Sécu: la permanence des déficits «ronge la légitimité» du système
La poursuite des déficits de la Sécurité sociale, dont la réduction marque le pas, menace la "légitimité de notre système", a alerté Didier Migaud, le président de la Cour des comptes lors d'une conférence de presse.© 2014 AFP
La poursuite des déficits de la Sécurité sociale, dont la réduction marque le pas, menace la «légitimité de notre système», a alerté Didier Migaud, le président de la Cour des comptes lors d'une conférence de presse.
«La permanence des déficits sociaux est pernicieuse. Elle ronge comme un poison à effet lent la légitimité même de notre système de Sécurité sociale», a affirmé M. Migaud qui présentait le rapport annuel de la Cour sur la Sécurité sociale.
«La situation de nos comptes sociaux reste préoccupante, le déficit se réduit mais pas autant que prévu», a-t-il ajouté, alors que le gouvernement doit présenter dans quelques jours son projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015.
En 2013, le déficit des régimes de base et du FSV (Fonds de solidarité vieillesse), de 16 milliards d'euros, s'est réduit par rapport à 2012, mais moins que le prévoyait le gouvernement et moins que les années précédentes (3,1 milliards de moins contre 3,5 milliards en 2012 et 7 milliards en 2011).
Ce déficit «reste à un niveau élevé, ce qui fait de la France un pays atypique par rapport à beaucoup de nos voisins qui n'acceptent pas de déficit aussi important et aussi durable», a ajouté M. Migaud.
Pour lui, «il n'est pas normal de faire financer des dépenses courantes par une augmentation de la dette sociale», dont l'encours atteint 157 milliards d'euros. «Pourquoi les faire reposer sur les générations futures?», s'est-il interrogé.
Par ailleurs, les récentes «perspectives économiques fragilisent les estimations sur la trajectoire 2015-2017», mais «tout n'est pas de la faute de la conjoncture», a-t-il affirmé.
«Il y a une part structurelle qui nécessite des réformes», a poursuivi le président, évoquant en particulier un effort sur les dépenses de l'assurance maladie, branche la plus déficitaire.
Accélérer le développement des génériques en impliquant les médecins, mieux organiser les urgences, raccourcir les séjours à la maternité figurent parmi les pistes explorées dans ce rapport.
M. Migaud a par ailleurs insisté sur la nécessité de renforcer la lutte contre la fraude aux cotisations sociales.
Selon une étude commandée par la Cour à l'Acoss, organisme collecteur des cotisations de Sécurité sociale, le montant de la fraude a doublé entre 2007 et 2012, atteignant entre 20 et 25 milliards d'euros.
Or, les sommes recouvrées représentent moins de 0,2% de la fraude estimée.
Car les outils pour lutter contre cette fraude «sont vraisemblablement insuffisants: il y a des moyens à renforcer, des outils à renforcer, des sanctions plus fortes à prévoir», a dit M. Migaud.
«Il faut que ceux qui contrôlent puissent disposer de moyens supplémentaires, par exemple ceux dont disposent les services fiscaux», a-t-il précisé.
D'autant plus que de nouvelles formes de fraudes apparaissent, plus difficiles à détecter par des contrôles «classiques», a souligné Antoine Durlemann, président de la sixième chambre de la Cour.
C'est d'ailleurs l'une des principales raisons qui expliquent l'explosion des fraudes sociales ces dernières années, selon lui.
Le rapport évoque notamment la délicate question des travailleurs détachés à l'étranger, pour lesquels s'appliquent le droit du travail du pays d'accueil et celui de la sécurité sociale du pays d'origine.