Quand la justice révise ses classiques
REVISION•La Cour se prononce ce mardi sur le sort de Loïc Sécher et Marc Machin...Ingrid Gallou
La date du 13 avril 2010 pourrait bien rester dans les annales de la justice. Coïncidence de calendrier, la Cour de cassation réunie en Cour de révision doit décider ce mardi du sort judiciaire de Marc Machin et Loïc Sécher. Condamnés, l'un pour le meurtre d'une joggeuse, l'autre pour le viol d'une adolescente, ils ont passé plusieurs années en prison avant qu'un «élément nouveau» ne permette de lancer la procédure de révision.
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Cette simultanéité cache mal la difficulté, en France, de faire aboutir une telle procédure. Les mailles du tamis sont si serrées que seuls six dossiers, en matière criminelle, ont obtenu une révision depuis 1945 (lire l'encadré).
Un blocage sur les grandes affaires
La requête en révision est déposée devant la Commission de révision des condamnations pénales. Elle seule peut ensuite saisir la Cour de révision, sur la base de l'article 622 du Code de procédure pénale. Celui-ci énonce qu'un «fait nouveau de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné» doit être intervenu entre la condamnation et la demande de révision.
Pour Jean-Marc Florand, avocat de Patrick Dils acquitté en 2002, les conditions restrictives de ce texte, associées à une Commission de révision «qui ne joue pas le jeu», constituent un «filtre puissant». Auquel s'ajoute «le blocage de la justice sur les grandes affaires, comme celles de la josacine ou de Seznec», et la peur, en cas de révision «d'avoir 200 dossiers de demandes supplémentaires». «Le simple terme d'erreur judiciaire prononcé devant la Commission suffit à faire se crisper tous les visages, poursuit-il. Pourtant, l'administration se fourvoie à ne pas les reconnaître.»
Frédéric Monneret, avocat de Rida Daalouche, acquitté en 1999, abonde en ce sens. «La révision se heurte à la difficulté de la chose jugée. Or, les magistrats veulent assurer l'équilibre de l'institution judiciaire, sorte de garantie pour la société. C'est un peu comme en matière d'arbitrage de football, lorsque l'arbitre refuse de revenir sur une erreur aussi flagrante que la main de Thierry Henry.»