Octuple infanticide: débat crucial en cassation sur la prescription

Octuple infanticide: débat crucial en cassation sur la prescription

Dominique Cottrez sera-t-elle jugée pour les huit infanticides ...
© 2014 AFP

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Dominique Cottrez sera-t-elle jugée pour les huit infanticides découverts en 2010 dans le Nord? Sa défense va à nouveau livrer bataille vendredi pour faire reconnaître que les faits sont prescrits, cette fois devant la formation la plus solennelle de la Cour de cassation.

Cette affaire, la plus importante en matière d'infanticide connue en France, sera examinée par l'assemblée plénière.

Dans son avis écrit avant l'audience, l'avocat général préconise le rejet du pourvoi de cette femme de 50 ans et donc son renvoi devant les assises, selon une source proche du dossier. Mais la haute juridiction, qui mettra sa décision en délibéré, n'est pas tenue de suivre cet avis.

Deux corps de nourrissons avaient d'abord été découverts enfouis dans le jardin des parents de Dominique Cottrez par les nouveaux propriétaires le 24 juillet 2010 à Villers-au-Tertre. Les gendarmes ont ensuite trouvé six autres corps dans le garage de la maison où elle vivait avec son mari.

La forte corpulence de Dominique Cottrez avait rendu ses grossesses indécelables auprès de ses proches et même de ses médecins.

Devant la juge d'instruction, elle avait expliqué avoir été victime d'inceste et avoir agi par crainte que les enfants ne soient de son propre père, mort en 2007.

Quoi qu'il en soit, pour ses avocats, les faits sont prescrits. Ils s'appuient sur des expertises qui datent la naissance de sept enfants avant mai 2000, soit plus de dix ans avant la découverte des premiers corps, un «doute» subsistant pour le huitième bébé, né selon les experts entre mai-juin et septembre-octobre 2000.

La justice a sans cesse rejeté cette argumentation et reporté le point de départ de la prescription, dix ans en matière criminelle, au jour de la découverte des faits.

- Imprescriptible? -

Mais le 16 octobre 2013, la Cour de cassation a annulé le renvoi de Dominique Cottrez devant les assises pour assassinat sur les huit nouveaux-nés.

La défense espérait donc que la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, désignée pour statuer de nouveau, écarterait au moins les sept premiers infanticides. Mais les magistrats parisiens ont finalement renvoyé Dominique Cottrez devant les assises pour la totalité des faits. Pour eux, dès lors que les faits n'ont pu être datés précisément, le principe selon lequel le délai de prescription démarre à compter de la commission des crimes ne peut s'appliquer.

Ainsi, la cour d'appel a considéré que la justice s'était retrouvée «dans l'impossibilité absolue d'agir» jusqu'à la découverte des premiers corps et que le point de départ de la prescription commençait donc à cette date.

Cet arrêt et ses motivations avaient fait bondir les avocats de Dominique Cottrez.

Me Marie-Hélène Carlier avait dénoncé une décision qui fait «énormément de morale, autant que de droit», qui dit qu'au «nom de l'opinion publique, on ne peut laisser ça impuni». Me Frank Berton s'en était pris à une décision «scandaleuse», qui n'a «rien de juridique». Le meurtre d'enfants «devient imprescriptible, comme le crime contre l'Humanité», avait-il fustigé.

Pour lui, la chambre de l'instruction s'était ainsi substituée au législateur.

La défense a donc formé un nouveau pourvoi.

«C'est la loi qui est l'expression de la volonté générale, pas l'opinion publique», souligne Me Claire Waquet, qui plaidera de nouveau pour Dominique Cottrez devant la Cour de cassation.

Partie civile dans ce dossier, l'association Innocence en danger, qui lutte contre la maltraitance des enfants, estime pour sa part que la défense «tente de la soustraire au jugement du peuple français».

Après deux années en détention provisoire, Mme Cottrez a été remise en liberté en août 2012 et placée sous contrôle judiciaire.

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