VIDEO. Polaroid: Nous avons visité l’usine secrète où sont encore fabriqués les films pour appareils photo instantanés
PHOTO•Fermée en 2008 après 54 ans d’activité, puis relancée par une poignée d’inconditionnels, l’usine de films Polaroid d’Enschede en Hollande a ouvert ses portes à «20 Minutes»…Christophe Séfrin
L'essentiel
- Prisée par les jeunes, la photo instantanée revient en force depuis plusieurs années.
- Au cœur des Pays-Bas, l’usine historique de fabrication de films Polaroid a relancé ses machines.
- «20 Minutes» est le seul quotidien français à avoir pu en franchir les portes.
Il faut rouler encore 150 kilomètres après Amsterdam pour arriver à Enschede. Au cœur des Pays Bas, cette ville de 156.000 âmes possède une spécialité locale bien à elle.
A 200 mètres de l’église et de ses petites rues aux bâtiments de briques rouges se trouve plantée depuis 1954 une usine qui fait la fierté des lieux.
Une centaine de personnes y travaille encore aujourd’hui, alors qu’on y a compté jusqu’à 1,5 % de la population locale.
Cette usine, c’est celle où sont fabriqués les films pour appareils photo instantanés Polaroid.
Du projet impossible au possible succès
En 2008, alors que face au déclin de la photo argentique, Polaroid envoyait tout valser et fermait boutique, 10 personnes rachetaient le site de production de Enschede et lançaient « Impossible Project ».
Le but de cette société : reprendre la fabrication des films « Pola » à l’attention des millions d’utilisateurs d’appareils photo instantanés de la marque, comme le mythique SX-70 lancé en 1972, ou le Polaroid 600, le plus populaire des appareils photo à développement instantané commercialisé en 1981. Ce qui fut fait.
Exit Impossible Project. Place à Polaroid Originals. Il y a un an, l’homme d’affaires polonais Slava Smolokowski (l’un des dix associés de l’aventure « Impossible ») rachète l’ensemble des activités de Polaroid. C’est Oscar, son fils alors âgé de seulement 27 ans, qui prend la barre de l’activité photo. En septembre dernier, le OneStep 2, la réédition en plus musclé de l’appareil photo OneStep de 1977, souffle les 80 ans de Polaroid.
65 ingrédients pour une photo
Parmi les effectifs de l’usine aux cheveux souvent grisonnants se trouvent encore dix employés qui ont connu Polaroid avant la débâcle de 2008. « A l’époque, nous pouvions produire jusqu’à 50 millions de boîtes de films Pola par an. Aujourd’hui, nous tournons à 4 millions », confesse l’un d’eux.
Au premier étage du bâtiment, six machines fabriquent avec une impressionnante dextérité chaque feuille photo. Toutes sont ensuite glissées par dix unités en chambre noire dans les fameuses cassettes en plastique que l’on insère dans les appareils photo Polaroid.
Pas moins de 35 matériaux sont nécessaires pour créer chaque feuille, sans oublier le « Pod », la partie basse de la future photo.
Cette petite zone blanche que l’on croyait uniquement présente pour nous permettre de légender nos clichés n’intègre pas moins de 30 ingrédients actifs. Ecrasés entre deux rouleaux, ce sont eux qui servent de révélateur et font apparaître l’image lorsqu’elle est éjectée de l’appareil. Toujours magique…
Tenue secrète, la recette des films Polaroid Originals a dû être réinventée par Impossible Project en 2009.
Parmi ces ingrédients, certains pigments coûtent 10.000 euros le kilo ! Des petites mains en blouse blanche les associent au gramme près dans un laboratoire où l’on s’imaginerait pouvoir croiser le héros de Breaking Bad…
A l’étage, le temps semble s’être arrêté sur des engins de métal vert qui effectuent leur inlassable travail comme jadis. Certaines machines, encore à l’arrêt, attendent que gonflent les commandes, dont beaucoup viennent de France.
« C’est l’un de nos marchés les plus importants en Europe, généralement entre la seconde et la troisième marche du podium. La raison est qu’il y a depuis toujours de nombreux amoureux de Polaroid, d’utilisateurs de nos appareils et une communauté très forte de passionnés. Des geeks aux artistes, il y a en France un important vivier de gens amoureux de la photo et notamment de Polaroid », révèle Oscar Smolokowski.
Faire le ménage parmi les licences
A 28 ans aujourd’hui, le jeune entrepreneur a pris début juin la tête de l’ensemble des activités du groupe. Il dirige non seulement Polaroid Originals, mais aussi la holding Polaroid qui gère à l’échelle mondiale les dizaines de licences qui permettent à différents constructeurs de commercialiser des produits sous l’estampille Polaroid.
Un univers dans lequel on trouve de tout : des imprimantes aux lunettes, en passant par des réfrigérateurs ! Le jeune boss qui défile en jeans et T-shirt au milieu de ses employés va devoir y mettre de l’ordre. « A ce jour, je ne peux encore rien annoncer, mais nous avons pour cette marque une vision qui impliquera des changements dans le temps. Des lancements importants vont intervenir d’ici deux ans. A mes yeux, la chose la plus importante reste de construire de bons produits ».
Un nouvel appareil photo en préparation
Dans les prochaines semaines, Polaroid Originals devrait de son côté lancer un nouvel appareil photo instantané.
« Un modèle pour la génération Z à laquelle il faut expliquer que l’outil fonctionne avec ce qu’ils ont de plus cher, les réseaux sociaux », confie un cadre de Polaroid Originals. Comme une photo qui lentement se révèle, cet appareil pourrait être dévoilé à la rentrée.