Francis Evrard condamné à 30 ans de réclusion, dont 20 ans de sûreté
JUSTICE•Le procès du violeur du petit Enis s'est achevé ce vendredi...J. M. avec agence
Francis Evrard a été condamné à 30 ans de réclusion, dont 20 ans de sûreté, ce venrdedi, par la cour d'assises de Douai (Nord). La peine est assortie d'un suivi socio-judiciaire de 20 ans. «Enlèvement, séquestration, atteintes sexuelles, pénétrations sexuelles», l'homme a été reconnu coupable de tous les chefs d'accusation pour lesquels il comparaissait, au terme de plus de trois heures de délibérés.
>> A venir, le reportage de notre envoyé spécial à Douai.
Francis Evrard, 63 ans, vêtu d'une veste de survêtement bleu marine, est resté impassible à l'énoncé de la condamnation, accueillie par un grand silence.La réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 22 ans et d'un suivi socio-judiciaire sans limitation de durée avaient été requis plus tôt dans la matinée contre l'accusé, jugé pour l'enlèvement et le viol du petit Enis en août 2007 à Roubaix.
«La fin de la partie est sifflée»
Le verdict clôt une journée au cours de laquelle les parties ont rivalisé de formules cinglantes. «Monsieur Evrard on ne peut rien pour vous. Je ne veux pas prendre le pari sur la tête d'enfants que vous allez changer», a déclaré l'avocat général Luc Frémiot.
«Vous avez joué au yo-yo avec les experts et les juges. Moi je ne vous suis pas. La fin de la partie est sifflée, maintenant c'est le jour des responsabilités», a-t-il ajouté.
«Je vous prendrai par la main comme vous avez pris celle d'Enis»
«La barre est placée au plus haut. Je comprends pourquoi la société veut faire en sorte qu'on ne recroise jamais cet homme dans la rue», a aussitôt réagi Emmanuel Riglaire, avocat du petit Enis et de son père Mustafa Kocakurt.
«Vous devez vous détester monsieur Evrard. Quand on a un tel pouvoir d'infliger aux autres une telle souffrance, c'est qu'on se déteste soi-même et je vous plains», a encore déclaré l'avocat général. «Je viendrai vous chercher et c'est moi qui vous conduirai à la condamnation. Je vous prendrai par la main comme vous avez pris celle d'Enis, pour que vous vous souveniez de ce qui s'est passé, de tous ces yeux d'enfants dans le noir», s'est-il exclamé.
«Qu'on ne me traite pas de monstre»
«C'est vrai que je ne suis pas un type bien. Je sais que j'ai fait du mal à Enis, à son père. Je ne demande pas de pitié, je souhaite seulement être jugé humainement et qu'on ne me traite pas de monstre», a répondu Francis Evrard, s'adressant aux jurés, juste avant qu'ils ne se retirent pour délibérer.
«Francis Evrard reste une personne humaine, (...) qui pense qu'il n'est pas un monstre et qui ne veut pas être évacué, jeté dans une poubelle. (...) On doit le garder dans la communauté des hommes», a déclaré Jérôme Pianezza, l'avocat de l'accusé. Selon lui, la perpétuité, «ce serait de l'autisme, (mettre) la tête dans le sac, une facilité, et d'une certaine façon le cautionnement des dysfonctionnements. Ce serait mentir aux victimes en leur faisant croire que tout est résolu, réduire Francis Evrard uniquement à ce qu'il a commis et nier ce qu'il n'a jamais cessé d'être: l'un de nos semblables».
«Il a l'âge de mon père, ça me fait de la peine quand même»
«Je suis humain, j'ai un coeur, c'est désolant qu'une personne de cet âge reste enfermée tout le temps», a déclaré de son côté le père d'Enis, Mustafa Kocakurt. «Il a l'âge de mon père, ça me fait de la peine quand même», a ajouté le père d'Enis, précisant cependant: «Mais si je dois avoir de la peine pour que tous les enfants de France soient en sécurité, je préfère avoir cette peine-là et qu'il reste en prison toute sa vie».
Pendant une plaidoirie de plus de deux heures, Jérôme Pianezza a retracé en détails la «descente aux enfers» de son client, devenu selon lui une «bombe à retardement» par la «complicité» de la justice et des médecins, qui ont «tellement accumulé d'erreurs, de mauvaise gestion, de désinvolture» pour traiter «cet homme que l'on savait particulièrement dangereux».
«Une justice fatiguée, à la silhouette fragile»
«Vous avez découvert le visage d'une justice fatiguée, à la silhouette fragile, portant des vêtements mal coupés et trop grands pour elle. Francis Evrard vous êtes l'erreur de ce système. Je voudrais qu'on fasse de ce procès une force de proposition, je veux que ça change», a conclu l'avocat général Luc Frémiot.
Francis Evrard, 63 ans, est accusé d'avoir enlevé, séquestré et violé par pénétration digitale, en récidive légale, le petit Enis dans un garage de Roubaix le 15 août 2007. Il avait déjà été condamné à trois reprises depuis 1975 pour des attentats à la pudeur et des viols sur des mineurs. Le verdict est attendu ce vendredi, tard dans la soirée.