Anshu Jamsenpa: La première femme à avoir gravi l’Everest 2 fois en 5 jours
EXPLOIT•Alpiniste indienne, Anshu Jamsenpa est devenue cette année la première femme de l’Histoire à avoir gravi l’Everest deux fois en cinq jours…Marie Lombard
Sky is the limit. Anshu Jamsenpa, une Indienne de 38 ans, a battu cette année un éprouvant double record : elle a gravi l’Everest non pas une, mais deux fois, et ce en moins d’une semaine. Reconnue aujourd’hui comme la première femme à avoir atteint le toit du monde à deux reprises en cinq jours, l’alpiniste a planté ses bâtons au sommet de l’Everest le 16 mai et le 21 mai 2017.
Son voyage a commencé le 2 avril 2017, après avoir reçu la bénédiction du 14e Dalaï-Lama. Anshu a quitté Guwahati, au nord de l’Inde, accompagnée d’une solide équipe d’alpinistes, pour planter sa tente au camp de base népalais de l’Everest, situé à 5.364 mètres d’altitude. Elle et ses compagnons sont restés 38 jours dans ce camp, afin de s’acclimater aux conditions rudes de la montagne, puis ont effectué leur ascension vers le sommet le 16, avant de redescendre vers le camp de base de l’Everest. Camp de base qu’Anshu a de nouveau quitté le 19, pour atteindre le sommet une seconde fois le 21, et y planter le drapeau indien, à 8.848 mètres d’altitude.
« J’ai commencé et je n’ai jamais regretté »
Si son exploit reste inégalé, Anshu Jamsenpa n’en était pas à sa première ascension de l’Everest. Née dans le nord montagneux de l’Inde, dans la région d’Arunachal Pradesh, la courageuse alpiniste a commencé à grimper à 21 ans, suite à son mariage avec le gérant d’une agence de voyages qui organise des treks dans le nord-est de l’Inde et au Bhoutan. Salariée dans l’entreprise de son époux, avec qui elle a eu deux filles, la jeune femme a entrepris d’emmener ses clients pour des randonnées autour de l’Himalaya… et est tombée sous le charme de la montagne.
Durant une expédition, un client lui a soudain suggéré de devenir alpiniste professionnel. « Il m’a dit : "tu as le courage, et ta forme physique est très bonne pourquoi ne deviens-tu pas professionnelle ?", rapporte-elle à CNN, Après ça, je me suis immédiatement inscrite à un cours avancé. Et une fois que j’ai commencé, je n’ai jamais regardé en arrière. »
5 ascensions à son compteur
A partir de 2009, avec le projet de grimper le Mont Everest, Anshu s’est entraînée pendant deux ans à « la course, la gymnastique, le yoga, l’aérobic et la randonnée ». Sa préparation s’est achevée en 2011, lorsque, accompagnée de 9 autres grimpeurs, l’Indienne s’est lancée à l’assaut du Mont Everest. Elle a renouvelé ce périple la même année, quelques mois plus tard.
En 2013, malgré une volonté de fer, Anshu n’a pas été autorisée par le gouvernement népalais à monter deux fois au sommet. En 2014, une avalanche mortelle a mis fin à la saison des ascensions et en 2015, c’est le séisme de magnitude 7.9 sur l’échelle de Richter survenu au Népal qui a entraîné la fermeture du site, gravement touché.
a« Quand je me suis retournée, il était déjà mort »
Cette année, Anshu Jamsenpa a donc saisi sa chance, mais les ascensions n’ont pas été de tout repos. « Durant mon second sommet cette année, j’ai vu quelqu’un qui était en train de mourir, son groupe était dans une position critique » raconte-elle.
Elle a alors demandé à son sherpa ce qui pouvait être fait pour l’aider « mais quand [elle s’est] retournée, il était déjà mort ». De plus « le temps était vraiment mauvais (…) et il y avait beaucoup de monde ». Si la grimpeuse déclare n’avoir pas souffert durant ses montées, « [elle] sent la douleur maintenant (…) dans sa jambe droite, ses genoux et ses chevilles ».
« Pourquoi autorises-tu ta femme à y aller ? »
Et les éléments n’ont pas été le seul obstacle que Anshu Jamsenpa a dû affronter au cours de sa carrière. Certains « me disent : "Pourquoi gaspilles-tu de l’argent, du temps et de l’énergie" », raconte-elle à CNN, « ils disent à mon mari : "pourquoi autorises-tu ta femme à y aller, elle pourrait te quitter !" ». Car si plus de 489 femmes ont escaladé le mont Everest à ce jour, l’alpinisme reste un milieu très masculin et les préjugés sexistes mènent la vie dure à celles qui osent s’aventurer sur les arêtes rocheuses du « toit du monde ».
D’heureuse nature, l’aventurière pense cependant inspirer plus de gens qu’elle n’en révolte. « Plein de gens viennent me voir et me disent "tu nous as inspirés. Comment y allons-nous ?" Ils demandent des conseils, pour l’alpinisme mais dans d’autres domaines aussi (…) mes filles savent ce que je fais. Et elles sont très contentes et fières. Je leur dis : "si quelque chose m’arrive, vous devriez être contentes". A côté du Mont Everest, la mort lui semble bien petite.