Euro 2016 à Marseille : Scotland Yard raconte la traque des hooligans russes qui ont tabassé un supporter anglais
PROCES•Au procès des deux supporters russes jugés pour violences, la police londonienne a dévoilé ses méthodes de surveillance des hooligansClara Martot
L'essentiel
- Durant l’Euro 2016, de violents affrontements avaient éclaté en plein centre-ville de Marseille avant le match Angleterre-Russie.
- Cette semaine, deux hooligans russes sont jugés par la cour d’assises d’Aix-en-Provence pour violences aggravées sur un supporter anglais désormais handicapé.
- Ce mercredi, trois policiers londoniens ont raconté à la barre la traque des accusés.
Six mois avant l’ouverture de l’Euro 2016, la police londonienne de Scotland Yard avait mis sur pied une brigade spéciale pour prévenir les violences qui pourraient survenir durant l’événement. C’est le travail de cette équipe britannique qui a permis de retrouver la trace de deux ressortissants russes, Pavel Kossov et Mikhaïl Ivkine, soupçonnés de violences aggravées. Depuis lundi, ces deux supporters du Spartak de Moscou sont en effet jugés devant la cour d’assises d’Aix-en-Provence pour le tabassage d’un supporter anglais de 51 ans. Les faits remontent au 11 juin 2016, quelques heures avant le match Angleterre-Russie au Vélodrome.
A cette occasion, Marseille avait vu débarquer « un noyau de trente hooligans russes, très organisé, suivi d’une centaine d’opportunistes », selon Geoff Pearson, chercheur anglais spécialiste du hooliganisme interrogé après les faits par L’Equipe Magazine. L’article de presse a été cité par le président ce mercredi, juste avant l’audition de trois officiers anglais de police judiciaire. L’occasion d’interroger ces témoins sur l’appartenance, ou non, des accusés à la mouvance hooligan.
« Ils ne sont même pas amis sur Instagram ! »
Katherine Riddle est la fonctionnaire qui a permis de retrouver la trace des deux suspects via le téléphone d’un hooligan anglais. Prénommé John, il figure parmi la soixantaine d’Anglais interpellés après l’Euro pour des soupçons de violences. Le jour de la rencontre à Marseille, il apparaît aux côtés des accusés. Appelée à la barre, Katherine Riddle déroule les étapes de son enquête dont John fait office de fil rouge.
Power Point à l’appui, elle fait défiler captures d’écran de SMS et posts Instagram. « Peut-on conclure que les deux accusés se connaissaient avant juin 2016 ou qu’ils évoluaient dans le même milieu ? » interroge le président. « Je ne peux pas affirmer qu’ils se connaissaient, mais leurs profils sur les réseaux sociaux prouvent qu’ils avaient des relations en commun », réplique l’officière de police.
« Mais vous n’avez pas d’éléments qui prouvent qu’ils étaient en contact avant ou après l’Euro », tempère Me Alain Duflot, avocat de Pavel Kossov. « Ils ne sont même pas amis sur Instagram ! », ajoute son confrère Me Nikita Sichov. Derrière la rangée d’avocats, Pavel Kosov, crâne rasé et chemise à carreaux comme son coaccusé, semble saisir des bribes du débat et se crispe.
Des ressortissants fichés
Andrew Barnes, commissaire à Scotland Yard, était à la tête de la brigade anglaise créée spécialement pour l’Euro 2016. « En amont de l’évènement, nous avons envoyé un courrier à de nombreux ressortissants fichés pour leur confisquer leurs passeports et les empêcher de se déplacer. Puis nous avons envoyé plusieurs fonctionnaires en France pour identifier les comportements violents que pourraient commettre les Anglais », explique-t-il. Ces policiers spéciaux ont même un nom pour désigner leur rôle lors des déplacements : les « spotters ».
Le fonctionnaire assure par ailleurs que « de nombreux pays fonctionnent de la même manière », citant par exemple « la France et l’Allemagne ». Interrogé ensuite par la cour sur les méthodes des autorités russes, il décline, expliquant ne pas connaître « leurs pratiques spécifiques ». Et conclut à propos de la victime, en fauteuil roulant depuis son agression : « Andrew Bache était un fervent supporter mais rien de son environnement ne le reliait au hooliganisme. » A l’époque, le parquet de Marseille avait précisé que la « quasi-totalité » des 35 blessés recensés ce jour-là étaient des Anglais.