A l'été 1942, 2.000 juifs partaient du camp des Milles pour Auschwitz

A l'été 1942, 2.000 juifs partaient du camp des Milles pour Auschwitz

Le camp des Milles près d'Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), où furent internées de 1939 à 1942 plus de 10.000 personnes, célèbre dimanche le 70e anniversaire des convois qui virent partir pour Auschwitz quelque 2.000 juifs, hommes, femmes et enfants.
© 2012 AFP

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Le camp des Milles près d'Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), où furent internées de 1939 à 1942 plus de 10.000 personnes, célèbre dimanche le 70e anniversaire des convois qui virent partir pour Auschwitz quelque 2.000 juifs, hommes, femmes et enfants.

La cérémonie, dans le cadre de la Journée nationale dédiée aux victimes des crimes racistes et antisémites de l'Etat français et en hommage aux Justes de France, est prévue à 09H30. Elle sera suivie de la remise officielle d'un ouvrage réalisé par la société philatélique du pays d'Aix et regroupant des lettres d'internés.

Le camp des Milles, qui ouvrira ses portes au public en août, est le "seul grand camp d'internement et de déportation sous commandement français encore intact", selon Alain Chouraqui, président de la Fondation Camp des Milles Mémoire et Education. Plusieurs particularités font de ce camp, installé sur le site d'une ancienne tuilerie, un endroit à part dans l'histoire de la déportation en France.

Il n'a fonctionné, tout d'abord, que durant les années où le Sud était en zone libre, donc sous commandement militaire français, puis du régime de Vichy. La tuilerie fut réquisitionnée par le gouvernement dès septembre 1939. Au total, plus de 10.000 personnes, de 38 nationalités différentes, y seront enfermées.

Au départ, il ne s'agit que de "sujets ennemis": Allemands et Autrichiens pour la plupart, qui ont fui le régime nazi et ne comprennent pas pourquoi le pays qui les a accueillis leur ôte désormais la liberté.

Puis, de juillet 1940 à juillet 1942, sont emprisonnés les "opposants et indésirables" du régime de Vichy. Les Milles devient alors un camp de transit, d'où certains parviennent néanmoins à fuir, en se procurant des faux papiers grâce à des filières, dont le réseau de l'Américain Varian Fry.

Enfin, à l'été 42, sur décision de Laval, ce sont quelque 2.000 juifs, dont le plus jeune n'avait pas un an, que l'on rafle avant de les envoyer dans des trains -un wagon, offert par la SNCF pour le mémorial, le rappelle- vers le camp d'extermination d'Auschwitz.

Le dernier des cinq convois part le 10 septembre 1942. En novembre, les Allemands occupent la Provence et font de la tuilerie un dépôt de munitions. Après la guerre, l'activité industrielle reprend et, peu à peu, le souvenir de l'existence du camp se perd, jusqu'en 1983 et la redécouverte de la "salle de peintures", le réfectoire des gardiens décoré par des artistes internés.

C'est l'autre particularité des lieux: ils ont accueilli de très nombreux artistes et intellectuels -peintres, écrivains, musiciens- "à l'image du camp de concentration de Terezin", en République tchèque, souligne M. Chouraqui. Parmi eux, les surréalistes Max Ernst et Hans Bellmer, le peintre Karl Bodek, le prix Nobel de médecine Otto Meyerhoff, etc.

Des représentations théâtrales, des opérettes et des concerts sont donnés aux Milles, alors que les conditions de vie y sont exécrables: les internés dorment à même le sol, la poussière s'infiltre partout, il y a peu de latrines, on y crève de chaud en été et on y gèle en hiver...

Enfin, dernière particularité des Milles: sa vingtaine de "Justes parmi les Nations", très actifs et honorés par le Mémorial de Yad Vashem à Jérusalem. "Ce qui ne fut pas le cas, souligne M. Chouraqui, pour le Vél' d'Hiv par exemple", dont le 70e anniversaire est célébré dimanche.

Ainsi du pasteur Henri Manen et de son épouse Alice, qui délivrèrent de faux certificats de baptême pour sauver des juifs, ou du gardien du camp Auguste Boyer et de sa femme Marie-Jeanne, qui sauvèrent plusieurs enfants.

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