Marseille: Chaussettes de l'OM volées, pilleurs et «street knowledge»... Embouteillages en comparution immédiate
REPORTAGE•« 20 Minutes » a passé l’après-midi au tribunal de grande instance de Marseille, où le programme était très chargé en comparution immédiate…Jean Saint-Marc
L'essentiel
- Plusieurs perturbateurs présumés des manifestations du 8 décembre à Marseille, étaient jugés en comparution immédiate, ce lundi.
- L’audience a été perturbée par le grand nombre de prévenus. Mais la cour a tout de même condamné un des jeunes arrêtés pour avoir jeté une pierre sur un policier.
«Bon. Ça tape moins fort que la semaine dernière ! » Soupir d’un avocat commis d’office, ce lundi, au tribunal de grande instance de Marseille. Les juges ont été moins sévères que le 3 décembre, où ils ont notamment condamné à deux mois de prison ferme un jeune sans casier judiciaire. Pas de lourdes peines, ce lundi. Et beaucoup de renvois.
Faute de parties civiles, faute de vidéos dans le dossier, faute d’interprètes… De nombreux dossiers ont été renvoyés à une date ultérieure, alors que le programme de ce lundi était particulièrement chargé. Avec plus de cinquante interpellations ce week-end à Marseille, deux chambres, contre une habituellement, jugeaient en comparution immédiate. Une situation étonnante qui forçait journalistes et avocats à se dédoubler.
« Où est votre consœur ? » demande le président Johan Denis. « Elle plaide à l’étage d’en-dessous », sourit un avocat. « Ah… C’est original, ça, comme situation », reprend le président. Le dossier de Pierre-Louis, étudiant arrêté samedi sur la Canebière, a tout de même pu être étudié.
« J'enjolivais, je faisais le cacou »
Le jeune homme aux cheveux bouclés a été condamné à trois mois de prison avec sursis pour avoir jeté une pierre sur un policier. C’était sa première manifestation, ce qui a suscité quelques railleries du côté de la procureure : « Tous les médias annonçaient que ce serait compliqué… C’est quand même une sacrée entrée en matière, pour une première ! » Pierre-Louis, facilement reconnaissable à sa veste blanche, est étudiant en master 2 de biologie. Il se rêve chercheur en cancérologie et a « des papillons dans le ventre » à l’évocation de ses partiels, qui débutent la semaine prochaine.
« Avec un profil comme ça, que faisiez-vous dans ce genre de manifestation ? », lance le président. Il a longuement lu des messages Facebook que Pierre-Louis a rédigés, ce samedi, en pleine manifestation. Des messages dans lesquels il se vantait, entre autres, d’être en train « de caillasser les flics » ou de « se faire courser par les baqueux. » Le jeune homme, qui nie avoir jeté le moindre caillou, s’est poussivement défendu.
« J’enjolivais, je faisais un peu le cacou ! J’essayais de passer pour un rebelle », tente ce bon élève, qui se pose en observateur de la manifestation. « Je voulais prendre du street knowledge, un peu comme dans un jeu vidéo », a-t-il osé, ce qui a fait soupirer son avocat, Me Brice Grazzini : « C’est pas gagné, là… » Tout s’est pourtant bien terminé pour son client, dont la condamnation, « un avertissement », ne sera pas inscrite au casier judiciaire, afin de ne pas perturber son intégration professionnelle.
Jugés pour des mêmes faits d’usages de projectiles et de violences contre des policiers, Julien et Viorel sont reconvoqués en janvier. Le premier, un jeune hipster de 24 ans aux cheveux peroxydés, respire quand le président annonce qu’il ne sera pas placé en détention provisoire. Julien, décrit à l’audience comme « un jeune homme immature qui se cherche encore », valide cette étiquette : « c’est plutôt bien décrit. »
Des voleurs de chaussettes (de l'OM)
Une dizaine de pilleurs présumés étaient aussi convoqués en comparution immédiate, ce lundi. Ali et Tarek sont suspectées d’avoir volé des chaussettes, entre autres, dans la boutique officielle de l’OM, sur la Canebière. Le président a évoqué des « préjudices assez importants. » Malek sera lui jugé pour recel d’objets volés dans cette même boutique. Il s’agit de trois écharpes officielles, que le jeune homme dit avoir « ramassé près d’une poubelle. » Les trois hommes seront jugés en janvier et sont placés en détention provisoire d’ici là.
Lors de cette même audience du 16 janvier, Mohamed, Franky, Bilel, Saïd, Bendialo et Bassen comparaîtront pour le pillage de la boutique de prêt-à-porter de luxe Saint-Honoré Paris. « Je me suis laissé tenter, je me suis laissé emporter, mais laissez-moi une dernière chance », tente Franky, dont le casier judiciaire est déjà bien fourni. « J’ai un enfant dans quatre mois », lance le jeune Saïd, aide-maçon âgé d'à peine 18 ans. Il échappe à la détention provisoire mais sera soumis à un contrôle judiciaire très strict. « J’ai compris », lâche-t-il en s’éloignant.