PETITIONJustice des mineurs: «On a des petits délinquants, on en fait des grands criminels»

Justice des mineurs: «On a des petits délinquants, on en fait des grands criminels»

PETITIONCent spécialistes de la petite enfance signent un manifeste pour protester contre la réforme de la justice des mineurs...
Maud Descamps

Maud Descamps

«Emprisonner, n'est pas éduquer». C'est le coup de gueule d'une centaine d'experts de la petite enfance et du magazine «Psychoenfant», sur les propositions de réforme de l'ordonnance de 45, relative à la délinquance des mineurs, remises mercredi à Rachida Dati.


La commission Varinard, qui a remis 70 propositions sur la refonte de la justice des mineurs, suggère de fixer à 12 ans l'âge minimum de la responsabilité pénale. C'est-à-dire l'âge à partir duquel un mineur jugé dans une affaire criminelle pourra être envoyé en prison. «Une solution qui n'est pas une réponse», pour William Memlouk, rédacteur en chef du magazine «Psychoenfant» qui publie le manifeste, «mettre un enfant en prison, c'est nier toute une partie du problème de la délinquance juvénile».

Quid du développement psychologique de l'enfant?


C'est donc pour alerter des dangers de cette réforme que 100 experts, pédopsychiatres, sociologues, pédiatres, signent un texte dénonçant «l'absence totale de prise en compte du développement psychologique de l'enfant par la commission», explique Vanessa Saab, directrice de la rédaction de «Psychoenfant» et médiatrice familiale ayant travaillé dans le milieu pénitentiaire.


Parmi les critiques faites par le collège d'experts figure «le danger que représente la prison pour ces jeunes». «Ce sont des enfants blessés. Les mettre en prison équivaut à les briser définitivement», s'insurge Vanessa Saab, «les mesures proposées ne s'attaquent pas aux causes de la délinquance mais seulement aux conséquences. Pourtant les deux aspects doivent être traités».


Où sont les experts de la petite enfance de la commission Varinard?


Autre «problème», souligné par le manifeste, la composition de la commission Varinard (lien). «Nous souhaitons attirer l'attention des pouvoirs publics sur sa composition, puisqu'un seul spécialiste de la petite enfance y figurait», explique Vanessa Saab, «comment apporter des réponses cohérentes et efficaces avec des personnes qui ne sont pas en contact avec ces jeunes?», s'interroge-t-elle.


Dans quelques mois, les spécialistes signataires du texte soumettront des propositions à la ministre de la Justice, qui prendront en compte «l'épanouissement et la construction psychologique de l'enfant». «Mettre en prison des jeunes au moment même où ils se construisent est la pire réponse qu'on puisse apporter», conclut Vanessa Saab, «ces propositions sont clairement destructrices et anti-éducatives. Au départ on a des petits délinquants, on en fait des grands criminels».