Elections législatives 2024 : Peut-on faire confiance à « Plan Procu », la plateforme qui fait matcher les citoyens ?
Vote•Depuis l’annonce de législatives anticipées, dimanche soir, le site connaît une grande popularité. Mais certains craignent la mise en relation avec un électeur malveillant. « La procuration repose toujours sur la confiance », défend l’ONG « A voté »Lina Fourneau
L'essentiel
- Déjà investie contre la mal inscription depuis 2021, l’ONG « A voté » a créé cette année « Plan Procu » pour mettre en relation des électeurs ayant besoin d’une procuration avec des citoyens prêts à voter à leur place afin de faciliter l’accès aux urnes.
- Dorian Dreuil, coprésident de « A voté », souligne que le système repose sur la confiance, comme pour toute procuration, et que l’opinion politique n’est pas demandée lors de l’inscription.
- Certains internautes s’interrogent sur les risques de ce système, mais Dorian Dreuil rappelle que l’électeur qui donne sa procuration garde la main pour la signer et la déposer au commissariat.
En annonçant dimanche soir, la dissolution de l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron a pris tout le monde de court. Les députés, les partis de l’opposition, mais aussi les amateurs d’escapade estivale dont les week-ends du 30 juin et du 7 juillet étaient déjà bien remplis. Pas de quoi rajouter au programme un retour aux urnes pour des législatives anticipées. Il faudra pourtant s’y faire et reposer sur la dernière solution possible : la procuration. Une solution souvent balayée par des excuses de type « je n’ai pas trouvé quelqu’un autour de chez moi pour voter à ma place » ou « je n’ai pas eu le temps d’aller au commissariat ».
Pour éviter toutes ces mauvaises excuses, l’ONG « A voté » – déjà engagée depuis 2021 contre la mal inscription sur les listes électorales – a créé « Plan Procu » pour mettre en lien des électeurs dans le besoin. Rien de sentimental ici, que de la logistique. Prenons ce citoyen fictif, Michel, 57 ans qui est absent le week-end du premier tour dans sa circonscription du 19e arrondissement de Paris et cherche quelqu’un pour glisser son bulletin de vote dans l’urne. (Encore une fois, on parle de vote). Il pourra grâce à cette plateforme trouver quelqu’un pour voter à sa place. « C’est la première plateforme de procuration citoyenne, se réjouit Dorian Dreuil, le coprésident de l’ONG. Tout bêtement, on a repris la même technologique qu’utilisent les partis politiques pour mettre en relation leurs adhérents, sauf que c’est promu ici par une organisation non gouvernementale indépendante et apartisane ».
Des plans procu dans ta région
Si l’initiative était déjà présente pour les élections européennes, l’annonce soudaine de législatives donne un nouveau souffle à la plateforme. « Dimanche soir, on a arrêté la plateforme à 20 heures. On pensait être en vacances et patatras… On a finalement décidé de réactiver le site dans la nuit », résume Dorian Dreuil. Depuis, la plateforme connaît une forte affluence. « On a reçu des connexions parfois deux fois supérieures aux dernières semaines et des centaines et centaines de messages sur les réseaux sociaux. On a ressenti à la fois l’envie de s’engager et de voter malgré les impératifs ».
Mais a-t-on réellement envie de faire confiance à un inconnu qui pourrait, par malveillance ou par choix politique, glisser le mauvais bulletin dans l’enveloppe ? Sur les réseaux sociaux, certains redoutent cette nouvelle forme de vote. « Faire une procuration c’est un chèque en blanc », craint un internaute sur X. « La procuration repose toujours sur la confiance, tranche Dorian Dreuil. Il y a toujours eu cet enjeu, que ça soit avec nos grands-parents ou avec nos amis ».
« L’intimité de chacun »
A l’inscription, l’opinion politique, elle, n’est pas demandée. « Nous, ce qui nous importe c’est que les gens aient accès à la démocratie. Le choix du vote, c’est de l’intimité de chacun ». Il est toutefois possible de rajouter une mention supplémentaire pour donner un indice sur le bord politique. « Ça été beaucoup utilisé pour dire "je suis à mobilité réduite", quelqu’un dans mon immeuble c’est mieux. D’autres disent "je ne veux surtout pas de ce parti-là". C’est une donnée qu’on prend en compte pour favoriser les matchs. »
Une fois la mise en relation établie en deux électeurs, les deux sont invités à échanger. En cas de doute, l’électeur qui donne sa procuration – ou celui qui la reçoit – peut se rétracter et recommencer la démarche. « Dans tous les cas, celui qui donne sa procuration a la main pour signer et aller la déposer au commissariat », souligne Dorian Dreuil qui rappelle la présence du site des partis politiques en cas de besoin.
En effet, de nombreux partis proposent également de mettre en relation des militants pour leur procuration. Chez la France Insoumise, par exemple, la plateforme Action populaire propose à ses militants de se porter volontaire pour prendre la procuration d’un tiers. Mais ici aussi la confiance reste le maître mot. « Je me demande ce qui empêche aux fachos de pipeauter les procurations des gauchistes », s’interroge un internaute sur X. Mais que la personne soit un proche, un autre militant ou un inconnu, l’idée même de la procuration reste la même. Tout ce qui se passe dans l’isoloir reste dans l’isoloir.
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