Après sa rocambolesque fuite de Russie, Yoann Barbereau réclame un million d'euros à la France
JUSTICE•Il y a plus de deux ans, l'ex-directeur de l'Alliance française d'Irkoutsk en Sibérie fuyait la Russie par ses propres moyens pour échapper à un «complot»20 Minutes avec AFP
L'essentiel
- Yoann Barbereau a réclamé jeudi devant la justice le versement par l'Etat de près d'un million d'euros d'indemnités pour ne pas l'avoir «protégé».
- Avant que la décision ne soit rendue, dans deux semaines, le rapporteur public a préconisé le versement de 180.000 euros.
Plus de deux ans après sa rocambolesque fuite de Russie pour échapper à un « complot », l’ex-directeur de l’Alliance française d’Irkoutsk en Sibérie Yoann Barbereau a réclamé jeudi devant la justice le versement par l’Etat de près d’un million d’euros d’indemnités pour ne pas l’avoir « protégé ». Poursuivi en Russie pour des accusations de pédophilie montées de toutes pièces selon lui, Yoann Barbereau avait été arrêté, emprisonné, placé en résidence surveillée avant de rejoindre par ses propres moyens l’ambassade de France à Moscou. Un an plus tard, il s’était enfui et avait rejoint la France en novembre 2017 après une cavale de 8.000 kilomètres de la Sibérie à Nantes.
Accusant le ministère des Affaires étrangères de « lâcheté » pour lui avoir refusé des indemnités au titre de la « protection fonctionnelle » – due aux fonctionnaires et agents publics quand ils sont victimes d’attaques – il demande plus de 977.000 euros en réparation des préjudices subis. Le rapporteur public, dont l’avis est généralement suivi, a préconisé que l’Etat soit condamné à payer environ 180.000 euros à Yoann Barbereau.
Un « climat d’hostilité »
Le ministère des Affaires étrangères ne remet pas en cause le fait que l’ancien directeur de l’Alliance française a été victime d’attaques injustifiées, mais estime avoir pris les « mesures appropriées » en l’accueillant à l’ambassade à Moscou ou en prenant en charge ses frais d’avocat russe. Le ministère considère d’autre part que l’arrestation, l’incarcération et les démêlés judiciaires de Yoann Barbereau n’ont aucun lien avec son ancienne fonction, essentiellement « culturelle » et non « politique », a soutenu à l’audience sa représentante.
Pour le rapporteur public au contraire, c’est « bien dans le cadre de ses fonctions qu’il avait noué des relations avec de nombreux représentants locaux, dont le maire d’Irkoutsk », un opposant notoire au pouvoir russe, arrêté lui aussi. Son arrestation s’inscrivait d’autre part dans un « climat d’hostilité » contre les Alliances françaises en Russie, accusées d’être utilisées comme couvertures par des espions, et son ordinateur avait été piraté un mois après la crise diplomatique du «Mistral», un contrat d’armement annulé par la France en pleine tension avec la Russie, a rappelé le rapporteur.
« C’est la première fois que j’ai l’occasion d’être entendu. Pendant toute cette affaire, nous avons fait face du côté des autorités françaises à un mur, un embarras. L’important pour moi, c’est la reconnaissance de mon préjudice », a déclaré Yoann Barbereau, au sortir de l’audience. La décision devrait être rendue sous quinze jours.