D’ici moins de dix ans, un scientifique veut faire renaître les mammouths
GENETIQUE•Georges Church, biologiste moléculaire à Harvard, entend s’appuyer pour cela sur un outil permettant de modifier les gènes de cellule animale et sur une espèce : les éléphants d’Asie…Fabrice Pouliquen
Le docteur Georges Church, biologiste moléculaire à Harvard, a un projet ambitieux en tête. Faire renaître, d’ici sept ans à dix ans, le mammouth laineux, une espèce disparue il y a environ 4.000 ans. Pour y parvenir, le chercheur entend s’appuyer sur un nouvel outil prometteur : le CRISPR-Cas9, une nouvelle méthode de réécriture de l’ADN qui permet de réduire considérablement les coûts et de modifier les gènes de n’importe quelle cellule à volonté.
Un peu comme dans Jurassic Park
La démarche n’est pas si éloignée de celle décrite dans le dernier opus de Jurassic Park, raconte Le Huffington Post qui a interviewé Georges Church. Il s’agirait tout d’abord de récupérer de l’ADN sur les restes congelés d’un mammouth laineux. Ils épisseraient ensuite cet ADN dans le génome d’un éléphant d’Asie. Pourquoi cet animal ? Selon le Dr Church, les deux espèces sont tellement proches qu’elles pourraient se reproduire entre elles si les mammouths existaient encore.
Une fois l’ADN de l’éléphant d’Asie modifié pour le rapprocher de celui de leurs cousins d’autrefois, les éléphants d’Asie seraient alors en capacité de donner le jour à un hybride de mammouth laineux, plus gros et plus poilu, précise le Huffington Post. Quand on l’interroge sur le nom qu’il faudrait donner à cette nouvelle espèce, le Dr Church aime à parler d’éléphants d’Asie résistant au froid.
« D’ici sept à dix ans »
Le travail a déjà commencé. Une tentative d’épissage génétique a déjà eu lieu et un groupe de scientifiques internationaux a déjà publié un article présentant leur travail de séquençage de tout le génome du mammouth laineux. Une feuille de route pour rapprocher les chromosomes de l’éléphant d’Asie de ceux du mammouth. « Je dirais qu’il nous faudra sûrement cinq ans pour mettre au point toute la partie développement de l’embryon, puis au moins deux ans pour procéder à une gestation complète, explique Georges Church. La première naissance pourrait donc avoir lieu d’ici sept à dix ans. Ce n’est pas loin du tout. »
Restaurer des écosystèmes
Le scientifique espère ainsi repeupler de mammouths les immenses étendues de la Toundra et des forêts boréales d’Eurasie et d’Amérique du Nord. « Tout cela aurait un effet positif sur l’environnement, estime le Dr Church. Cela contribuerait à restaurer des écosystèmes riches, reposant sur l’herbe et les mammouths laineux, en lieu et place des écosystèmes actuels, basés sur les arbres et la mousse, que de nombreux écologistes trouvent bien plus pauvres. »
Le projet n’enchante pas tout le monde, indique le Huffington Post. Stuart Pimm, professeur d’écologie de conservation à l’université Duke, l’a qualifié de « fantaisie moléculaire » dans un éditorial pour le National Geographic.