Procès de l'incendie du CRA de Vincennes: "Mon grand-père a fait la guerre ici!"

Procès de l'incendie du CRA de Vincennes: "Mon grand-père a fait la guerre ici!"

"Je ne suis pas un étranger, mon grand-père a fait la guerre ici!", a lancé un prévenu jeudi, à l'ouverture du procès en appel de l'incendie qui avait détruit en 2008 le Centre de rétention administrative (CRA) de Vincennnes.
© 2011 AFP

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"Je ne suis pas un étranger, mon grand-père a fait la guerre ici!", a lancé un prévenu jeudi, à l'ouverture du procès en appel de l'incendie qui avait détruit en 2008 le Centre de rétention administrative (CRA) de Vincennnes.

Cet homme de 37 ans, Moïse Diakité, né à Bamako, est parmi six anciens occupants du CRA de Vincennes (trois Maliens, deux Marocains et un Palestinien) poursuivis pour avoir mis le feu à des matelas et divers autres équipements, provoquant un incendie qui avait dévasté les deux bâtiments du centre.

Quatre sont sur le banc des prévenus, deux ne se sont pas présentés à l'audience.

Les troubles avaient éclaté le 22 juin 2008, au lendemain de la mort dans des circonstances mystérieuses d'un "retenu" tunisien de 41 ans qui, asthmatique, souffrait d'insuffisance respiratoire.

Egalement poursuivis pour violences sur agents de la force publique, les prévenus, qui plaident non coupables, avaient été condamnés en première instance à des peines de prison de 1 à 3 ans ferme, à l'issue d'un procès émaillé d'incidents.

Les avocats de la défense avaient alors claqué la porte, en criant à l'iniquité de la procédure, menée entièrement à charge selon eux.

Cette fois, l'ambiance est plus sereine, et les avocats et militants pour la cause des sans-papiers comptent dénoncer lors de ce nouveau procès les conditions d'accueil et de sécurité dans les centres de rétention.

Destinés à accueillir des étrangers en situation irrégulière, pour la plupart en voie d'être renvoyés vers leur pays, les CRA sont actuellement au nombre de 27, selon la Cimade, pour une capacité totale de 1.970 places.

"Combustion extrêmement rapide"

En 2008, le CRA de Vincennes était le plus grand de France, avec 249 occupants, pour une capacité de 280.

"La concentration crée des explosions...", a constaté Jean-Pierre Dubois, à l'époque président de la Ligue des droits de l'Homme (LDH), cité comme témoin par la défense. La LDH demande la fermeture pure et simple des CRA.

"Enfermer des gens (...), c'est un facteur de tension, d'énervement", forcément, a ensuite appuyé Françoise Vuzelin, 71 ans, psychiatre retraitée et militante.

"Je pense qu'on doit pouvoir vivre là où on a envie (...), alors j'aide les gens à constituer un dossier et à faire valoir leurs droits", a-t-elle déclaré à la cour, pour expliquer son engagement auprès des sans-papiers.

Quant à l'incendie, un témoin, lui aussi militant, qui se trouvait à l'extérieur du centre, l'a décrit comme "un feu de foin".

"J'ai eu l'impression d'une combustion extrêmement rapide", "un peu comme dans un film américain", a déclaré Jean Borovi, prof de maths de 71 ans, cheveux gris en bataille, qui a pris des photos de l'incendie et trouvé très tardive l'intervention des pompiers.

Le procès, prévu jusqu'au 4 novembre à raison de deux audiences par semaine, se poursuit vendredi, avec d'autres témoignages et le visionnage d'images de la vidéosurveillance du centre de rétention.

Ce sont ces enregistrements, muets, en noir et blanc et contestés par la défense, qui avaient permis d'identifier les présumés pyromanes. Leur visionnage au premier procès, pendant une quinzaine d'heures, avait été une véritable épreuve. Cette fois, seuls des extraits, choisis par les parties, devraient être diffusés.