Affaire Bygmalion : Nicolas Sarkozy et les 13 autres prévenus du dossier rappelés au tribunal
PROCÈS•Ajournée en mars en raison de l’hospitalisation d’un des avocats frappé par le coronavirus, l’audience consacrée à l’affaire Bygmalion va reprendreVincent Vantighem
L'essentiel
- Anciens cadres de l’UMP, responsables de la campagne de 2012 et dirigeants de Bygmalion : quatorze personnes doivent être jugées, à partir de ce jeudi, pour le financement illégal d’une campagne électorale. Dont Nicolas Sarkozy.
- Condamné à de la prison ferme dans l’affaire dite « des écoutes Paul Bismuth », l’ancien chef de l’État encourt cette fois une peine d’un an de prison et 3.750 euros d’amende. Sa présence au tribunal n’est pas garantie pour la reprise des audiences.
- Le rôle de Jean-François Copé, qui a bénéficié d’un non-lieu dans le dossier, devrait occuper une partie des débats.
On prend les mêmes et on recommence… Ou presque… Deux mois après avoir été ajourné en raison de l’hospitalisation de l’un des avocats de la procédure touché par le coronavirus, le procès dit « Bygmalion » doit reprendre, ce jeudi à 13h30 devant la 11e chambre du tribunal judiciaire de Paris.
Anciens cadres de l’UMP, responsables de la campagne présidentielle de 2012, dirigeants de Bygmalion – la société chargée d’organiser les meetings : au total quatorze personnes vont comparaître pour cette affaire de fausses factures ayant permis, selon l’accusation, d’exploser le plafond autorisé de dépenses lors de l’élection présidentielle de 2012. Dont le candidat de la droite : Nicolas Sarkozy. 20 Minutes revient sur les grands enjeux de ce procès prévu pour durer jusqu’au 22 juin…
- Nicolas Sarkozy sera-t-il présent lors des débats ?
Ces derniers jours encore, l’ancien président de la République entretenait le suspense sur sa présence, ou non, devant la 11e chambre du tribunal judiciaire de Paris, pour la réouverture du procès. Le 17 mars, il était le seul des 14 prévenus à avoir séché l’audience. D’abord car il prévoyait – à juste titre – qu’elle serait renvoyée. Et surtout parce qu’il voulait montrer sa différence avec les autres prévenus, qu’il voulait prendre un peu de hauteur par rapport à ceux qui sont accusés d’avoir monté le système de fausses factures. On peut imaginer qu’il en sera de même ce jeudi.
Dans son ordonnance, le juge Serge Tournaire estime, en effet, que Nicolas Sarkozy n’a ni « ordonné », ni « participé » ni même « été informé » des fraudes mais qu’il en a « bénéficié », en tant que candidat. C’est donc pour le seul délit de « financement illégal de campagne électorale » qu’il comparaît. Et son entourage n’hésite pas à rappeler qu’il est le prévenu qui encourt la peine la plus faible (un an de prison et 3.750 euros d’amende) et qu’à ce titre, il peut même se faire représenter par son avocat, Thierry Herzog, tout au long du procès s’il le souhaite.
« Mais évidemment, il se tiendra à la disposition de la justice si besoin », confie un de ses conseillers. « On sait déjà qu’il va lire tous les comptes rendus d’audience et que si quelque chose lui déplaît, il viendra le dire dès le lendemain », persifle un avocat de la procédure. Seule certitude : le tribunal a prévu de l’interroger la semaine du 14 juin.
- Mais c’est quoi, l’affaire Bygmalion ?
L’affaire a véritablement éclaté en mai 2014 avec le témoignage télévisé de Jérôme Lavrilleux. En larmes, ce proche de Jean-François Copé révèle alors avoir participé à un système de double comptabilité et de fausses factures mis sur pieds pour dissimuler les dépassements du plafond autorisé des comptes de campagne du candidat Sarkozy.
Selon l’accusation, les dépenses de la campagne se sont élevées à « au moins 42,8 millions d’euros » alors qu’elles ne devaient pas dépasser, selon la loi, le plafond de 22,5 millions. Pour le dissimuler, les anciens responsables de l’UMP sont soupçonnés d’avoir supporté une partie des coûts en faisant passer les meetings du candidat pour des conventions politiques bidon. Aujourd’hui, Jérôme Lavrilleux est le seul à reconnaître les faits. Dans un entretien au Courrier Picard, lundi, il a toutefois rappelé que, selon lui, « personne ne s’était enrichi personnellement dans cette affaire ».
- Pourquoi Jean-François Copé n’est-il pas sur le banc des prévenus ?
Patron de l’UMP à l’époque, Jean-François Copé a bénéficié d’un non-lieu dans cette affaire. Le juge Serge Tournaire a trouvé « étonnant » qu’il n’ait pas cherché à comprendre pourquoi son parti était au bord du défaut de paiement mais « l’enquête n’a pas permis de découvrir d’éléments matériels laissant penser qu’il était avisé du système de fausses facturations ».
Pour autant, certains protagonistes du dossier n’ont toujours pas digéré ce traitement de faveur. Plusieurs avocats ont donc déjà réclamé une reprise de l’enquête à son sujet après avoir exhumé un contrat de prêt de 55 millions d’euros qui prouverait, selon eux, qu’il en savait plus qu’il ne l’a dit aux juges. La question devrait occuper les débats dès la réouverture du dossier. Mais c’est en simple témoin que Jean-François Copé est convoqué le 27 mai.
- Que risquent les prévenus dans cette affaire ?
Renvoyés pour faux, usage de faux, abus de confiance, escroquerie, ils encourent jusqu’à cinq ans de prison. Et à l’exception de Jérôme Lavrilleux, qui reconnaît les faits, tous comptent se défendre d’avoir participé à la mise en place de ce système.
Nicolas Sarkozy devrait pour sa part faire valoir que seul un des deux juges d’instruction a signé l’ordonnance ayant conclu à son renvoi, le juge Van Ruymbeke n’ayant pas été convaincu par l’analyse de son collègue. Il devrait aussi rappeler au tribunal qu’il a déjà, à ses yeux, payé pour le dépassement de son compte de campagne, ayant été épinglé par le Conseil constitutionnel.
De son côté, le parti Les Républicains entend se constituer partie civile et réclamer la somme de 16 millions d’euros de dommages et intérêts.
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