«Child of Light», un jeu de rôle d'Ubisoft Montréal aussi délicat qu'un conte à l’aquarelle
JEU VIDEO•Ce mercredi sort «Child of Light», un jeu téléchargeable d’Ubisoft, qui scintille par sa poésie, sa simplicité et son monde enchanteur…Joel Metreau
Un mois avant d’envoyer la machinerie lourde, le blockbuster à monde ouvert «Watch Dogs», le studio Ubisoft Montréal livre un «petit jeu». En termes de budget, deux mois de production d’un «Assassin’s Creed». «Child of Light» se présente comme un jeu de rôle en deux dimensions, où on va diriger une jeune princesse qui doit récupérer trois sources de lumière dérobées par une reine maléfique.
Cette enfant de lumière va traverser le royaume de Lumeria, des niveaux comme des aquarelles qui peignent un monde inspiré des illustrations du Suédois John Bauer et «des contes de Grimm davantage que de ceux de Disney», explique Patrick Plourde, 35 ans. Ce game designer qui avait travaillé sur le brillant «Far Cry 3» et les quatre premiers «Assassin’s Creed» avait pour envie de s’inspirer des «Final Fantasy» dont il est fan. De la jouabilité de ces jeux de rôle japonais, il a conservé les arbres de compétences et la fabrication d'objets magiques, ainsi que les combats au tour par tour, en leur ajoutant «un aspect proche de l’opéra». D’où l’idée de projecteurs pour illuminer le personnage quand vient son tour de lancer un sort ou de dégainer son épée.
Cœur de Pirate et le Cirque du Soleil
Ce petit bijou auquel le Cirque du Soleil a apporté son concours en designant notamment des personnages contient une puissance nostagique, grâce à sa bande originale. Une B.O. lancinante et au piano, composée par la jeune Québecoise Cœur de Pirate, artiste féminine de l'année aux Victoires de la musique 2011. Pour justifier ce choix, Patrick Plourde explique: «Je voulais à la fois collaborer avec des Montréalais et aussi une partition intime, pas une musique d’orchestre. Il fallait des mélodies qu’on puisse fredonner.»
On sent bien que pour les créateurs du jeu, cette œuvre a représenté une bouffe d'air frais. Quand on travaille dans un gros groupe comme Ubisoft, «on peut tomber dans une zone de confort», reconnaît Patrick Plourde. D’où le désir de s'aventurer dans les conditions de travail d’un studio indépendant: une vingtaine de personnes (bien loin des 800 nécessaires au développement d’un blockbuster) et une hiérarchie moins établie. «Mais cela demande autant de travail qu’un gros jeu», souligne le directeur créatif.
Ce n’est pas la première fois qu’Ubisoft promeut des jeux dématérialisés à valeur artistique ajoutée. Il y avait eu «From Dust», créé par le Français Eric Chahi, et «I am Alive». Cet été sortira «Soldats inconnus: Mémoires de la Grande Guerre», à l’occasion du centenaire de la Guerre 14-18. Une ambition créatrice qu’on espère qu'Ubisoft continuera d'assouvir encore ces prochaines années.