TRAVAILDeux ans de prison pour un patron et ses conditions de travail indignes

Sarthe : Deux ans de prison pour un patron qui imposait des conditions de travail indignes

TRAVAILCet homme de 43 ans employait des personnes vulnérables pour son activité de ramassage de volailles
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

L'essentiel

  • Le patron d’une entreprise de ramassage de volailles sarthoise a été jugé coupable jeudi de rétribution inexistante ou insuffisante de personnes vulnérables, conditions de travail et d’hébergement indignes et travail dissimulé.
  • Il a été condamné à trois ans d’emprisonnement, dont un an avec sursis probatoire, peine assortie d’une interdiction de gérer une entreprise pendant 15 ans.

Le patron d’une entreprise sarthoise de ramassage de volailles a été condamné à deux ans d’emprisonnement ferme pour avoir infligé des conditions de travail souvent « indignes » à des salariés vulnérables, a-t-on appris vendredi auprès du tribunal correctionnel du Mans. Cet homme de 43 ans a été relaxé jeudi soir du chef de traite d’êtres humains mais il a été jugé coupable de rétribution inexistante ou insuffisante de personnes vulnérables, conditions de travail et d’hébergement indignes et travail dissimulé.

Il a été condamné à trois ans d’emprisonnement, dont un an avec sursis probatoire, peine assortie d’une interdiction de gérer une entreprise pendant 15 ans. Il devra également verser des dommages et intérêts aux parties civiles. Lors de son procès jeudi après-midi, le parquet avait requis quatre ans de prison et 100.000 euros d’amende.

Plus de 120 parties civiles

Malgré des conditions de travail exténuantes, « la plupart des salariés étaient en dessous du seuil de pauvreté, avec des revenus de survie compris entre 500 et 800 euros », avait indiqué la présidente du tribunal. Le prévenu travaille depuis plus de vingt ans dans le ramassage de volailles, une activité qui consiste à vider des poulaillers de nuit en plaçant des animaux dans des casiers pour les transporter à l’abattoir. Il a mis en avant la réalité économique de la profession. Selon lui, ailleurs, cela se passerait de la même façon. « Certains sont contents : parce que je suis tombé ! », a lâché cet homme au visage rond à la barre.

A l’audience, sur les 126 parties civiles, une vingtaine de personnes ont pris la parole, racontant les horaires à rallonge, les heures non payées, l’absence de vacances et des conditions de travail difficiles, voire indignes. Au cours d’une même nuit, les équipes pouvaient réaliser trois à cinq chantiers, entre 20 heures et 8 heures du matin. Les équipes avaient alors moins d’une heure pour vider un poulailler, le ramasseur pouvant prendre jusqu’à cinq poulets dans chaque main avant de les « jeter » dans des casiers, selon un plaignant.

« Esclavage en toute liberté »

« Moi, j’ai commencé en tant que ramasseur, puis comme laveur. J’ai travaillé jour et nuit pendant trois mois », raconte Romaric. Le salaire arrivait en retard ou incomplet. « En ne payant pas tout notre salaire, on restait chez lui. C’est lui qui a créé la dépendance ! », a estimé le plaignant. L’un des avocats des parties civiles, Me Olivier Godard, a qualifié les faits « d’esclavage en toute liberté ».

Parmi les personnes recrutées par ce patron figuraient des travailleurs étrangers, des jeunes en rupture familiale et sociale. Le prévenu, en détention provisoire depuis octobre, avait été présenté au parquet du Mans en juin après une opération de contrôle des conditions de travail, menée par le comité départemental opérationnel anti-fraude de la Sarthe, en décembre 2021.