PROCESUne fausse victime présumée des attentats du 13-Novembre jugée en juillet

Elle voulait être l'emblème des attentats du 13-Novembre, une fausse victime présumée jugée en juillet

PROCESLa jeune femme expliquait avoir pris une rafale de kalachnikov dans le coude, qui lui avait laissé une cicatrice de six centimètres après le «retrait de la balle» en janvier 2016...
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Couronne de fleurs sur la tête, elle s'était fait la porte-parole des «terrasses» du 13-Novembre: Alexandra D., fausse victime présumée des attentats, a fait mercredi une brève apparition au tribunal qui a renvoyé en juillet son procès pour escroquerie et faux témoignage.

Peu après les attaques djihadistes de novembre 2015, la jeune femme de 32 ans avait déclaré se trouver sur la terrasse du Carillon, l'un des deux premiers bars touchés par des fusillades, avec deux amis qui avaient, selon ses dires, trouvé la mort. Elle expliquait avoir pris une rafale de kalachnikov dans le coude, qui lui avait laissé une cicatrice de six centimètres après le «retrait de la balle» en janvier 2016, photos à l'appui postées sur les réseaux sociaux.

Mais des incohérences dans son récit avaient éveillé l'attention et conduit à l'ouverture en janvier dernier d'une enquête du parquet de Paris, qui a ordonné son renvoi en correctionnelle pour escroquerie et faux témoignage.

Soupçons d'escroquerie à hauteur de 20.000 euros

Elle est notamment soupçonnée d'avoir escroqué le Fonds de garantie des victimes de terrorisme et autres infractions pénales (FGTI) à hauteur de 20.000 euros entre janvier 2016 et mai 2017. La trentenaire était en effet inscrite sur la Liste unique des victimes (LUV), établie par le parquet, ce qui lui avait ouvert des droits à l'indemnisation.

Sweat gris, jean et cheveux de jais, la trentenaire a fait mercredi une brève apparition devant le tribunal correctionnel de Paris à l'issue de sa garde à vue pour demander un renvoi afin de préparer sa défense.

Aux questions du président, la prévenue a acquiescé avec déférence avant de s'offusquer qu'un interprète lui bloque l'accès au micro : «Je veux bien parler mais... !», a-t-elle lancé.

Elle repart libre, sous contrôle judiciaire, avec notamment une obligation de soins psychiatriques et sera jugée le 19 juillet.

«Escroquerie scandaleuse»

Alexandra D avait fait tatouer la devise de Paris, «Fluctuat nec mergitur», «tout près de sa cicatrice», en signe de résilience selon elle. Elle se prêtait volontiers à l'exercice des séances photos, comme avec l'AFP, aimait rencontrer les officiels lors des cérémonies, où elle était facilement identifiable avec sa couronne fleurie, et faisait de multiples références à sa «blessure» sur les réseaux sociaux.

Mais sur des vidéos tournées par des médias étrangers le 14 novembre 2015 et dans plusieurs articles de presse, la jeune femme avait expliqué qu'elle était une habituée du Carillon, mais qu'elle n'y était pas le soir des attentats. On la voyait alors, les yeux rougis, témoigner face caméra devant la vitrine criblée de balles du Carillon, sans porter la moindre trace de ses blessures supposées.

Très investie dans l'association de victimes Life for Paris, dont elle était membre, Alexandra D. avait été interviewée et photographiée par l'AFP à l'été 2017 dans le cadre d'un article sur les victimes ayant eu recours au tatouage comme «thérapie».

En novembre 2017, l'AFP avait recontacté la jeune femme pour la questionner sur les interviews accordées le 14 novembre 2015 devant le Carillon. Alexandra D. avait argué qu'elle avait préféré cacher son «statut de victime» parce qu'elle venait de sortir de l'hôpital, et qu'elle ne voulait pas ce jour-là «être embêtée, gênée, dérangée, car les médias rôdaient».

Un sujet complexe

Life for Paris, qui dit avoir «fait remonter ses doutes au parquet et demandé l'ouverture d'une enquête», s'est félicitée mercredi de «l'arrestation d'une nouvelle fausse victime», dénonçant une «escroquerie scandaleuse pour les vraies victimes et leurs proches».

Une quinzaine de personnes ont déjà été condamnées pour tentative d'escroquerie ou escroqueries liées aux attentats de 2015. La dernière en date concerne une femme qui s'était fait passer pour une victime du Bataclan, condamnée en mars à quatre ans et demi de prison.

«Les fausses victimes constituent (...) un sujet complexe pour les équipes du FGTI, en proie à un impératif contradictoire: concilier l'accueil bienveillant des victimes d'actes de terrorisme en facilitant, notamment, leur démarche avec l'examen, nécessairement strict, des preuves de leurs préjudices», a réagi le Fonds de garantie mercredi dans un communiqué.

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