«Sincèrement, pouvoir courir, ça a changé ma vie. » Ces mots sont ceux de Christophe Debard, fondateur du Humanity Lab, le laboratoire d’innovations d’Airbus. « Je n’avais jamais pu courir de ma vie, continue cet ingénieur. J’ai été amputé à l’âge de 13 ans après un cancer et depuis j’ai dû faire une croix sur la course par manque d’argent et de solutions adaptées. » Une croix jusqu’à ce que Jérôme Bernard, sportif poly-amputé et Benjamin Trarieux ingénieur à Airbus lui proposent de se lancer dans un projet un peu fou : fabriquer des lames de courses à partir de chute de carbone d’avions.

Pour mener à bien cette demande, il est parti rencontrer l'École nationale supérieure des Mines d'Albi-Carmaux (IMT Mines Albi). Là, trois étudiants et trois étudiantes ont répondu à l’appel. En 2019, ils se lancent dans un projet 100 % made in France. Deux ans plus tard, la petite équipe est sur le point de commercialiser une lame de course plus légère et moins chère que celles présentes sur le marché.

Des tests prometteurs

« Nous avons réussi à trouver plusieurs partenaires pour réduire au minimum les coûts, avec l’espoir de commercialiser cette lame en 2022 à moins de 2.000 € », soit la moitié de ce qui se fait sur le marché, ajoute Hugo Roche, président de la jeune entreprise Hopper et l’un des deux salariés.

Pour ceux qui l’ont essayé, le résultat est prometteur. Sarah, 26 ans, est l’une des douze testeuses de cette lame. A chaque exercice physique, elle note le nombre de kilomètres parcourus, dans quelles conditions et comment se comporte la lame. Une façon pour Sarah de regagner en mobilité après son accident de voiture l’an passé.

« J’ai gravi un sommet des Alpes avec cette lame, souligne-t-elle. C’était très émouvant comme moment. Elle restitue bien l’énergie, accroche bien au sol et elle me permet de reprendre la course à pied, ce qui est inespéré pour moi. »

« Les lames de course actuelles sont plus tournées vers la pratique sportive intensive, continue-t-elle, et coûtent plus de 4.000 €. » Ce que beaucoup ne peuvent débourser. « J’ai deux prothèses remboursées par la Sécurité sociale, pour marcher, mais pas de lame pour la course », explique Sarah. Avec ce projet, les ingénieurs espèrent maintenant rendre le sport un peu plus accessible à tous. Une belle manière de mettre son savoir au service du bien commun.