Les séropositifs toujours privés de soins de conservation après la mort

Les séropositifs toujours privés de soins de conservation après la mort

SANTE- La réglementation est restée inchangée depuis 1986...
Un thanatopracteur au travail. Extrait  de la série «Temps Mort».
Un thanatopracteur au travail. Extrait  de la série «Temps Mort».  - DR
Catherine Fournier

Catherine Fournier

Souvent discriminées de leur vivant, les personnes atteintes du VIH le sont aussi après leur mort. Dans son numéro de mars avril, «Transversal» , le magazine d'information du Sidaction, revient sur une réalité bien troublante, relayée par «Libération» mardi: les séropositifs, en France, ne peuvent toujours pas recevoir de soins de conservation post-mortem.

Ces derniers permettent la présentation du corps aux proches avant la mise en bière. Ils consistent notamment en une désinfection interne de l'organisme via l'injection par seringue de produits antiseptiques.

Impossibilité de revoir la personne décédée

Or, si le sida ne figure plus sur la liste des maladies contagieuses depuis 1998 (1), la législation n'a guère changé depuis 1986 et donne toujours la possibilité au maire d'une commune de refuser la pratique de ces soins sur le corps d'une personne séropositive pour éviter tout risque d’infection.

Dans la pratique, ce sont les médecins qui signalent ou non sur le certificat médical de décès l'interdiction de pratiquer des soins de conservation aux défunts dont l'état de sérologie positive est connu. Le maire se contente d'apposer sa signature et les thanatopracteurs d'appliquer la consigne.

Résultat, les familles et les proches se heurtent parfois à l'impossibilité de revoir la personne après son décès. «Dans le cas du rapatriement d'un corps, par exemple, le cercueil est fermé et sans hublot», s'insurge Jean-Luc Romero, président d’Elus locaux contre le sida.

Selon lui, ce genre d'affaires douloureuses s'est multiplié ces derniers temps, certains médecins faisant un excès de zèle. «A Montbéliard, des médecins ont même demandé qu'un test de dépistage soit pratiqué sur un père de famille mort d'un cancer, sous prétexte qu'il était homosexuel.»

Depuis 1998, le Conseil national du sida (CNS) rappelle pourtant qu'aucun argument technique ou scientifique ne peut justifier cette exception, dès lors que les précautions universelles qui s'imposent lors de toute opération funéraire sont strictement suivies.

Roselyne Bachelot étudie la question

Un nouveau projet de décret et d'arrêté, ayant reçu un avis favorable du CNS, avait été élaboré par les pouvoirs publics en 1999 mais n'a jamais été adopté.

Jean-Luc Romero a saisi début février le CNS, lequel a réitéré en mars sa demande d'annulation de l'article qui mentionne l'infection à VIH dans la liste des maladies faisant obstacle à la pratique de soins de conservations sur les corps.

L'élu UMP a également écrit en décembre au ministère de la Santé et à Carla Bruni-Sarkozy. Si l'Elysée n'a toujours pas répondu, Roselyne Bachelot a fait parvenir tout récemment un accusé de réception indiquant qu'elle allait étudier la question.

(1) Les maladies contagieuses figurant dans l'arrêté du 20 juillet 1998 sont les orthopoxviroses, le choléra, la peste, le charbon, les fièvres hémorragiques virales.