Affaire Élodie Kulik : « Nounours gentil » ou « affamé du cul », qui est vraiment Willy Bardon ?
PROCÈS•Le procès de Willy Bardon, accusé du viol et du meurtre d’Elodie Kulik, s’est ouvert jeudi devant la cour d’assises de la SommeVincent Vantighem
L'essentiel
- Agée de 24 ans, Elodie Kulik a été violée et étranglée en 2002. Son corps, en partie carbonisé, a été découvert sur un terrain désaffecté à Tertry, dans la Somme.
- Dix-sept ans plus tard, Willy Bardon, 45 ans, est jugé devant la cour d’assises, à Amiens.
- Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Son procès doit durer jusqu’au 4 décembre.
A la cour d’assises de la Somme, à Amiens
Le mouvement était presque imperceptible. A la barre depuis une bonne heure déjà, Amélie D. a commencé à se tourner vers le fond du prétoire en rosissant, avant de se raviser brusquement pour éviter de croiser le moindre regard. « C’est gênant, finit-elle par avouer. C’est que… J’ai de la famille dans la salle… » Pour la huitième fois, Martine Brancourt, la présidente de la cour d’assises de la Somme, venait de lui poser une question sur ses pratiques sexuelles.
« Je sais que ce n’est pas évident, justifie la magistrate. Mais ces questions sont en lien avec le dossier… » Depuis jeudi, Willy Bardon, 45 ans, est en effet jugé pour le viol en réunion et le meurtre d’Elodie Kulik, dont le corps à demi-carbonisé a été découvert en janvier 2002 sur un terrain vague, à Tertry (Somme). Car le problème, c’est que Willy Bardon traîne, d’après l’enquête, la réputation d’être au mieux « un dragueur invétéré », au pire un « affamé du cul ».
Il faut donc poser la question à Amélie D. Emmitouflée sous un gros pull et une écharpe en laine, la jeune femme est citée comme témoin parce qu’elle partage la vie de l’accusé depuis douze années. Dont les six premières dans le plus grand secret. « A l’origine, Willy était l’oncle de mon concubin, raconte-t-elle. On se voyait aux repas de famille. On s’est rapprochés. D’abord par la parole. Il est devenu mon confident. Et puis, on a fini par sauter le pas et commencer une relation extraconjugale sans que personne ne le sache. »
Quand Bardon voulait un plan à trois avec sa compagne et sa maîtresse
Crâne dégarni, nez épaté et léger embonpoint : Willy Bardon n’a pas le physique d’un jeune premier. « Mais c’est un charmeur », décrit Amélie D. « Un gueulard, aussi », complète-t-elle. « Du genre à dire ce qu’il pense », assure son frère, René. Et à proposer ce qu’il veut. Y compris sur le plan sexuel.
Christelle P. en sait quelque chose. Jeudi après-midi, cette femme, avec qui il est resté vingt-quatre ans et a eu un enfant, est venue à la même barre raconter la proposition de plan à trois qu’il lui avait faite un jour. Pas avec n’importe qui : avec Amélie D. justement. Soit la fille avec qui il la trompait depuis des semaines. « De toute façon, c’était un refus de ma part », précise cette dernière lors de son audition.
Les rapports dans la fourgonnette et les photos dénudées
Dissimulée derrière ses longs cheveux auburn, cette conseillère financière de 34 ans explique qu’ils ont toujours parlé de leurs fantasmes respectifs « pour ne pas tomber dans la routine ». Mais que ce n’est pas pour autant qu’elle était prête à tout. D’accord pour les « jouets », d’accord pour avoir des rapports dans la fourgonnette ou dans les bois faute de mieux, elle l’était beaucoup moins pour lui envoyer des photos d’elle nue.
Et encore moins pour lui « offrir à Noël » le rapport sexuel qu’il réclamait précisément à ce moment-là parce qu’elle était « indisposée ». La question ne serait sans doute pas revenue sur le tapis de la cour d’assises à plusieurs reprises si un tampon hygiénique usagé n’avait pas été découvert à côté du cadavre d’Elodie Kulik…
Un plan à trois n’est pas un acte « pénalement répréhensible »
Impassible, Willy Bardon n’a jamais cillé pendant tous ces échanges. Sans doute parce qu’il sait, comme l’a rappelé Stéphane Daquo, son avocat, qu’un plan à trois n’est pas un acte « pénalement répréhensible ». Et que son attrait pour les « gang-bang », que la présidente a tant de mal à prononcer, et les « bars à thèmes de Paris » ne font pas de lui un violeur.
Mais surtout que les témoins qui se sont succédé à la barre depuis deux jours l’ont décrit comme un homme « gentil », un « Nounours » plus susceptible d’aider les jeunes femmes en danger que de les étrangler dans un champ en pleine nuit après les avoir violées. Mais c’est pour cela qu’il encourt aujourd’hui une peine de réclusion à perpétuité. Il devrait commencé à être interrogé par la cour lundi. Le verdict, lui, est attendu pour le 4 décembre.
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