ASSISES SPECIALESLe recruteur présumé d'une filière djihadiste de Strasbourg jugé à Paris

Strasbourg : Le recruteur présumé de la filière djihadiste de la Meinau jugé à Paris

ASSISES SPECIALESMourad Farès aurait recruté en 2013 Foued Mohamed-Aggad, l'un des kamikazes du Bataclan
T.G. avec AFP

T.G. avec AFP

L'essentiel

  • Le procès de Mourad Farès s’est ouvert ce lundi, à Paris. Il comparaît pour « association de malfaiteurs terroriste criminelle, financement du terrorisme et direction d’un groupe terroriste ».
  • Il est notamment soupçonné d’avoir orchestré le départ en décembre 2013 de dix jeunes de Bas-Rhin, surnommés les « 10 de Strasbourg », dont Foued Mohamed-Aggad, l’un des futurs kamikazes du Bataclan.
  • Incarcéré depuis septembre 2014, Mourad Farès a depuis adopté en détention une « posture de repenti » et abandonné toute velléité djihadiste.

Son procès devant les assises de Paris s’est ouvert ce matin et doit durer jusqu’à jeudi. Mourad Farès, 35 ans, s’y expliquera peut-être. Il comparaît pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, financement du terrorisme et direction d’un groupe terroriste.

Originaire de Thonon-les-Bains, en Haute-Savoie, l’homme est considéré comme une ancienne figure du recrutement pour le djihad en Syrie et aussi accusé d’y avoir dirigé un groupe de jeunes combattants francophones. Ce transfuge de l’organisation de l'Etat islamique avait été interpellé en Turquie et été remis à la France le 10 septembre 2014.

A l’origine du départ des « 10 de Strasbourg »

Ces dernières années, son nom est apparu dans plusieurs dossiers de filières d’acheminement vers la Syrie jugés par la 16e chambre du tribunal correctionnel de Paris. Il est notamment soupçonné d’avoir orchestré le départ en décembre 2013 de dix jeunes du Bas-Rhin, surnommés les « 10 de Strasbourg », dont Foued Mohamed-Aggad, l’un des futurs kamikazes du Bataclan. Tous auraient été recrutés grâce à la filière de la Meinau, du nom du quartier strasbourgeois.

Mourad Farès, qui se serait radicalisé fin 2012, était très actif sur les réseaux sociaux où il faisait la propagande du jihad. Les juges lui imputent l’organisation jusqu’à la mi-2013 de plusieurs réunions évoquant des départs en Syrie, en région parisienne, à Strasbourg donc ou Lyon. Il était lui-même parti en juillet 2013, traversant l’Europe en voiture avec trois comparses. Il avait reçu préalablement plusieurs virements bancaires, qui auraient pu selon les magistrats servir à financer son voyage. Lui les a justifiés en invoquant des collectes sur Internet pour des personnes dans le besoin.

Il nie avoir combattu

A son arrivée en Syrie, Mourad Farès était allé à Alep, au quartier général de l’organisation terroriste Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL, devenue l’organisation de l’Etat islamique en 2014). Il a admis avoir suivi une formation sur le maniement des armes, mais nie avoir combattu, limitant son rôle à quelques surveillances. Selon ses déclarations aux enquêteurs, il se serait « désolidarisé » de l’EIIL à l’automne 2013 et aurait quitté les rangs de l’organisation dont il condamnait certaines méthodes.

Avec d’autres Français, principalement originaires de Nice, il a ensuite intégré fin 2013 le groupe du Franco-Sénégalais Oumar Diaby, un important recruteur de djihadistes également connu sous le nom d’Omar Omsen, en train de se constituer dans le pays. Pendant cette période, Mourad Farès aurait continué à aider de jeunes candidats francophones au djihad à entrer en Syrie, leur fournissant les contacts de passeurs ou en allant directement les chercher à la frontière. Il aurait incité d’autres à quitter l’EIIL pour rejoindre la brigade djihadiste d’Oumar Diaby. Selon plusieurs témoins, interpellés à leur retour en France, Mourad Farès avait assuré l’intérim à la tête du groupe en l’absence de Diaby, parti au Sénégal. Il a toujours contesté toute fonction de dirigeant.

Repenti ?

S’il est acquis que Mourad Farès a quitté la Syrie en juillet 2014 et sollicité l’aide des autorités françaises à son arrivée en Turquie, les investigations n’ont pas permis d’établir avec certitude ses activités et les raisons de son départ. Incarcéré depuis septembre 2014, Mourad Farès aurait adopté en détention une « posture de repenti » et abandonné toute velléité djihadiste.

L’un de ses ex-compagnons de voyage, Ala Eddine Benali, 25 ans, comparaît libre sous contrôle judiciaire devant les assises spéciales pour avoir tenté de rejoindre la Syrie. Il n’avait pu entrer en Turquie pour un problème de passeport. Deux autres hommes, Hachmi Hattabi et Bilel Ben Mimoun, arrivés avec Mourad Farès en Syrie et présumés morts, bien que toujours recherchés, seront jugés par défaut.