Meurtre de la joggeuse de Bouloc: Une Clio, des doutes et des mensonges au procès du meurtrier présumé de Patricia Bouchon
PROCES•Le procès de Laurent Dejean, meurtrier présumé de Patricia Bouchon, a débuté ce jeudi devant les Assises de la Haute-Garonne, dans une ambiance particulièreBéatrice Colin
L'essentiel
- Le procès de Laurent Dejean, meurtrier présumé de Patricia Bouchon assassinée en 2011 à Bouloc alors qu’elle faisait son jogging, a débuté ce jeudi à Toulouse.
- Au premier jour d’audience de ce procès qui doit durer plus de quinze jours, l’accusé a à nouveau clamé son innocence.
- Lors de l’audition des gendarmes qui ont mené l’enquête, l’avocat général a pointé certains éléments à charge de l’enquête, au grand dam des parties civiles.
- Portrait-robot, comportement, déclarations… Les enquêteurs ont détaillé les éléments qui les ont menés à Laurent Dejean.
«Cela fait quatre ans que je suis en prison pour rien ». Ce sont les premiers mots prononcés par Laurent Dejean, ce jeudi à l’ouverture de son procès devant les Assises de la Haute-Garonne.
L’homme de 39 ans, hospitalisé en psychiatrie il y a encore quelques jours pour une décompensation, doit répondre du meurtre de Patricia Bouchon, cette secrétaire juridique assassinée le 14 février 2011 à Bouloc alors qu’elle faisait son jogging quotidien.
Il est resté apathique tout au long du rappel des faits, à peine a-t-il reconnu en début d’audience avoir possédé une Clio, ce qu’il avait nié un temps devant les gendarmes. Une voiture qui a son importance, puisque c’est un des éléments qui relie l’accusé au meurtre.
La Clio, sa couleur et des doutes
Quelques instants après avoir croisé la joggeuse, un témoin a évité de justesse une voiture stationnée sur la chaussée tous feux éteints. Une Clio grise selon ses déclarations aux enquêteurs.
Or celle de Laurent Dejean était blanche a rappelé l’avocat général, David Senat. « Le témoin a toujours parlé de couleur claire », assure un gendarme. « On peut s’interroger sur cette rectification pour les besoins de la cause », poursuit le représentant du ministère public qui ne semble pas prêt à porter l’accusation. Il est dans la lignée de son prédécesseur, qui, il y a un an, s’était positionné contre le renvoi de Laurent Dejean devant les assises.
Sur les bancs des parties civiles, la famille de Patricia Bouchon trépigne, ne comprenant pas les interventions de l’avocat général « à décharge ». Alors que pour eux, des éléments à charge existent.
Un portrait-robot et des regrets
Quatre enquêteurs se sont succédé à la barre pour détailler tous les indices qui les ont poussés vers Laurent Dejean et sa mise en examen en février 2015.
Avant d’étudier cette piste, ils en ont éliminé beaucoup d’autres. Mais après la diffusion, fin 2013, du portrait-robot de l’homme qui se trouvait au volant de la Clio croisé par le témoin principal, ils ont reçu un appel anonyme dénonçant Laurent Dejean.
Notre dossier sur l'affaire Bouchon
Cet habitant de Bouloc, ils l’avaient déjà interrogé quelques mois après le meurtre en raison de son comportement bizarre. Un gendarme avait alors été frappé par la ressemblance de Laurent Dejean avec le portrait-robot. « Mais à l’issue de son audition, il n’y avait pas d’éléments, plusieurs individus présentaient une similitude avec le portrait-robot et nous n’avions pas connaissance qu’il avait eu une Clio », justifie Didier Bonnin, un des directeurs d’enquête de l’affaire. Tout en regrettant aujourd’hui « de ne pas avoir enclenché les vérifications ».
Il aura donc fallu attendre la diffusion auprès du grand public du portrait-robot pour que l’hypothèse Laurent Dejean ressurgisse. Au total, 37 personnes l'ont reconnu, parmi lesquels sa propre sœur, sa tutrice ou son employeur. Ils ont été aussi plus de 30 à indiquer que l’accusé était en possession d’une Clio au moment des faits.
Changement de comportement
Ses accès de violence, notamment contre sa mère, ses sorties nocturnes à la recherche de cigarettes et de cannabis au volant de sa voiture vont continuer à forger la conviction des enquêteurs. Tout comme ses mensonges lorsqu’il a dit à son patron qu’il était arrêté pour une tendinite alors qu'il s'agissait de problèmes psychiatriques.
Après la mort de Patricia Bouchon, son comportement a aussi changé, « il a cessé de dealer juste après le meurtre, il a démissionné sans raison, précisant qu’il ne voulait pas que cette affaire lui retombe dessus », relève un des enquêteurs. Avant d’ajouter : « Sa famille très proche l’a soupçonné de la mort de Patricia Bouchon ».