TELECHARGEMENTMegaupload: Cinq choses à savoir pour comprendre l'affaire

Megaupload: Cinq choses à savoir pour comprendre l'affaire

TELECHARGEMENTJeudi, la justice américaine a fermé le site d'hébergement de fichiers le plus connu au monde. «20 Minutes» revient sur le fonctionnement de Megaupload et fait le point sur la situation...
Anaëlle Grondin

Anaëlle Grondin

C’est quoi Megaupload?
Le site Megaupload.com permettait aux internautes d’héberger des fichiers pour les partager sur Internet. Une fois le fichier «uploadé» par un utilisateur, c'est-à-dire mis en ligne sur les serveurs du site, il était possible de le télécharger en cliquant sur un lien. N’importe qui pouvait alors l’obtenir s’il disposait de l’URL. Il pouvait s’agir de documents personnels ou de photos de vacances que l’on souhaitait partager avec ses amis, par exemple. Mais dans les faits, beaucoup d’utilisateurs s’en servaient pour y stocker et télécharger des milliers de films, séries, morceaux de musique, logiciels… Des fichiers mis en ligne illégalement. Depuis sa création en 2005, la plateforme n’a jamais fait le tri entre fichiers légaux et illégaux stockés par ses utilisateurs.
Megaupload.com était financé de plusieurs manières. D’abord, la publicité en ligne. Ensuite, la plateforme proposait aux internautes de souscrire à une version «Premium», qui permettait de télécharger les fichiers plus rapidement et de manière illimitée. Les abonnements oscillaient entre 9,99 euros par mois et 79,99 euros pour deux ans. Un abonnement à vie était également proposé pour 199 euros.
Megaupload faisait partie des sites Internet les plus visités au monde. Avant d’être fermé par la justice américaine, le site, dont le siège se trouve à Hong Kong, enregistrait 50 millions de visites uniques quotidiennes. (Voir notre article: Megaupload en dix chiffres) Ce type de téléchargement, dit «direct», tend à supplanter le «peer-to-peer», étroitement surveillé par la Hadopi en France.

Pourquoi Megaupload est-il fermé?
Aucun site n’a le droit de mettre à disposition des internautes des fichiers dont il ne possède pas les droits. Le FBI estime que Megaupload porte atteinte aux droits d’auteurs et la plateforme a été qualifiée d’«entreprise criminelle internationale organisée» par la justice américaine. D’après l’acte d’accusation mis en ligne ici, le manque à gagner pour les ayants droit est estimé à 500 millions de dollars alors que Megaupload aurait engrangé plus de 175 millions de dollars depuis 2005 grâce à la publicité et aux abonnements premium. En outre, Megaupload ne s’est pas contenté de laisser en ligne des fichiers illégaux, mais a sciemment tiré parti du piratage, selon la justice américaine. En se procurant les e-mails échangés entre les dirigeants du site, les enquêteurs ont montré qu’un système de récompenses avait été mis en place: les utilisateurs qui «uploadaient» les contenus les plus populaires pour que les internautes puissent les télécharger recevaient une somme d’argent, alors même que la plupart de ces fichiers étaient illégaux. Aujourd’hui, 17 autres sites appartenant à Megaupload sont fermés, parmi eux Megavideo.com et Megaporn.com.

Qui a été arrêté par le FBI et que risquent ces personnes?
Pour l’heure, sept personnes et deux sociétés (Megaupload Limited et Vestor Limited) ont été inculpées aux Etats-Unis des crimes suivants: «conspiration de racket», «conspiration de violation de copyright» et «conspiration de blanchiment d’argent». Quatre dirigeants du site, dont son fondateur Kim Schmitz (connu sous le pseudonyme de Kim Dotcom), ont été arrêtés en Nouvelle-Zélande jeudi. La justice du pays a indiqué que la procédure d’extradition vers les Etats-Unis était en route. Pendant ce temps, les autres dirigeants mis en cause sont encore dans la nature. Tous risquent jusqu’à 20 ans de prison.

La première vidéo de Kim Schmitz devant le tribunal néo-zélandais:



Pourquoi la fermeture de Megaupload pose problème?
Depuis que la plateforme est indisponible, la colère gronde sur les réseaux sociaux. Les internautes se plaignent surtout de ne plus pouvoir regarder des films ou séries américaines gratuitement (même s’il existe d’autres sites de «direct download», un peu moins connus, certes). Mais il y a aussi ceux qui se servaient du site comme un «cloud» pour stocker leurs documents personnels. Une montagne de données s’est évaporée. «J’utilisais Megaupload pour stocker toutes les démos musicales de mon groupe, j’ai tout perdu», témoigne un lecteur de 20 Minutes. Il n’est pas le seul à se retrouver dans cette situation aujourd’hui. Tant que le site sera indisponible, il sera difficile de pouvoir récupérer ses fichiers. Surtout que les serveurs ont été saisis par les enquêteurs. Cela signifie que Megaupload ne peut plus rien faire pour ses utilisateurs.

Comment cela va-t-il se passer pour les internautes qui avaient payé pour un abonnement?
Ceux qui ont déboursé plusieurs dizaines d’euros ou avaient payé pour un abonnement à vie à 199 euros sont aujourd’hui dans le doute. Quels recours ont-ils? Impossible de savoir aujourd’hui vers qui se tourner, puisque les principaux dirigeants du site sont en prison, et qu’en outre, le siège de Megaupload se trouvait à Hong Kong… Par ailleurs, ceux qui ont utilisé la plateforme pour accéder à des contenus illégaux oseront-ils exiger un remboursement? A moins que le site ne refasse surface dans quelques mois (ce qui semble a priori peu probable vu l’acte d’accusation), il y a de quoi avoir des doutes concernant un éventuel remboursement des sommes envoyées via PayPal. En outre, les très gros partageurs de fichiers devraient être inquiétés, estime Etienne Wéry. Cet avocat au barreau de Paris spécialisé dans les nouvelles technologies a expliqué au Figaro: «Ils seront retrouvés via toutes les petites traces informatiques que l'on sème comme le petit poucet lorsqu'on navigue sur Internet.» Contacté par 20 Minutes, Mathieu Prud’hommes, avocat spécialisé en droit des nouvelles technologies au cabinet Alain Bensoussan, appuie les propos de son confrère: «Mettre à disposition des fichiers illégaux est considéré comme de la contrefaçon en France. En matière de cybercriminalité, il y a des accords internationaux, et donc des échanges entre les services d’enquête. Ceux qui partagent ce type de contenu ne sont donc pas à l’abri de poursuites en France».