SnowTigers: entre 40 à 50 téras-octets de données saisies en France et à l’étranger
P2P•Dix personnes ont été arrêtées, l'enquête du Parquet est en cours...Philippe Berry, à Los Angeles, avec OR
L'affaire fait grand bruit dans le milieu underground du téléchargement (illégal) français. Le site Zataz révélait la semaine dernière que l'Association de Lutte Contre la Piraterie Audiovisuelle (ALPA), avec l'aide de la gendarmerie nationale, avait porté un coup fatal à SnowTigers, l'un des plus grand trackers bittorent privé français. Le raid a depuis été confirmé par les deux partis. Dix personnes, principalement des administrateurs du site, ont été arrêtées, et entre 40 à 50 téras-octets de données saisis a précisé la gendarmerie, jointe par téléphone ce mercredi. Les données ont été saisies à la fois sur le territoire français et à l’étranger.
Mais de quoi parle-t-on exactement?
SnowTigers, pour faire simple, est une sorte d'équivalent français à ThePirateBay –le site suédois dont le procès a fait la une des médias en avril dernier. Principale différence, SnowTigers est un tracker privé, accessible sur invitation uniquement. Un peu de vocabulaire pour les non initiés: bittorrent, c'est le protocole peer-to-peer le plus populaire sur la toile, massivement utilisé pour télécharger des contenus souvent illégaux (films, séries, jeux, logiciels etc.). Un tracker est un serveur, une sorte d'aiguilleur qui coordonne les échanges entre les clients (ceux qui téléchargent). Il s'accompagne d'un site internet qui fait office d'annuaire de torrents, des fichiers qui contiennent notamment des informations sur le tracker. Subtilité, ni le tracker ni le site n'hébergent directement les contenus illégaux. Certains trackers sont publics, d'autres privés. Ces derniers promettent souvent un service plus rapide, plus anonyme et proposent parfois des services VIP en échanges de dons.
«Confiance aux militaires»
Au 1er juin,SnowTigers comptait 143.000 membres actifs. Plusieurs informations contradictoires circulent. D'un côté, une source de la gendarmerie confie à Zataz que «des stockages amovibles ont été saisis. Certains contenaient plusieurs sauvegardes SQL» (de base de données, ndr). De l'autre, le blogueur Korben le jure: «Si vous êtes membres, vous ne risquez rien». Contacté par 20minutes.fr, il confirme qu’une source anonyme «proche des administrateurs de SnowTigers» lui a indiqué qu'il n'y avait «rien de sensible. Les bases de données sont à l’étranger, et même si l’Alpa fait un jour une demande pour avoir accès à ces serveur, ça fait plusieurs jours qu’il n’y a plus RIEN sur ces serveurs. Tout a été formaté.»
Contacté par 20minutes.fr, Frédéric Delacroix, délégué général de l'ALPA, offre un son de cloche très différent. Il est très affirmatif quand il dit «faire totalement confiance aux militaires pour avoir pris tous les éléments utiles à l'enquête». Une affirmation qui semble confirmée par l'interview d'un hacker réalisée par Zataz. Il explique avoir piraté et récupéré une partie de la base de données de SnowTigers, qui contenait bien les adresses IP des utilisateurs –l'adresse de certains VIP n'était cependant apparemment pas conservée. Sans même parler de coopération internationale de la justice, rien n'exclut cependant que des sauvegardes à distance n'aient été stockées sur les serveurs français.
«Après, il faudra voir la direction que prendra l'instruction: s'attaquer uniquement aux administrateurs ou également aux utilisateurs», poursuit Frédéric Delacroix. Qui insiste: «Snowtigers est un réseau délinquant organisé à caractère international. Il faut vraiment être naïf pour penser qu'un tel site est géré par de gentils passionnés. C'est une entreprise lucrative». Selon lui, «avec 250.000 membres, même si un faible pourcentage fait un don de 10 ou 15 euros, les sommes dépassent» largement le simple coût d'entretien des serveurs.
Un coup d’arrêt aux bittorrent ?
Même si beaucoup estiment que la fermeture d’un tracker entraînera l’ouverture d’un autre, sur son blog, Papy Geek s’interroge sur l’avenir du bitTorrent en France, face aux actions de la justice française. «Pour fonctionner, le tracker aura forcément besoin d’une adresse Web et d’un hébergement, et même si c’est fastidieux, il sera toujours possible de remonter jusqu’à celui-ci, les gendarmes spécialisés n’étant pas forcément plus idiots que les autres.»