RESEAUX SOCIAUXLes faux avis de recherche, nouvelle technique pour espionner en ligne ?

Les faux avis de recherche sur le Net, nouvelle technique pour localiser ou « stalker » des personnes ?

RESEAUX SOCIAUXUne nouvelle « technique » pour localiser ou espionner des personnes semble se développer sur les réseaux sociaux
Hakima Bounemoura

Hakima Bounemoura

L'essentiel

  • De nombreux messages publiés par des internautes alertent sur une nouvelle technique mise en place par des gens malintentionnés pour localiser ou « stalker » des personnes.
  • « Je suis tombée sur un avis de recherche avec une photo de moi (…) Un homme se faisant passer pour mon père expliquait que j’avais fugué », raconte Cindy*, étudiante en licence.
  • « Il faut arrêter de retweeter des avis de recherche ne provenant pas des forces de l’ordre », explique l’association Enfants disparus.
  • Pour la plateforme cybermalveillance.gouv.fr, ces pratiques relèvent du cyberharcèlement. Elle incite les victimes de ces actes malveillants à effectuer un signalement sur Pharos et à aller porter plainte.

Une nouvelle technique pour localiser ou espionner des personnes semble se développer sur les réseaux sociaux… Ces dernières semaines, de nombreux internautes, et plus spécialement des jeunes filles, se sont plaints de la publication de faux avis de recherche les concernant, postés par des personnes malintentionnées afin de les localiser physiquement ou de les «stalker» [traquer ou espionner en ligne].

Cette « technique » consiste à poster un message avec la photo de la personne ciblée sur les réseaux sociaux en déclarant être un proche en quête d’informations à la suite d’une soi-disant disparition et en faisant appel à la solidarité des internautes. La plupart du temps, il s’agit d’une photographie volée, prise dans la rue ou en soirée, ou bien simplement sur le profil de la personne si les paramètres de confidentialité ne sont pas assez sécurisés.

« C’est du cyberharcèlement, et pas une nouvelle technique pour draguer »

« Ma copine était en soirée ce soir. Elle pense qu’un mec l’a prise en photo en douce à un moment. Il a juste à poster la photo sur Twitter avec un message "On n’a plus de nouvelles de ma sœur depuis 8 jours", et en deux heures il peut savoir où elle habite », a tweeté il y a quelques jours Julien*, un étudiant d’une vingtaine d’années. Son message a été repartagé plus de 8.000 fois, et largement commenté sur Twitter.

« Leur objectif est simplement de se procurer des infos sur une personne ciblée via les réseaux sociaux : son nom, son adresse (même approximative), voire leur numéro de téléphone. Certains mecs se servent de ce système pour obtenir les coordonnées d’une fille qu’ils ont rencontrée en soirée. Admettons par exemple que la personne en question a bien pris une photo de ma copine, si elle était à son goût, il aurait pu avoir ses coordonnées si son message d’avis de recherche avait eu de l’audience. C’est du cyberharcèlement, et pas une nouvelle technique pour draguer ! », explique Julien à 20 Minutes.

Capture d'écran d'un message alertant sur les faux avis de recherche sur les réseaux sociaux.
Capture d'écran d'un message alertant sur les faux avis de recherche sur les réseaux sociaux. - Capture d'écran Twitter

« Un inconnu s’est fait passer pour mon père ! »

Cindy*, étudiante en licence, a elle aussi été victime d’une personne malveillante sur les réseaux sociaux. « J’ai commencé à recevoir plusieurs notifications d’amis sur mon téléphone. Au début, je ne comprenais pas ce qu’il se passait… Eh puis je suis tombée sur un avis de recherche avec une photo de moi, probablement volée, explique la jeune femme. Un homme, se faisant passer pour mon père, expliquait que j’avais fugué. Je suis tombée des nues ! » L’étudiante a immédiatement effectué un signalement sur Twitter, mais le compte a rapidement été fermé. La petite annonce n’est restée en ligne que quelques jours, ce qui a dissuadé Cindy d’aller porter plainte.

Une capture d'écran d'un faux avis de recherche posté sur Twitter.
Une capture d'écran d'un faux avis de recherche posté sur Twitter. - Capture d'écran Twitter

« Des prédateurs sexuels peuvent également se saisir de cette technique », prévient Julien. Ou, comme l’a dénoncé l’avocate AuPalais, des parents dont l’autorité parentale a été retirée, ou qui veulent se rapprocher d’une femme qu’ils ont battue et qui a fui. « Derrière, il peut y avoir peut-être : – une blague – du harcèlement – un conflit, etc. Même un enfant (souvenir d’un avis où le parent mentait et l’enfant était en réalité confié judiciairement à un autre) », explique l’avocate, dont le compte Twitter est très suivi.

« On arrête de RT des avis de recherche ne provenant pas des forces de l’ordre »

« Donc vraiment, je sais que ça part d’une bonne intention, mais arrêtez de partager des avis de recherche émanant d’autres comptes que ceux officiels de la police/gendarmerie », a lancé Julien sur Twitter. Un avis partagé par l’association Enfants disparus, qui indique ne partager en ligne « aucun avis de recherche sans une autorisation parentale (avec preuve de la filiation) et l’autorisation de l’OCRVP [Office central pour la répression des violences aux personnes de la police judiciaire]. Beaucoup d’internautes ont du mal à comprendre cela malheureusement », ajoute l’association.

Capture d'écran du tweet du compte AuPalais.
Capture d'écran du tweet du compte AuPalais. - Capture d'écran Twitter

Pour la plateforme cybermalveillance.gouv.fr, dispositif gouvernemental d’assistance aux victimes d’actes de cybermalveillance, ces pratiques relèvent clairement du cyberharcèlement. L’organisme incite aujourd’hui les victimes à aller porter plainte, même si les publications en question ne sont restées que très peu de temps en ligne. « Il y a trois choses à faire : signaler ces contenus auprès de Pharos [plateforme de signalement du gouvernement], faire supprimer ces messages sur le réseau social (Twitter, Facebook), et bien sûr porter plainte, pour tenter d’identifier et stopper les activités de ces personnes », explique Jérôme Notin, directeur général du groupement d’intérêt public (GIP) Acyma, en charge de la plateforme cybermalveillance.gouv.fr.

*Les prénoms ont été modifiés.