Comment réguler les réseaux sociaux? Un rapport dévoile les principales pistes françaises
MODERATION•La France a rendu public ce vendredi un rapport sur la « responsabilisation des réseaux sociaux » qui propose notamment la création d’une autorité administrative indépendanteH. B. avec AFP
La pression s’intensifie pour réguler les réseaux sociaux et tout particulièrement Facebook. Le président Emmanuel Macron et le patron de Facebook Mark Zuckerberg ont discuté ce vendredi à l’Elysée des moyens de lutter contre les contenus haineux. Le gouvernement français envisage de promouvoir une loi qui obligerait les réseaux sociaux à retirer les contenus signalés dans les 24 heures, sous peine d’une forte amende, et souhaite promouvoir une telle régulation au niveau européen.
En attendant, la France a rendu public ce vendredi un rapport sur la « responsabilisation des réseaux sociaux », qui propose notamment la création d’une autorité administrative indépendante, chargée d’imposer une certaine « transparence » sur la manière dont les réseaux sociaux véhiculent des informations. 20 Minutes vous détaille les principaux points.
Une autorité administrative indépendante
Le rapport préconise la mise en place en France d’une autorisation administrative indépendante, chargée de « contrôler les obligations de transparence des fonctions d’ordonnancement » (hiérarchisation) « et de modération des contenus » par les réseaux sociaux. Cette autorité administrative indépendante « ouverte sur la société civile » serait « dotée de larges pouvoirs d’ accès à l’information détenue par les plateformes ».
Elle pourrait utiliser des « identités d’emprunt » pour procéder à des tests, et aurait un « accès privilégié aux algorithmes pour vérifier la sincérité de la description publiée par le réseau social ». Elle serait dotée d’un pouvoir de sanction, allant jusqu’à une amende pouvant atteindre 4 % du chiffre d’affaires mondial du réseau social.
Pas d’intervention sur les contenus
L’autorité administrative n’aura pas vocation à juger sur le fond les contenus diffusés par les plateformes, et à trancher entre ce qui est acceptable, et ce qui ne l’est pas. Seul le juge restera capable de trancher sur le fond, en fonction de la législation déjà existante. « Ce n’est pas à l’Etat d’aller dire : "Ça vous pouvez le dire, ça vous ne pouvez pas le dire" aux réseaux sociaux, résume-t-on à Bercy. « Ce sera au futur régulateur d’inventer » des manières d’y voir plus clair avec les réseaux sociaux pour trier les contenus litigieux, poursuit-on de même source.
« Il faut qu’avec la société civile on arrive à construire des zones d’acceptabilité ou de rejet des propos, mais ça doit être quelque chose de vivant, ça ne peut pas être dans la loi », ajoute-t-on. Les auteurs du rapport prennent en exemple la régulation des superviseurs bancaires. Ceux-ci « imposent et surveillent la conformité à certaines règles préventives », mais ils ne sont pas chargés de sanctionner les échecs « quand les risques combattus se matérialisent ».
La taille du réseau social prise en compte
Seuls les grands réseaux sociaux, dont les utilisateurs mensuels dépassent un certain pourcentage de la population de l’Etat européen concerné (qui pourrait être fixé entre 10 et 20 %) seraient soumis aux contrôles de l’autorité administrative. Les réseaux de taille intermédiaire ne seraient contrôlés qu’en cas de défaillance « constatée et persistante », et les petits réseaux ne seraient pas contrôlés.
Proposition française, mais cadre européen
La mission recommande un cadre européen pour le système qu’elle propose. Un règlement européen devra « rendre pleinement effectif une action coordonnée des autorités nationales face à des acteurs globaux ». La mise en oeuvre du règlement européen devra être nationale, pour « rendre les plateformes responsables localement devant chaque Etat membre ». Des mécanismes devront toutefois être prévus au niveau européen « pour prévenir les risques de régulation excessive par un Etat membre ».
Une coopération avec Facebook
Les fonctionnaires français (trois rapporteurs permanents, renforcés ponctuellement par des représentants de divers ministères et agences publiques) qui ont rédigé le rapport se sont rendus dans les locaux de Facebook à Dublin, siège européen du groupe, et de Barcelone, où se trouve un centre de modération des contenus.
La mission a « bénéficié d’un accueil ouvert », mais « n’a pas accédé à une information détaillée, ni à des éléments confidentiels ». La mission s’est également rendue à Berlin pour mieux comprendre les effets de la loi allemande, qui impose de strictes obligations de modération aux réseaux sociaux, et a rencontré des acteurs privés comme Google, Snapchat ou Twitter, ou des ONG comme Reporters sans frontières ou la Quadrature du Net.