Coronavirus : Avec la fermeture des tribunaux, la justice au ralenti
JUSTICE•La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a annoncé samedi la fermeture de tous les tribunaux au public. Seule l’activité essentielle est maintenueCaroline Politi
L'essentiel
- Depuis ce lundi, les tribunaux sont fermés au public « sauf en ce qui concerne le traitement des contentieux essentiels ».
- De nombreux procès sont renvoyés.
- Les enquêtes tourneront également au ralenti.
Porte clause, ou presque. Depuis ce lundi, les tribunaux sont fermés au public « sauf en ce qui concerne le traitement des contentieux essentiels », a annoncé ce week-end Nicole Belloubet, la ministre de la Justice. Si la nouvelle n’a rien d’étonnant compte tenu de l’épidémie de coronavirus, elle met une nouvelle fois à rude épreuve les juridictions, déjà très éprouvées par la grève des avocats, entamée en janvier. « On était déjà sur des renvois à en moyenne une année, voire plus dans certaines chambres correctionnelles, c’est évident que cela ne va pas arranger la situation », confie-t-on à Nanterre.
Des milliers d’audiences suspendues ou renvoyées
En attendant que la situation s’améliore, seules les audiences indispensables – les comparutions immédiates, celles concernant la détention provisoire ou le contrôle judiciaire, les ordonnances de protection ou les urgences concernant les mineurs, notamment – sont maintenues. « Le juge des référés examinera aussi les dossiers urgents », précise le tribunal judiciaire de Paris dans un communiqué. Objectif : assurer la continuité de la justice tout en limitant, comme partout ailleurs, les interactions afin de contenir la propagation du virus. « Les personnels présents sont uniquement ceux concernés par des urgences, les autres feront du télétravail quand c’est possible », indique-t-on à Créteil.
Conséquence directe : le calendrier judiciaire, déjà engorgé, devient un véritable casse-tête. A Paris, le procès-fleuve du Mediator a ainsi été suspendu. Reprise théorique des audiences, le 2 juin. Celui des attentats de Charlie Hebdo et de l’Hypercacher, qui doit s’ouvrir le 4 mai pour deux mois, est en suspens. A Saintes, le très attendu procès de Joël Le Scouarnec, ce chirurgien soupçonné de centaines de viols et agressions sexuelles, entamé vendredi, a finalement été renvoyé au mois d’octobre en « raison de la crise sanitaire ». Et ce, bien qu’il se tenait à huis clos. A Nanterre, décision a été prise de terminer le procès d’assises en cours – le verdict est attendu ce lundi – mais de renvoyer celui prévu en fin de semaine, dont l’accusé comparaît sous contrôle judiciaire. « Quand on voit le nombre de dossiers en souffrance qu’on a déjà, on se demande comment on va gérer cette situation », s’inquiète une greffière parisienne.
Les enquêtes réduites au strict minimum
Si une permanence est assurée par tous les parquets, les enquêtes tourneront également au ralenti. Dans cette même circulaire, il est demandé aux procureurs de traiter en priorité les enquêtes « présentant un fort enjeu en termes d’ordre public et nécessitant une réponse judiciaire immédiate ». De même, pour éviter l’engorgement des prisons, la note demande la limitation des déferrements aux faits pour lesquels « une mesure de sûreté apparaît indispensable »
Une nouvelle fois, il s’agit d’assurer la continuité de la justice en se concentrant sur les affaires les plus graves – des crimes, violences en récidive… – sans saturer les services de police et de justice, déjà mis à rude épreuve. Ainsi, les interpellations ne présentant pas de caractère d’urgence doivent ainsi être reportées. Si la direction des affaires criminelles et des grâces appelle à élargir le recours à la visio-conférence lorsque cela est possible, elle reconnaît néanmoins que les mesures prises afin de freiner la propagation du virus « vont conduire à fortement réduire l’activité tout au long de la chaîne pénale ».