La France entre hommage et questions après une nouvelle attaque jihadiste
•La France, frappée par une nouvelle attaque jihadiste, a rendu hommage mercredi au policier et à sa compagne tués à leur domicile, un assassinat qui suscite des interrogations sur l'efficacité de la lutte antiterroriste en plein Euro de football.© 2016 AFP
La France, frappée par une nouvelle attaque jihadiste, a rendu hommage mercredi au policier et à sa compagne tués à leur domicile, un assassinat qui suscite des interrogations sur l'efficacité de la lutte antiterroriste en plein Euro de football.
A midi, une minute de silence a été observée au ministère de l'Intérieur en présence notamment de François Hollande, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve, et dans l'ensemble des commissariats de France à la mémoire des deux victimes assassinées lundi soir chez elles, près de Paris, par Larossi Abballa, 25 ans.
Au même moment, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées à Magnanville (Yvelines), non loin du domicile du couple, dont l'accès était barré par un cordon de police devant lequel gerbes et bouquets de fleurs étaient déposés.
Au commissariat des Mureaux (Yvelines), où travaillait le policier tué, 150 personnes se sont réunies autour des parents du couple, dont de nombreux policiers, pompiers et magistrats.
Une minute de silence sera également observée à 20H30 dans les fan zones de l'Euro ouvertes mercredi, avant le match France-Albanie.
Lundi peu après 20H00, Abballa a tué à coups de couteau Jean-Baptiste Salvaing, 42 ans, commandant de police adjoint du commissariat des Mureaux, devant son domicile. Il a ensuite séquestré sa compagne Jessica Schneider, 36 ans, agent administratif du commissariat voisin de Mantes-la-Jolie, qu'il a égorgée, et leur petit garçon, retrouvé indemne mais dans un état de sidération.
Si Jean-Baptiste Salvaing «a été pris pour cible, s'il a été assassiné c'est parce qu'il était policier. Et si Jessica Schneider est morte (...) c'est parce qu'elle était sa compagne et elle-même fonctionnaire au sein d'un commissariat de police», a déclaré Bernard Cazeneuve, visiblement ému, lors de l'hommage au ministère.
- Liste de cibles -
Avant d'être abattu par le Raid, Abballa a revendiqué son acte en direct sur une vidéo postée sur les réseaux sociaux au nom du groupe jihadiste Etat islamique (EI).
Dans cet enregistrement, visionné par l'AFP, il promet que l'Euro sera «un cimetière» et appelle «à attaquer des policiers, des journalistes, des gardiens de prison et des rappeurs». Une liste de cibles mentionnant «des personnalités ou des professions» a été retrouvée, selon le procureur de Paris François Molins.
Facebook a assuré travailler «en étroite collaboration avec les autorités françaises» sur l'enquête.
Sept mois jour pour jour après les attentats du 13 novembre qui ont fait 130 morts, ce double assassinat a frappé la France alors que l'émotion était encore vive après l'attaque dimanche d'une boîte gay d'Orlando (Etats-Unis) où un homme se réclamant également de l'EI a tué 49 personnes.
Les présidents français et américain François Hollande et Barack Obama ont décidé d'«augmenter encore la coopération» face à une «menace» jihadiste qui «évolue en permanence». Pour le dirigeant américain, il s'agit de «détruire» le groupe jihadiste, visé en Syrie et en Irak par des frappes de la coalition.
Avant le coup d'envoi de l'Euro-2016, Bernard Cazeneuve avait estimé que la compétition constituait «une cible potentielle» pour «les organisations terroristes» mais aussi «pour des personnes radicalisées». La sécurité a été massivement renforcée, essentiellement aux abords des stades et des fan zones.
«Nous connaîtrons de nouveau des attaques», a prévenu mercredi le Premier ministre Manuel Valls.
Les enquêteurs français cherchent désormais à déterminer si le tueur a bénéficié de complicités dans la préparation des meurtres.
Larossi Abballa, Français né à Meulan (Yvelines) de parents marocains, avait un passé dans l'islamisme radical. Outre deux condamnations pour un vol et un recel mineurs, il avait été condamné en 2013 à de la prison pour participation à une filière jihadiste vers le Pakistan.
Trois hommes de 27, 29 et 44 ans, issu de l'entourage du meurtrier, étaient toujours en garde à vue mercredi. Deux d'entre eux avaient été condamnés avec Abballa en 2013.
Les interrogations sur un éventuel défaut de surveillance s'élèvent. La justice avait mis Abballa sur écoute en 2016 sans toutefois «déceler la préparation d'un passage à l'acte violent», selon le procureur Molins.
Mais, dans un climat déjà tendu par la contestation de la loi travail et les actions violentes des «casseurs», l'opposition de droite est montée au créneau, réclamant notamment des centres de rétention pour les personnes radicalisées non condamnées. Manuel Valls, réfutant toute «négligence», a de nouveau écarté ces demandes.
Le recteur de la grande mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, a déploré quant à lui que des jihadistes puissent circuler «librement en France»: «Cela ne peut plus durer».