«Gilets jaunes» en Gironde: Trois jeunes hommes condamnés pour vol en réunion au péage de Virsac
JUSTICE•Le tribunal correctionnel de Bordeaux a jugé en comparution immédiate trois jeunes hommes qui s’étaient introduits dans un local administratif de Vinci Autoroutes sur le péage de Virsac pour y dérober des vêtements et des outils…Elsa Provenzano
L'essentiel
- Trois jeunes hommes ont été jugés en comparution immédiate pour le cambriolage d’un local administratif de Vinci, sur le péage de Virsac, en marge de la mobilisation des « gilets jaunes ».
- L’un d’eux a été condamné à un an de prison avec mandat de dépôt car en état de récidive légale et les deux autres à 6 mois de sursis.
- Le plus lourdement condamné pourrait faire appel de la décision dans le délai légal de dix jours.
Les trois prévenus n’en mènent pas large et ont la mine grave dans le box du tribunal correctionnel de Bordeaux ce jeudi, où ils sont encadrés par cinq policiers. Agés de 25 à 29 ans, ils ont été jugés dans le cadre d’une comparution immédiate pour des faits de vols aggravés en réunion, commis dans la nuit du 19 au 20 novembre, dans un local administratif de Vinci Autoroutes sur le péage de Virsac, bastion des « gilets jaunes » en Gironde, au démarrage du mouvement social.
Celui qui a été présenté comme le meneur, Jordan Sanchez, a été condamné à un an de prison ferme avec mandat de dépôt car il était en état de récidive légale, après une condamnation aux Assises en 2013. Les deux autres, Thomas Belaud et Clément Bernard, n’ont jamais eu affaire à la justice et ont été condamnés tous les deux à six mois de prison avec sursis et 1.000 euros d’amendes. Les réparations qui leur seront demandées au regard du préjudice matériel subi par Vinci (encore en train de chiffrer les dégâts) seront examinées par le tribunal le 4 avril prochain.
Des vêtements et des outils dérobés
Sur ce péage de l’A10, les dégâts ont été très importants. Des cabines ont été incendiées et la voirie dégradée, mais ces trois jeunes hommes n’y ont pas pris part. Ils ont été condamnés pour avoir dérobé de l’outillage, des vêtements Vinci, un peu de nourriture, un ordinateur et un coffre-fort rempli de clés, en s’introduisant pas effraction dans un local administratif de Vinci Autoroutes.
Vers 1 h du matin quand ils s’approchent du local, parce qu’ils y ont aperçu une machine à café, ils déclenchent l’alarme. Ils patientent alors une demi-heure et comme les forces de police n’interviennent pas (les gendarmes ne « reprennent » le péage que le lendemain le 21 novembre) ils entrent par effraction, en brisant une vitre.
La section de recherche de la gendarmerie a retrouvé l’ADN de Jordan Sanchez, déjà connu des services de police, sur plusieurs objets dont une sangle qui a servi à briser la vitre du local. « Son portable a aussi borné à Virsac ce soir-là », précise Clémentine Chovin, la présidente du tribunal. Il a été interpellé le 4 décembre puis placé en garde à vue et, ses deux complices sont arrêtés le lendemain. S’ils avaient l’intention de revendre les outils pour se faire un peu d’argent, les voleurs ont finalement pris peur et jeté leur butin dans la Garonne.
Un « effet de masse »
A la barre, les prévenus ont l’air d’avoir été un peu dépassés par les événements. « Je regrette ce qui s’est passé, cela n’aurait pas dû aller aussi loin », affirme Jordan Sanchez, qui travaille dans le bâtiment et avait participé pacifiquement aux rassemblements des « gilets jaunes » les premiers jours. « Je veux juste dire que je n’ai rien contre Vinci, je suis même client chez eux », relève Thomas Belaud, intérimaire. « Je me suis rendu compte que j’avais fait une connerie, a expliqué aux enquêteurs Clément Bernard, jardinier paysagiste venu sur le site par curiosité pour ce mouvement. C’était l’adrénaline, l’alcool et l’effet de masse ».
L’effet d’entraînement du groupe a été au centre des débats. « Ils ont agi dans un spasme de bêtise, suggestionnés par une foule plus forte qu’eux », plaide maître Alexandre Novion, avocat de Jordan Sanchez. La procureure de la République Sylvie Guedes, qui demandait 18 mois de prison pour Jordan Sanchez, estime que « grisés par l’ambiance », ils ont « lâchement profité de la situation pour piller les locaux ».
« C’est une affaire dans laquelle on manquait de coupables, alors on en a un avec un casier judiciaire donc à travers cela, on a pu projeter une culpabilité à ras bord et lui attribuer un rôle actif voire un rôle de meneur, un meneur qu’il n’est pas, a réagi maître Alexandre Novion à l’annonce du délibéré. C’est une décision d’une très grande sévérité ». Son client qu’il qualifie de « voleur de pacotilles », au regard des biens de peu de valeur qu’il a dérobé, l’a fait selon lui sous la pression de la masse et du contexte brûlant, qui n’a pas été assez pris en compte lors de l’audience. Il réfléchit à former un appel.