Savez-vous (vraiment) ce qu'est un algorithme?

Savez-vous (vraiment) ce qu'est un algorithme?

HIGH-TECHSi 83 % des Français ont déjà entendu parler des algorithmes, 52 % ne voient pas précisément de quoi il s’agit. Et même la CNIL s'y perd. Explication avec les auteurs du « Temps des algorithmes » (Le Pommier)…
Annabelle Laurent

Annabelle Laurent

Ils sont à l’œuvre quand Google vous propose un résultat de recherche. Quand Netflix vous conseille une série. Quand Facebook vous présente une actualité plutôt qu’une autre. Mais aussi dans les diagnostics médicaux, les transactions financières ou la prédiction des crimes… Les algorithmes sont partout. Les craintes qui les entourent se multiplient. Mais savons-nous ce qu’ils sont?

Loin de là, à en croire les résultats de l’étude IFOP publiée lundi par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), qui lance un cycle de débats publics sur le sujet et rendra ses conclusions à l’automne 2017.

Selon cette étude, si 83 % des Français ont déjà entendu parler des algorithmes, 52 % disent ne pas savoir précisément de quoi il s’agit (et 31% assurent savoir précisément de quoi il s'agit.)

A vrai dire... même la CNIL s'y perd. Les spécialistes ont bondi à la lecture d'une première définition de l'algorithme, donnée à l'occasion du lancement du cycle de réflexion, la jugeant trompeuse et erronée. La CNIL l'a ensuite corrigée.

20 Minutes a profité de la publication du Temps des algorithmes, le 27 janvier aux éditions Le Pommier, pour interroger ses deux auteurs, Serge Abiteboul et Gilles Dowek, tous deux informaticiens et chercheurs à l’ Inria.

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Une bonne vieille recette

« Un algorithme, c’est extrêmement simple, promet Serge Abiteboul. On connaît ça depuis toujours. Un enfant qui s’habille le matin suit un algorithme [en apprenant assez vite qu'il y a un ordre à suivre et qu'il aura quelques difficultés à enfiler ses chaussettes après ses chaussures]. Vous aussi, quand vous suivez une recette de cuisine. Un algorithme, c’est une séquence d’instructions utilisée pour résoudre un problème».

L’avantage est qu’une fois qu'on sait comment résoudre le problème avec un algorithme, «la transmission de cet algorithme va permettre de ne pas avoir à inventer une solution à chaque fois.»

L’itinéraire que vous suivez le matin pour vous rendre au bureau est aussi un algorithme : vous n’inventez pas chaque jour un nouveau chemin. Autre exemple parlant : quand vous cherchez un mot dans le dictionnaire, vous l’ouvrez au milieu, comparez le mot recherché au mot sur lequel vous êtes tombé au hasard, sélectionnez la première ou seconde moitié du dictionnaire selon que le mot recherché est avant ou après ce mot, jusqu’à trouver le mot souhaité. Quels génies vous faites : voilà un algorithme qui porte sur le symbole écrit que sont les lettres.

Comme l’indiquent les auteurs, un premier algorithme connu est attribué à Euclide, vers 300 avant notre ère, et permettait de calculer le plus grand diviseur commun de deux nombres entiers.

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Pourquoi maintenant ?

Si les algorithmes existent depuis toujours, comment expliquer alors qu’ils se soient faits une telle place récemment dans le débat public, au point que la CNIL lance un cycle de débats publics afin de répondre aux « réactions diverses et souvent passionnées, entre enthousiasme, fascination, inquiétude et contestations » qu’ils suscitent ?

« La vraie révolution, ce n’est pas les nouveaux algorithmes, c’est qu’on a des machines pour les exécuter, poursuit Gilles Dowek. Après avoir été longtemps capables de les expliquer entre nous, on est capable de les expliquer à un ordinateur, pour lui dire ce qu’il faut faire ».

Pourtant là encore, l’arrivée des ordinateurs ne date pas d’hier… « On a des ordinateurs depuis les années 1940. On les a connectés en réseau à la fin des années 1960 [en 1969, Arpanet est le précurseur d’Internet], puis le prix des ordinateurs a énormément baissé et les ordinateurs, téléphones portables et tablettes, en s’invitant dans notre quotidien, ont permis la large diffusion des algorithmes, de celui qui calcule vos impôts, à celui qui décide où vous allez à l’école ou aide aux diagnostics médicaux. »



De la joie de connaître la définition d'un algorithme.

Informer pour démystifier

L’internaute pense pourtant en premier lieu aux algorithmes de recommandation (qui ne sont qu’un type d’algorithme parmi d’autres), ceux qui conditionnent aujourd’hui notre vie en ligne, sur les réseaux sociaux, sites de streaming ou d’e-commerce… « Ils sont très importants puisqu’ils décident au quotidien quelles informations vous parviennent, et suscitent donc des inquiétudes car les manipuler peut avoir des répercussions sur votre liberté de choix. »

Ces inquiétudes ont invité les algorithmes dans le débat public, académique (A quoi rêvent les algorithmes ? de Dominique Cardon) et médiatique, et mené à une prise de conscience. « Ce qui est récent, c’est cette prise de conscience, notent les auteurs. Et si les gens en ont peur, c’est qu’ils ne les comprennent pas. D’où notre responsabilité d’informaticiens pour les expliquer et nous battre contre les craintes irrationnelles. »

>> Retrouvez sur 20 Minutes l’interview complète: D’autres craintes sont plus rationnelles. Quelles décisions pouvons-nous confier à un algorithme ? Les algorithmes signent-ils la fin du travail tel que nous le connaissons ? Faut-il donner une personnalité juridique aux robots et aux intelligences artificielles ?