Des insultes racistes tatouées sur son corps pour dénoncer «la lepénisation des esprits»
PRESIDENTIELLE•Au lendemain du premier tour, le Conseil représentatif des associations noires (Cran) a lancé une campagne choc pour dénoncer la « libération de la parole raciste »…A.B.
«Bamboula », « négro », « sale noir », « putain de singe ». Sur le corps de ce mannequin noir qui marche torse-nu place de la République à Paris, la teneur des messages éphémères tatoués sur sa peau est sans équivoque.
Au lendemain du premier tour de la présidentielle, qui a signé la qualification de Marine Le Pen pour le second tour du scrutin, le Conseil représentatif des associations noires (Cran) a lancé une campagne coup de poing. Objectif: dénoncer « la lepénisation des esprits ».
Une «libération de la parole raciste»
A quelques mètres de lui, un agent de nettoyage s'échine à effacer les tags anti-Macron et anti-Le Pen inscrits la veille sur la statue qui trône sur la place. Pendant ce temps, le jeune homme, à la sortie du métro, distribue des tracts aux passants : « le racisme laisse une trace indélébile ».
Sur son torse, son dos, son cou et même sur son visage, le mannequin arbore des tatouages éphémères, des insultes toutes plus à vomir les unes que les autres : « esclave » sur les pectoraux, « sale arabe » dans le cou ou encore « fainéant » ou « gros nez » sur les bras, ainsi que des dessins représentant une corde de pendu, un bonnet du Ku klux klan et des chaînes.
« Nous voulons rappeler aux gens trois choses : l'injure raciste est un délit, elle ouvre la porte à d'autres délits comme l'agression physique, et l'insulte laisse des traces durables sur le corps, comme les cicatrices », déclare Louis-Georges Tin, président du Conseil représentatif des associations noires de France (Cran).
« Depuis plusieurs mois, voire plus, nous savons bien que le score du FN est important. Le problème ce n'est pas Le Pen, c'est la "lepénisation" des esprits », ajoute-t-il, expliquant qu'il s'agit d'une « libération de la parole raciste ».
« Susciter l'angoisse, voire la honte »
L'association n'a donc pas hésité à « retourner l'insulte contre l'insultant pour susciter l'angoisse, voire la honte », explique encore Louis-Georges Tin. Pour lancer sa campagne, le Cran a sollicité ses internautes pour leur demander quelles sont les pires insultes racistes dont ils ont pu être victimes en raison de la couleur de leur peau, obtenant ainsi un florilège d'insulte à vous coller une nausée sans nom.
Les journalistes Audrey Pulvar et Harry Roselmack, ainsi que Souleymane Sylla, la victime des supporters de Chelsea insultée dans le métro parisien, ont également participé à cette campagne, intitulée « the human billboard » (le tableau humain) dans plusieurs vidéos diffusées sur les réseaux sociaux.