Trois mois pour se mettre en conformité avec cette décision

Pour Matthieu Pons-Serradeil, la loi Toubon de 1994 ne justifie pas la décision du tribunal administratif. « Les juges se sont fondés sur cette loi qui précise que la langue des services publics est le français. Mais une assemblée délibérante n’est pas un service public, c’est une institution. D’ailleurs, lors d’élections locales, des personnes de nationalité étrangère peuvent se présenter et être élues. On ne leur impose pas de s’exprimer en français dans les organismes où ils ont été élus ».

L’appel n’étant pas suspensif, les élus des cinq communes ont trois mois pour modifier le règlement intérieur de leur conseil municipal.