Orlando: les homosexuels de Paris se sentent «pris pour cible»
Certains avouent leur peur et le sentiment d'être "des cibles", ...© 2016 AFP
Certains avouent leur peur et le sentiment d'être «des cibles», d'autres y trouvent des raisons de revendiquer plus fort encore leur homosexualité. Au lendemain de l'attaque meurtrière dans un club gay aux États-Unis, la communauté parisienne se dit «particulièrement touchée».
Casquette vissée sur la tête dans une rue du Marais, le quartier du centre de Paris connu pour ses nombreux établissements gays, Richard Descours avoue: «Je n'y croyais pas».
«Je me suis dit qu'il ne pouvait pas y avoir de morts. Et puis ils ont donné le chiffre, j'ai été horrifié», dit-il à l'AFP. Branché sur sa télé, il a vu en direct les premières images des victimes des attentats au Pulse, une boîte gay réputée d'Orlando, en Floride, touchée par une attaque terroriste dimanche qui a fait 49 morts.
«Ils étaient tellement jeunes. C'était des petits minets de 25 ans qui vivaient juste leur liberté», lâche-t-il. «Ça aurait pu être moi, ça aurait pu être ici. C'est toute la communauté homosexuelle qui est particulièrement touchée».
«On est pris pour cibles parce qu'on est gays. On s'est tellement battus pour être visibles, tolérés. On a obtenu un certain statut mais ça nous transforme aussi en cibles», explique Peter Mucha, 46 ans.
«Rien n'est encore gagné, même ici en France où le mariage pour tous a été validé à contre-cœur, certains nous considèrent encore comme des déviants», soupire-t-il.
Comme lui, Stéphane Parat estime que les homosexuels sont «des cibles» des terroristes. «On les dérange dans notre liberté, ils pensent qu'on est homo par choix et ça va à l'encontre de leur interprétation du Coran. Pour eux, on va direct en enfer», dit-il.
Perfecto en cuir, cheveux poivre et sel, ce quadragénaire assis à une terrasse de bistrot estime qu'«il faut plus de sécurité».
«Pour le foot, le système de sécurité est important. Mais qu'est-ce qui sera fait pour la Gay Pride ? La Techno Parade ?», interroge-t-il. La Marche des fiertés de Paris, traditionnellement organisée le dernier samedi du mois de juin, a été repoussée au 2 juillet en raison de l'état d'urgence et de l'Euro.
- «Une seule vie» -
Turgut, lui, ne fréquente plus ni les bars, ni les clubs gays. Ni d'ailleurs aucun endroit «peuplé», parce «ça peut arriver». Quoi ? Il ne sait pas vraiment, un «coup de couteau», «un fou», «un homme armé»... Il n'ira pas non plus à la Gay Pride.
«J'adore le foot aussi, mais je n'irai jamais dans la fan zone. Ce serait vraiment leur faciliter la tâche», dit-il. «Je n'ai qu'une seule vie». A 29 ans, il n'a pas encore dit à ses parents qu'il est homosexuel: «je suis musulman, et dans ma culture, c'est tabou».
«Moi ça fait quelques années que je n'allais plus à la Gay Pride. Mais cette année, j'irai. Parce qu'en cette période de trouble il faut se souder et faire bloc», revendique Richard Descours.
Il ira voir la Tour Eiffel qui se drapera lundi à compter de 23H30 des couleurs multicolores symboles de la communauté homosexuelle, en hommage aux victimes de la fusillade.
«Je refuse d'avoir peur», assène Curtis, 21 ans, qui dit ne pas «appartenir à une communauté». «On est des êtres humains, c'est tout».
«Hier, c'est les gays qui ont été pris pour cibles, demain ce sera autre chose», relativise Essam Zaki.
Pour Andrew Guermeur, qui dit refuser de «vivre dans la psychose», «il y aura toujours des homophobes». «Si quelque chose m'arrive, c'est juste que j'aurai été au mauvais endroit, au mauvais moment.»