VIDEO. Scandale Facebook: Cinq choses à retenir de l'audition de Mark Zuckerberg au Congrès
WEB•Le dirigeant, qui s'expliquait sur le scandale Cambridge Analytica, n'a pas vraiment été mis en difficulté...Philippe Berry
L'essentiel
- Mark Zuckerberg témoignait devant un comité du Sénat, avant de faire pareil à la Chambre des représentants mercredi.
- Pendant plus de cinq heures, les élus n'ont pas vraiment réussi à le déstabiliser.
- Facebook pourrait écoper d'une amende mais un changement législatif en profondeur est improbable.
Cinq heures d’audition face à 44 sénateurs – près de la moitié du Sénat américain. D’habitude peu à l’aise devant les caméras, Mark Zuckerberg n’a pas beaucoup transpiré, mardi, lors de son témoignage sur le scandale Cambridge Analytica. Il a été bien aidé par des élus flirtant avec les 70 ans de moyenne d’âge, pas vraiment à jour sur le fonctionnement d’Internet. Si une amende ou un durcissement législatif restent une possibilité, le marché est ressorti rassuré : l’action Facebook a terminé en forte hausse de 4,5 %. Voici les cinq thèmes marquants de ce marathon.
1. « Votre charte SUCKS »
Trop longues et trop compliquées, les conditions d’utilisation de Facebook ont uni les élus contre elles. « Savez-vous combien de personnes les lisent en entier et les comprennent ? », a demandé un sénateur. « J’imagine que la plupart ne vont pas jusqu’au bout, mais ils en ont la possibilité », rétorque Zuckerberg. C’est finalement le républicain John Kennedy qui a dit ce que tout le monde pensait tout bas : « Your user agreement SUCKS ! », « Votre charte est nulle ! » « Elle n’est là que pour couvrir vos fesses, retournez voir vos avocats et dites-leur d’écrire ça en anglais. »
a2. Qui est vraiment propriétaire des données ?
Mark Zuckerberg a insisté, « les utilisateurs sont les propriétaires de leurs données. Ils contrôlent ce qu’ils publient, qui voit leurs posts et ils peuvent désactiver la publicité ciblée » (en cliquant ici, mais Facebook affiche alors des réclames aléatoires). Et si une personne ferme définitivement son profil, « Facebook efface le plus vite possible toutes les données, aucune copie n’est conservée », assure le dirigeant (dans la pratique, Facebook se donne trois mois pour faire le ménage). « Vous dites que je suis propriétaire de mes données, mais c’est vous qui réalisez un chiffre d’affaires de 40 milliards de dollars avec », tacle le sénateur Tester. « L’utilisateur accorde une licence à Facebook, sinon il n’y aurait pas de service », répond Zuckerberg.
3. Pourquoi faire confiance à Facebook vu son passif ?
C’est l’ancienne procureure Kamala Harris qui s’est montrée la plus incisive. Fuite des données, conditions d’utilisation changées en douce, fonctionnalités imposées par défaut… Elle a listé les nombreux dérapages de Facebook en 14 ans d’existence, demandant à Mark Zuckerberg : « Pour Cambridge Analytica, vous avez fait le choix de ne pas avertir les utilisateurs pendant 27 mois. Il y a un vrai problème de transparence, pourquoi devrions-nous vous faire confiance ? » Penaud, Mark Zuckerberg a répété la même excuse : « Avec le recul, c’était une erreur. » Et de rappeler que Facebook a changé le cœur du problème en 2014: les développeurs n’ont plus accès aux données « des amis d’amis », ce qui a permis à Cambridge Analytica de siphonner les informations de 87 millions de personnes alors que seulement 240.000 ont participé au test de personnalité.
4.Facebook est-il en situation de monopole ?
Avec son accent traînant du sud, Lindsey Graham a mis les pieds dans le plat : « Vous ne pensez pas que vous avez un monopole ? » Réponse du CEO, sous les rires de la salle : « Je n’en ai pas l’impression ». Graham insiste : « Si j’achète une Ford et que je n’en suis pas content, je peux acheter une Chevrolet. Si Facebook ne me va pas, quel est un produit équivalent ? » Mark Zuckerberg s’emmêle un peu, expliquant que l’utilisateur moyen utilise huit apps pour ses interactions sociales. Quels sont ses compétiteurs ? Il finit par citer Google, Apple, Microsoft, Amazon, puis Twitter, dont l’activité « recoupe » celle de Facebook, selon lui.
5.Faut-il légiférer pour protéger les données ?
Plusieurs élus ont insisté sur la nécessité de légiférer pour protéger les données et la vie privée des utilisateurs. Prudent, Mark Zuckerberg a assuré qu’il n’était « pas opposé aux réglementations gouvernementales », prenant soin de préciser que « tout se joue dans les détails ». Il a notamment semblé ouvert à l’élaboration de standards plus clairs pour l’ensemble de l’industrie. Kamala Harris a rappelé que Facebook avait été placé sous surveillance en 2011 par la FTC, le gendarme du commerce, pour 20 ans. Alors qu’un démantèlement pour abus de position dominante relève pour l’instant du fantasme – de nombreux sénateurs y sont clairement opposés – Facebook pourrait écoper d’une amende allant jusqu’à 1 milliard de dollars si la FTC concluait que l’entreprise n’a pas respecté ses promesses.