Attentat déjoué avant l’Euro 2016 : Réda Kriket jugé en appel à Paris
PROCES•Le procès en appel de cet ex-délinquant multirécidiviste de 40 ans devant la cour d’assises spécialement composée doit durer cinq semainesThibaut Chevillard
L'essentiel
- Condamné en première instance à 24 ans de prison, Réda Kriket est jugé en appel à partir de ce vendredi et pour cinq semaines.
- Quelques mois après les attentats du 13-Novembre, un impressionnant stock d’armes avait été retrouvé par les enquêteurs de la DGSI dans un appartement loué sous une fausse identité par Réda Kriket. Ce dernier, considéré comme l’un des piliers de la cellule, a toujours nié toute velléité terroriste.
- Quelques jours plus tard, l’un de ses complices était arrêté aux Pays Bas. Les policiers néerlandais avaient découvert 45 kg de munitions lors d’une perquisition.
Réda Kriket est de retour devant la cour d’assises spécialement composée. Condamné en avril 2021 pour un projet d’attentat, cet ex-délinquant multirécidiviste de 40 ans est rejugé à partir de vendredi à Paris aux côtés de deux autres hommes, Anis Bahri, 38 ans, et Abderrahmane Ameuroud, un vétéran du djihad afghan âgé de 44 ans. Accusés d’avoir projeté de commettre un attentat meurtrier en France, tous les trois avaient été condamnés à la même peine de 24 ans de réclusion criminelle, assortie d’une peine de sûreté des deux tiers. Mais le parquet national anti terroriste, qui avait requis la perpétuité à l’encontre des trois hommes, avait fait appel.
En mars 2016, quatre mois après les attentats du 13-Novembre, les enquêteurs de la DGSI avaient découvert un véritable arsenal de guerre dans un appartement situé 185, boulevard du général Delambre, à Argenteuil (Val-d’Oise). Les policiers ont mis la main sur de l’explosif de type TATP, du matériel de chimie, sept armes de poing, six fusils d’assaut, des bombes lacrymogènes, huit chargeurs de kalachnikov, un carton contenant des milliers de billes métalliques, plusieurs boîtes de cartouches, des couteaux à cran d’arrêt, des dizaines de téléphones portables dont l’un était relié à des fils rouges, plusieurs passeports, des brouilleurs d’onde, des plans de Paris…
Radicalisé en prison
L’appartement avait été loué quelques semaines plus tôt sous une fausse identité par un certain Réda Kriket, un délinquant chevronné de 39 ans, condamné à plusieurs reprises dans le passé, et qui s’est radicalisé en prison. Surveillé depuis plusieurs jours, il a été interpellé alors qu’il sortait d’une mosquée de Boulogne-Billancourt. Trois jours après, à plusieurs centaines de kilomètres de là, l’un de ses complices, Anis Bahri, 37 ans, est interpellé aux Pays-Bas à la demande des autorités françaises. Lors d’une perquisition, les policiers néerlandais ont trouvé dans un logement à Rotterdam plusieurs kilos de munitions.
D’autre part, l’ADN d’Abderrahmane Ameuroud avait été retrouvé dans l’appartement d’Argenteuil. L’homme est connu des services de renseignement depuis les années 1990. A l’époque, il organisait des entraînements en forêt de Fontainebleau, en Normandie ou dans les Alpes, destinés à préparer ceux qui voulaient partir en Afghanistan faire le djihad et combattre aux côtés des Talibans. Lui-même s’y était rendu entre juillet 2000 et septembre 2001. Il avait finalement été interpellé en janvier 2002 et condamné, en 2005, à sept ans de prison. C’est d’ailleurs en détention, à Fresnes, qu’il avait rencontré Réda Kriket.
« L’Euro de football en ligne de mire »
Peu après l’arrestation de Réda Kriket, l’ancien Premier ministre, Manuel Valls, avait déclaré que la cellule « avait sûrement l’Euro de football en ligne de mire », une compétition qui s’est déroulée entre le 10 juin et le 10 juillet en France. Mais le principal accusé a toujours contesté tout projet d’attentat terroriste. Lors de son premier procès, il avait expliqué avoir voulu commettre un braquage. Une thèse exclue par la cour statuant en première instance, en raison de l’ampleur de l’arsenal découvert le 24 mars 2016, deux jours après les attentats de Bruxelles.
Insistant sur les « nombreuses zones d’ombre persistantes » du dossier, la cour avait néanmoins relevé dans son arrêt que ni la nature des attaques envisagées, ni les cibles, ni le « moment » n’avaient pu être déterminés « avec précision ». Les magistrats avaient également considéré que rien ne permettait d’affirmer « qu’il s’agissait d’un attentat directement projeté depuis la Syrie par l’organisation Etat islamique ». Selon eux, il n’était « nullement prouvé » que Réda Kriket et Anis Bahri soient, en janvier 2015, « passés en Syrie dans le but de préparer un attentat commandité » par Daesh.
Les trois hommes, qui encourent la réclusion criminelle à perpétuité, auront cinq semaines pour s’expliquer. Contacté par 20 Minutes, l’avocat de Réda Kriket, Me Yassine Bouzrou, n’a pas répondu à nos sollicitations.