CONDAMNATIONDix mois de prison pour avoir menacé de mort le journaliste David Thomson

Dix mois de prison pour avoir menacé de mort David Thomson, journaliste spécialiste du djihadisme

CONDAMNATION« Je ferai couler ton sang. Mon Seigneur est témoin », avait envoyé l’accusée par texto
G. N. avec AFP

G. N. avec AFP

Après avoir fait ses confidences au journaliste spécialiste du djihadisme David Thomson pour son ouvrage Les revenants, elle lui avait envoyé des messages de menaces de mort depuis la Syrie. La jeune femme de 25 ans a été condamnée ce mardi à dix mois de prison ferme.

« Je ferai couler ton sang. Mon Seigneur est témoin », « c’était pour mieux te buter » : Sonia Belayati, partie à deux reprises en Syrie, a été reconnue coupable d’avoir envoyé des messages par Whatsapp menaçant de mort le journaliste depuis un téléphone turc, alors qu’elle se trouvait en Syrie, dans la région d’Idlib, entre décembre 2016 et janvier 2017.

Une plainte en février 2017

Déjà condamnée en décembre à huit ans de prison pour association de malfaiteurs terroristes, la jeune femme comparaissait pour menaces de mort réitérée en relation avec une entreprise terroriste, après une plainte de David Thomson en février 2017, journaliste connu pour son travail sur le djihad, qui a depuis quitté la France pour s'exiler aux Etats-Unis.

Sonia Belayati et lui se sont rencontrés à plusieurs reprises entre 2015 et 2016, alors que le journaliste, déjà auteur d’un livre intitulé Les Français djihadistes, travaillait à la rédaction de son deuxième ouvrage, Les revenants, une enquête sur les jeunes Français qui rentrent de Syrie ou d’Irak, qui lui a valu le prix Albert Londres 2017. Absent à l’audience, le reporter, partie civile, a indiqué que la jeune femme apparaissait dans son livre de manière anonyme.

« J’ai des raisons de lui en vouloir »

Sonia Belayati s’est reconnue sous les traits de « Lena » : « J’ai des raisons de lui en vouloir : je lui avais dit "même en anonyme, je veux pas apparaître dans ton livre" et en plus, il a raconté des mensonges ». « Quand je vois le profil qu’il a dressé dans son livre, j’ai été blessée. Pour moi, un journaliste c’est hyper respectueux, ça déforme pas la parole », poursuit-elle. « David Thomson et moi ne sommes pas amis. Mais j’espère qu’il saura que jamais j’irai lui faire du mal », a-t-elle expliqué.

Reconnaissant qu’elle n’a pas « pris le temps de lire » l’ouvrage en entier, la jeune femme, en prison depuis deux ans, allure soignée et queue de cheval, raconte une détention chaotique « à l’isolement », à avoir « l’impression d’être un animal », ne voyant son fils, né en détention et depuis confié à ses parents qui vivent à Saint-Etienne (Loire), qu’une fois par mois.

Lors de son premier retour en France, Sonia Belayati avait participé à l’association de Dounia Bouzar, une des figures de la lutte contre l’embrigadement djihadiste en France, et collaboré à la rédaction du scénario du long-métrage Le ciel attendra, film choc sur la radicalisation des jeunes, de Marie-Castille Mention-Schaar, sorti en 2016. Jusqu’à ce qu’elle viole son contrôle judiciaire et reparte en Syrie en janvier 2017, dans la katiba (cellule combattante) d’Omar « Omsen » Diaby, considéré comme le recruteur de dizaines de djihadistes français.

Absence de « regrets ou de remords »

Elle explique tantôt que c’est lui ou une de ses épouses qui a rédigé les messages, tantôt que c’est elle-même, sous la pression d’Omar Diaby. Devant les « explications très peu crédibles et très peu convaincantes » et l’absence de « regrets ou de remords » de Sonia Belayati, la procureure a requis 18 mois d’emprisonnement.

L’avocat de la Défense, Me Charles Rominger, a argué qu’il était impossible d’établir que sa cliente était bien l’auteure des messages, pointant du doigt « les fautes de français à chaque mot » alors que la jeune femme a un bac littéraire, et dit lire beaucoup en prison. « J’écris pas du tout comme ça, avec ces fautes d’orthographe qui piquent un peu les yeux », s’est-elle défendue.

A l’énoncé du jugement, Sonia Belayati a laissé exploser sa colère, apostrophant le tribunal : « Tous les moyens sont bons pour nous laisser en prison. C’est pas les revenants qui sont dangereux, c’est les frustrés du djihad ! »