Disparition de Mathis: le père affirme qu'il est vivant mais sa crédibilité semble entamée

Disparition de Mathis: le père affirme qu'il est vivant mais sa crédibilité semble entamée

Toujours bavard, Sylvain Jouanneau a affirmé clairement mercredi qu'il n'avait pas tué son fils mais sa crédibilité paraissait entamée au troisième jour de son procès pour l'enlèvement et la séquestration de Mathis en 2011.
© 2015 AFP

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Toujours bavard, Sylvain Jouanneau a affirmé clairement mercredi qu'il n'avait pas tué son fils mais sa crédibilité paraissait entamée au troisième jour de son procès pour l'enlèvement et la séquestration de Mathis en 2011.

«Non je n'ai pas tué Mathis», a assuré l'accusé pour la première fois en trois jours de procès devant les assises du Calvados à Caen.

Ce père divorcé n'a pas ramené son fils à sa mère le 4 septembre 2011 à Caen comme il aurait dû le faire au terme de son droit de garde du week-end. L'enfant alors âgé de 8 ans n'a pas été revu depuis.

L'affirmation contraste avec ce qu'écrit l'accusé à propos de Mathis en 2010 à sa compagne d'alors: «C'est l'enfant de la haine. Il y a des gènes de sa mère en lui. Je ne peux pas faire de miracles. Si ça tourne mal, je ne m'en sens pas responsable. J'ai fait le deuil». Des propos lus à l'audience par Louis Balling, avocat de la dernière compagne de l'accusé qui l'a quitté en août 2011 et que M. Jouanneau a menacé de mort deux mois plus tard. Il comparaît aussi pour ces faits.

Mathis «est-il mort?» demande la présidente Antoinette Lepeltier-Durel. «Mais non, pourquoi...», répond sans finir sa phrase l'accusé, qui était entré poing levé dans la salle d'audience devant les caméras mercredi matin, un geste «combatif» selon lui.

«D'après les dernières infos que j'ai, je suis tout à fait rassuré» sur le sort de Mathis, a dit M. Jouanneau, 41 ans.

Cet ancien cadre devenu maçon a été arrêté le 9 décembre 2011, près d'Avignon, après avoir été aperçu à six reprises par des témoins en France, toujours seul.

Malgré les demandes répétées des proches de Mathis, épuisés, et celles des magistrats, Sylvain Jouanneau refuse de dire où se trouve son fils. Il multiplie les digressions ou se mure dans un silence inquiétant, perd rarement son «calme olympien», selon l'expression d'un témoin.

- Sentiment de «toute puissance» -

Le fait de détenir seul la vérité doit conforter le sentiment de «toute puissance» de l'accusé marqué par un complexe d'abandon, estiment des psychiatres.

L'accusé n'explique pas la «précipitation» avec laquelle il a quitté son véhicule retrouvé près de Bayonne, en septembre 2011, avec un rehausseur à l'intérieur.

Il répète avoir confié l'enfant à des tiers à l'étranger, refuse d'en dire plus afin, selon lui, de les «protéger».

Mais selon deux policiers entendus mercredi, son courrier de 2011 affirmant qu'il a confié Mathis à des «complices sûrs et puissants» est peu crédible.

Olivier Dumont, un des directeurs de l'enquête, a «du mal à croire» ces propos.

Dans un brouillon de lettre retrouvé sur son ordinateur et lu à l'audience, M. Jouanneau affirme que son fils est «sous protection musulmane». «Sur le fond, je pourrais écrire la même lettre aujourd'hui», a indiqué l'accusé, chemise bleue, longue queue de cheval et barbe noires.

Mais pour le capitaine David Gaston, «ce n'est pas crédible». «Il est décrit comme quelqu'un de solitaire. Pour entrer en contact avec ce genre d'organisation, il faut des moyens. Ces contacts, on ne les a pas retrouvés sur ses ordinateurs», note-t-il.

Pour M. Gaston, la piste «musulmane» est peut-être même une fausse piste sur laquelle l'accusé a mis volontairement les policiers, même si il s'est converti à l'islam quand il a failli épouser une Marocaine en 2006.

«Pour moi, (l'accusé) est resté sur le territoire national», dit M. Gaston. Son collègue n'exclut pas qu'il soit allé à l'étranger, mais «pas au Maroc» car il n'avait pas son passeport. Des arguments contestés par la défense. Et l'accusé de lâcher qu'il a dépensé 5.000 euros pour un passeport, que Mathis est devenu musulman et qu'il a changé de nom.

Des recherches ont été effectuées en vain, notamment au Maroc, et dans les milieux sectaires en France.

Sylvain Jouanneau, dont le procès doit en principe s'achever jeudi, encourt 30 ans de prison.