VIS!ONSOn vous présente les dark patterns, les sales bêtes d’Internet

On vous présente les dark patterns, ce design trompeur qui joue contre nous

VIS!ONSDes paramètres de confidentialité obscurs, des cases déjà cochées ou un site dont il est presque impossible de se désinscrire, nous avons tous déjà subi au moins une fois ces designs trompeurs.
Le mot du jour.
Le mot du jour.  -  RichVintage
Antoine Magallon

Antoine Magallon

L'essentiel

  • Les dark patterns ou design trompeur sont des mécaniques issues du design d’interface et dont le but est de piéger les utilisateurs ou de leur faire faire des choses contre leur volonté.
  • On vous apprend à en repérer quatre, dont le célèbre hôtel à cafards d’Amazon.

«On tombe dans le dark pattern quand on utilise les outils pensés pour améliorer l’expérience des utilisateurs, mais à mauvais escient ». Si vous n’êtes pas un expert du design à l’heure d’Internet cette phrase, prononcée par Célia Hodent, une vraie spécialiste du sujet titulaire d’un doctorat en psychologie ayant travaillé chez Ubisoft, LucasArts et Epic Games, doit vous paraître sacrément obscur. Pourtant nous avons tous, au cours notre vie numérique, été confrontés à des dark patterns, ou designs trompeurs/manipulateurs en français.

Une fenêtre pop-up qui s’ouvre pour vous rediriger vers un site nébuleux, des paramètres de confidentialité au phrasé alambiqué, des cases déjà cochées vous abonnant à de multiples contenus… Voilà quelques exemples de designs trompeurs. Pour Estelle Hary, designeuse et membre de la CNIL, la Commission nationale de l’informatique et des libertés « la manipulation des individus est récurrente sur les services et produits numériques, notamment au moment de la collecte des données personnelles. Souvent ces pratiques reposent sur des designs trompeurs (dark patterns), visant à influencer le consentement, dérouter l’individu, créer des frictions d’usage ou encore à pousser l’individu à partager plus de données que nécessaire. » Faisons donc toute la lumière sur 4 dark patterns plus ou moins sombres que nous côtoyons tous les jours.



L’autoplay

C’est le rhume des foins des designs trompeurs : répandu mais peu dangereux. L’autoplay, ou le lancement automatique de la prochaine vidéo à la fin de celle en cours de lecture, est aujourd’hui la norme sur de nombreuses plateformes comme Youtube et Netflix. Pratique, surtout si l’ordinateur est un peu loin, ce design influence tout de même notre consentement et notre libre arbitre. Avions-nous réellement envie de nous enfiler la dernière saison de Bojack Horseman d’une traite ou de regarder cette compilation des animaux les plus dangereux du monde aquatique ? La question est posée.

Leurre de l’urgence

Moins fin et plus dérangeant, place maintenant au “leurre de l’urgence”. Si vous êtes un habitué des sites de vente de sapes ou de réservation de logements type Booking vous le connaissez bien. « Attention, 27 personnes consultent en ce moment la même annonce que vous ». « Logement réservé 2 fois à vos dates lors des 24 dernières heures sur notre site ». L’objectif est simple : créer chez l’utilisateur une situation de stress pour l’inciter à acheter tout de suite. Pourtant, rien ne prouve que le logement que nous évoquions juste avant ait réellement été réservé deux fois lors des dernières 24 heures.

Roach motel ou hôtel à cafards

Une grande porte d’entrée sertie de diamants et une issue de secours introuvable : voici le roach motel ou hôtel à cafards en français. Inspiré par un piège à cafards du même nom et visiblement très utilisé dans les années 70 et 80 aux Etats-Unis (pour preuve cette pub, kitsch mais explicite), ce design a pour objectif de rendre la suppression d’un compte aussi difficile que possible, alors même qu’un enfant de quatre ans aurait pu s’inscrire les yeux fermés. Amazon en est sûrement le meilleur exemple, la vidéo ci-dessous (en anglais mais il est possible de mettre des sous-titres en français) vous aidera à mesurer l’ampleur du problème.

Opt-in/opt-out

Voici un procédé souvent utilisé au moment de décider si vous souhaitez ou non laisser une entreprise utiliser vos données personnelles ou vous envoyer sa newsletter. « Soit il faut faire quelque chose pour adhérer, pour souscrire, on appelle ça l’opt-in. Soit vous êtes engagé d’office et il faut cliquer pour partir. On appelle ça l’opt-out. Dans le deuxième cas il s’agit d’un dark pattern léger qui repose sur un biais cognitif, le biais de statu quo, qui nous pousse à laisser les choses telles qu’elles sont, explique Célia Hodent. Quand une entreprise utilise l’opt-out pour diffuser sa newsletter elle sait que beaucoup d’utilisateurs n’iront pas dans les paramètres et vont la recevoir, même sans s’en rendre compte. » Mais prenez ce même design et appliquez-le au don d’organe. Depuis la loi du 22 décembre 1976, dit loi Caillavet, chaque français est présumé donneur, sauf en cas de refus exprimé de son vivant. « C’est la même chose sauf que nous n’appelons plus ça un dark pattern mais un nudge. Par ce biais nous encourageons les gens à choisir la bonne option pour le bien de la société et sauver des vies. Car ce qui compte ce n’est pas le design mais les intentions qui sont derrière », conclut Célia Hodent.

Les Dark Patterns et le Nudge sont deux des thèmes abordés à VIS!ONS, la conférence gratuite de 20 Minutes le 4 décembre 2019 à Paris


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