Jacquie et Michel : « Ils m’ont salie ! Ils m’ont imposé des trucs que je ne voulais pas ! »
TEMOIGNAGE•Alors que le parquet de Paris a ouvert une enquête pour « viols » et « proxénétisme », Karima raconte comment elle a été traumatisée par un tournage pour Jacquie et MichelPropos recueillis par Vincent Vantighem
L'essentiel
- Jacquie et Michel, célèbre site de vidéos amateurs pornographiques, est sous le coup d’une enquête ouverte par le parquet de Paris pour « viols » et « proxénétisme ».
- Plusieurs actrices ont dénoncé le fait qu’elles avaient subi des actes sexuels alors qu’elles n’étaient pas consentantes.
- Karima, qui a vécu un cauchemar en acceptant de tourner une scène pour Jacquie et Michel, a accepté de se confier à 20 Minutes.
Récemment encore, Karima* a déménagé. Cela devient une habitude ces dernières années. La faute aux gens qui la reconnaissent dans la rue. En la croisant, certains la félicitent d’un œil goguenard. Mais la plupart l’insultent. Voire lui crachent dessus. La faute à cette satanée vidéo pornographique qui n’arrête pas de ressurgir sur Internet. « Elle disparaît à un endroit pour mieux réapparaître ailleurs, lâche-t-elle. En ce moment, je suis sur une dizaine de sites. Et je ne peux rien faire… »
Alors que le parquet de Paris vient d’ouvrir une enquête pour « viols » et « proxénétisme » visant les conditions dans lesquelles sont tournées certaines scènes pour le site Jacquie et Michel, cette femme aujourd’hui âgée de 43 ans a accepté de raconter à 20 Minutes sa sordide expérience d’actrice amateur d’un soir.
C’était il y a quelques années déjà. Dans une vie que Karima préférerait oublier si elle le pouvait vraiment. « J’étais dans la toxicomanie. Cocaïne et alcool, aussi, souffle-t-elle. Le mec avec qui j’étais m’a dit qu’il avait trouvé un moyen d’avoir un peu d’argent… »
« Il a choisi le prénom de ma fille en guise de pseudo pour la vidéo »
Son sourire a disparu quand la voiture s’est arrêtée devant une maison de banlieue parisienne. « C’était un peu glauque. Mais je suis entrée… » A l’intérieur, elle commence par discuter avec un homme. Il la met en confiance. Lui demande si elle a des enfants. Et comment ils s’appellent. Comble du sordide : « Il a choisi le prénom de ma fille en guise de pseudo pour la vidéo », s’étrangle la jeune femme qui travaillait alors dans la restauration.
L’homme lui tend un contrat qu’elle ne prend pas le temps de lire et lui promet 300 euros. « On est descendus dans une cave. Il y avait trois mecs. J’ai dit que je ne voulais pas autant d’acteurs. Mais ils ont répondu que les caméras étaient déjà installées… » Karima réfléchit à toute vitesse. Et comprend rapidement que le piège s’est déjà refermé sur elle.
« Les portes étaient fermées »
« Je ne savais pas où j’étais. J’étais un peu choquée à l’idée de ce qui m’attendait. Ils ne m’ont pas séquestrée. Mais ils me suivaient partout dans cette maison et les portes étaient fermées… Alors, j’ai fini par me laisser faire… » En disant cela, sa voix se brise immédiatement.
« Ils m’ont salie. Je suis passée pour une grosse salope. Chacun à leur tour… Ils m’ont imposé des… des trucs que je ne voulais pas. Ils m’ont dit : "Même si tu n’aimes pas ça, fais semblant de prendre du plaisir !" C’était juste horrible. »
Aujourd’hui, cette mère de famille ne passe pas un jour sans repenser à toute cette histoire. « Cela me poursuit parce que la vidéo continue de tourner sur Internet. Encore et encore. Je ne sais pas quand cela va s’arrêter. »
* Le prénom a été changé