Richard Descoings: «Que tous ceux concernés par le lycée s'expriment»
INTERVIEW•Plate-forme de la mission sur la réforme du lycée, lyceepourtous.fr est lancée ce lundi. Le directeur de Sciences-Po chargé de la mission, présente en avant-première ce site, qui permettra de connaître et de répondre aux inquiétudes.Propos recueillis par Bastien Bonnefous
Pourquoi un tel site?
Nous voulons que tous ceux qui sont concernés par le lycée – élèves, enseignants, parents, équipes d’encadrement… – puissent s’exprimer personnellement, soit par un texte sur un blog, soit dans une vidéo en partenariat avec YouTube. Depuis ma nomination en janvier, j’ai visité plus de trente lycées, j’ai vu 3 000 lycéens, 800 proviseurs. C’est bien, mais c’est peu comparé aux 4 000 lycées et 2,5 millions de lycéens en France. Chacun a un souvenir, une idée, une attente sur le lycée. Ce site doit permettre un débat aussi large que possible. En mai, je proposerai un texte bref et argumenté de préconisations nourri par ce débat, qui vaudra mieux qu’un rapport de 200 pages que personne ne lira.
Que retenez-vous de votre tour de France des lycées?
D’abord, l’assurance que personne n’est opposé par principe à l’idée d’une réforme du lycée, mais que les gens sont parfois inquiets face à ce qui peut leur être présenté. Ensuite, les élèves sont très attachés à l’égalité scolaire. Pourquoi les filles forment-elles 80 % des effectifs en filière L, à l’inverse des garçons, majoritaires en S ? Pourquoi la voie technologique passe-t-elle souvent pour imposée à des lycéens qui n’auraient pas le niveau pour la voie générale ? Les élèves expriment souvent un sentiment d’inégalité dans les modes d’orientation à la fin du collège ou de la seconde.
Notre sondage révèle leur inquiétude pour leur avenir. Qu’en pensez-vous?
C’est un sentiment qui revient souvent, en effet. Les jeunes attendent trois vertus du lycée : qu’il leur apprenne à devenir des citoyens, qu’il leur transmette des savoirs, et qu’il les prépare à l’entrée dans la vie professionnelle. En temps de crise, l’angoisse du chômage pèse et l’inquiétude de beaucoup est normale.
Pourquoi le lycée devrait-il changer?
Pour la voie générale, le lycée actuel n’est pas très différent de celui des années 1970. J’ai 50 ans, et quand j’étais lycéen, nous étions trente-cinq par classe, avec des cours qui se succédaient d’heure en heure. Au fond, rien n’a vraiment changé. Pourtant, les lycéens, eux, ont beaucoup changé, leurs centres d’intérêt se sont élargis sous l’effet des nouvelles technologies. Le lycée doit évoluer pour s’adapter et surtout pour lutter contre l’échec scolaire, de plus en plus marqué socialement. Notre objectif est de conserver 80 % d’une classe d’âge titulaire du bac, mais aussi de parvenir, à terme, à 50 % de titulaires d’une licence. C’est tout l’enjeu des réformes liées de l’université et du lycée.