Maurice Papon, un collabo dans les rouages de l'Etat

Maurice Papon, un collabo dans les rouages de l'Etat

Il fait sans doute partie des Français les plus détestés. A 96 ans, Maurice Papon est l’un des symboles de la collaboration française à la politique d’extermination des juifs mais aussi de la répression sanglante des manifestations anticoloniales pendant la guerre d’Algérie.

Après des études de droit et d’économie politique, il intègre le ministère de l’Intérieur à l’âge de 25 ans. Dans un premier temps plutôt à gauche, il adopte très vite les principes de la «Révolution nationale» lorsque Pétain prend les rênes de la France occupée.

En 1942, il est nommé secrétaire général de la préfecture de la Gironde, à Bordeaux. C’est à ce titre qu’il dirige le service des questions juives qui recense les personnes de confession juive à travers le département et organise leur déportation vers le camp d’internement de Drancy, première étape avant la déportation sans retour vers Auschwitz.

A la fin de la guerre, il réussit à ne pas être inquiété par la commission d’épuration et continue d’occuper de hautes responsabilités au sein de l’Etat. Préfet des Landes, de Corse, de Constantine en Algérie pendant les «troubles», il est nommé préfet de police de Paris en avril 1958. Il obtient à cette époque une carte de «combattant volontaire de la Résistance» qui lave son passé compromettant.

La répression des manifestations

C’est sous son autorité que les forces de police parisienne répriment dans le sang, le 17 octobre 1961, une «marche de paix» organisée par le FLN algérien. Le nombre de victimes, encore contesté aujourd’hui, oscille entre plusieurs dizaines à quelques centaines. Les victimes disparaissent dans des centres de détention quand elles ne sont pas jetées simplement à la Seine.

Il est également mis en cause pour la mort de neuf personnes anti-OAS, dont huit militants communistes au métro Charonne le 8 février 1962.

Après un passage dans l'industrie comme PDG de Sud-Aviation, Maurice Papon devient un dirigeant gaulliste de l'UDR, puis du RPR. Il est élu député du Cher en 1968, mandat qu'il abandonne en 1978 pour entrer au gouvernement comme ministre du Budget dans les deuxième et troisième gouvernements de Raymond Barre.

A ce poste, il déclenche un contrôle fiscal contre l’hebdomadaire satirique «Le Canard enchaîné». Le 6 mai 1981, le journal riposte en révélant le rôle de Maurice Papon dans la déportation des juifs girondins. L’hebdomadaire publie deux documents accablants signés de sa main et datés de février 1943 et de mars 1944.

Un procès tardif
Il faudra attendre seize longue années pour que débute son procès en 1996. Au terme d’un procès très médiatisé, il est condamné en avril 1998 à dix ans de réclusion criminelle, d’interdiction des droits civiques, civils et de famille pour complicité de crimes contre l’humanité. Défendu par l’avocat Jean-Marc Varaut, il n’exprimera jamais aucun remord ni regret.

Un procès tardif
Il faudra attendre seize longue années pour que débute son procès en 1996. Au terme d’un procès très médiatisé, il est condamné en avril 1998 à dix ans de réclusion criminelle, d’interdiction des droits civiques, civils et de famille pour complicité de crimes contre l’humanité. Défendu par l’avocat Jean-Marc Varaut, il n’exprimera jamais aucun remord ni regret.

Mais son actualité judiciaire ne finit pas pour autant. Laissé en liberté provisoire au début de son procès par une décision controversée du juge Jean-Louis Castagnède, il s’enfuit en Suisse en octobre 1999 à la veille de l’examen de son pourvoi en cassation. Arrêté au bout de 48 heures, il est extradé et finalement emprisonné à la prison de Fresnes.

Second Français à bénéficier de la nouvelle loi française dite «Kouchner» qui prévoit que les prisonniers peuvent être libérés s’ils souffrent d’une maladie incurable, il est remis en liberté seulement trois ans plus tard, le 18 septembre 2002. Le rapport médical décrivant Papon comme «impotent et grabataire» fait toutefois débat lorsqu’il quitte la prison de la Santé à pied et, visiblement, bien portant.

De retour dans son domicile de Gretz-Armainvilliers en Seine-et-Marne, il voit le Conseil d’Etat condamner l’Etat à payer la moitié des dommages que la Cour d’assises de la Gironde avait attribués aux parties civiles. De son côté, l’ancien fonctionnaire organise son «insolvabilité» et fait jugé son procès par la Cour européenne des Droits de l’Homme comme contraire aux principes de l’équité en raison d’un vice de forme.

Dernier pied de nez à la République: Maurice Papon arbore illégalement la Légion d’honneur en public alors que ses décorations lui sont déjà retirées. Il est condamné en 2004 à 2.500 euros d'amende.