Entraunes: Ce que l'on sait sur l'avalanche qui a tué quatre randonneurs
MONTAGNE•Le procureur de la République de Nice a fait un point sur l’enquête…Mathilde Frénois
L'essentiel
- Vendredi après-midi, six personnes ont été emportées par une coulée de neige, seulement deux d’entre elles ont survécu.
- Le guide a été placé 24 heures en garde à vue pour être entendu.
Deux avalanches successives, à quelques secondes d’intervalle. Vendredi après-midi sur la commune d’Entraunes (Alpes-Maritimes), un groupe de cinq skieurs en télémark et leur guide ont été balayés par une coulée de neige. Quatre d’entre eux sont décédés, le guide de haute montagne et l’une de ses clientes ont survécu. Trois jours après cette double avalanche, le guide et sa cliente ont été entendus par les enquêteurs.
Quel a été le comportement du guide de haute montagne ?
Placé en garde à vue, le guide a pu raconter le déroulé de sa journée. Après avoir préparé sa sortie, il s’est engagé sur les pans de la commune d’Entraunes. Une première avalanche a alors balayé la totalité de ses clients. « Il était parti un peu en avance pour apprécier la dangerosité du passage, précise le procureur de la République de Nice Jean-Michel Prêtre. Quand il a entendu un gros bruit, il est revenu sur ses pas et il s’est trouvé balayer par une seconde coulée venue d’un autre endroit. » Le guide nage quand la neige bouge encore, met ses mains devant son visage pour garder une poche d’air et passe 3/4 d’heure à se dégager. Puis il part « sauver » l’une de ses clientes, la seule à ne pas avoir le visage enfoui dans la neige. Ensuite, « il a trouvé les personnes qui étaient entièrement équipées par les appareillages pour les randonneurs alpins. Cela a été très rapide. Il a constaté que toutes les personnes ensevelies étaient immobiles donc décédées. » Mettant sa cliente survivante sous protection, il est redescendu pour donner l’alerte aux secours.
Quelle était la qualité de la neige au moment de l’avalanche ?
Le procureur de la République de Nice a fait appel à un expert en nivologie. « Il s’agit d’effectuer une analyse du manteau neigeux. Il était essentiellement constitué de 60 cm de poudreuse toute fraîche avec, à certains endroits, des accumulations qui étaient du double », précise Jean-Michel Prêtre. Selon le magistrat, il ne s’agissait pas de « ces avalanches que l’on connaît au printemps » avec des densités différentes de neige où la couche du dessus se tasse et glisse « sur la couche du dessous comme une luge ». C’est une avalanche de neige fraîchement tombée.
Quels sont les autres éléments d’enquête lancés ?
« La nivologie, c’est urgent », a insisté Jean-Michel Prêtre. Parce qu’il faut que l’expert puisse intervenir avant que la neige ne change. Les enquêteurs vont aussi retracer le parcours avec la géolocalisation téléphonique et analyser la météo. Ce jour-là, le risque avalanche était de 4 sur une échelle de 5. Au niveau des victimes, toutes les investigations sont terminées. Aucune autopsie n'a été pratiquée, uniquement des examens de corps. « L’objectif est de rechercher si, par hasard, il n’y aurait pas une autre cause de la mort que l’asphyxie dans la neige, pointe encore le procureur. Il n’a pas été découvert de choses particulières. Ils sont bien décédés à la suite de leur immersion dans la neige. »
Une information judiciaire sera-t-elle ouverte ?
Certainement dans les prochains jours. Fallait-il partir en randonnée ou pas ? À la justice de trancher. « Ce dossier de décès en montagne avec un guide est déterminant pour la crédibilité du système (de guide de haute montagne) tel qu’il existe aujourd’hui », estime le procureur.