Mort de Nahel : Un an après, où en est l’enquête ?
enquete•Deux juges d’instruction tentent d’établir les circonstances de la mort de l’adolescent de 17 ans, tué par le tir d’un policier à Nanterre (Hauts-de-Seine) le 27 juin 2023
T.C.
L'essentiel
- Nahel, 17 ans, a été tué par un policier qui a ouvert le feu sur lui après un refus d’obtempérer, le 27 juin 2023 à Nanterre (Hauts-de-Seine).
- Depuis un an, l’enquête pour établir les circonstances de la mort de Nahel se poursuit à Nanterre.
- Deux juges d’instruction ont mené des investigations en procédant aux interrogatoires des témoins et en organisant des reconstitutions.
La question anime les débats depuis un an. Le brigadier Florian M., mis en examen pour homicide volontaire, avait-il une raison légitime d’utiliser son arme pour tirer sur Nahel, 17 ans, lors d’un contrôle routier ? Depuis le drame survenu à Nanterre (Hauts-de-Seine), deux juges d’instruction tentent d’établir les circonstances de la mort de l’adolescent, tué après un refus d’obtempérer.
Tandis que de nombreuses émeutes ont éclaté l’an dernier en réaction au décès du jeune homme, les magistrats ont mené leurs investigations en procédant aux interrogatoires des témoins et en organisant des reconstitutions.
Le 27 juin 2023, deux motards de la compagnie territoriale de circulation et de sécurité routière des Hauts-de-Seine remarquent une Mercedes jaune immatriculée en Pologne qui roule à vive allure. Ils décident de contrôler ses occupants et se lancent aux trousses du véhicule, qui finit par se retrouver coincé dans les bouchons. Les deux policiers mettent pied à terre, sortent leur arme et ordonnent au conducteur de couper le contact.
Plusieurs nuits d’émeutes violentes
Mais soudain, la voiture redémarre. Florian M., 38 ans, ouvre le feu à bout portant sur Nahel qui était au volant. Le bolide allemand finit sa course quelques mètres plus loin, encastré dans un poteau. La balle tirée par le fonctionnaire a traversé le bras gauche et le thorax de la victime qui, malgré l’intervention des sapeurs-pompiers, est décédée dans la matinée. Placé en garde à vue, « le policier a expliqué son geste par la volonté d’éviter une nouvelle fuite du véhicule et par la dangerosité du comportement routier du conducteur », avait indiqué le procureur de la République de Nanterre, Pascal Prache.
Dans une vidéo filmée par un témoin, on aperçoit les policiers se trouvant sur le côté du véhicule braquer le conducteur avec leurs armes. Cette vidéo contredit une première version policière qui présentait les agents comme positionnés face au véhicule. Sa diffusion sur les réseaux sociaux avait engendré plusieurs nuits d’émeutes violentes et relancé le débat sur les violences policières.
Le policer remis en liberté
Mis en examen homicide volontaire et placé en détention provisoire, Florian M., qui plaide la légitime défense, a été remis en liberté le 15 novembre dernier et placé sous contrôle judiciaire, les juges d’instruction en charge du dossier jugeant notamment que « si le trouble à l’ordre public demeure », « il est moindre qu’à la date du placement en détention provisoire ». Selon eux, le risque de « concertation » est « moins prégnant », même s’il reste « des divergences entre les différentes versions données ».
Plusieurs expertises ont été demandées, notamment pour établir dans quelle mesure Nahel, qui a des traces de coups sur les bras, a été frappé par les policiers. Une expertise audio de la vidéo, pour définir ce que les agents ont crié à l’adolescent, a également été demandée, mais sans résultat convaincant.
Une reconstitution et des questions en suspens
Le lieu de la mort du jeune homme a été bouclé le 5 mai par des dizaines de camions de policiers pour permettre une reconstitution des faits. Les deux adolescents présents lors des faits, plusieurs témoins qui, selon des éléments du dossier, disent avoir entendu un policier menacer Nahel, Florian M., son collègue, ainsi que la mère de Nahel et d’autres proches, étaient réunis pour la première fois. Un des enjeux était d’établir dans quelle mesure les policiers étaient en danger au moment du tir.
Quatorze heures de reconstitution n’ont pas fait varier les convictions des avocats, ni de celui de la famille de Nahel, ni de celui du fonctionnaire mis en cause. « La reconstitution s’est fondée sur les vidéos. Ce qu’on voit sur les vidéos, c’est que le policier n’était pas en danger. Par conséquent, l’usage de son arme n’était pas nécessaire », avait tranché Me Nabil Boudi, avocat de la mère de Nahel, sur RTL.
Interrogé par BFMTV, l’avocat du brigadier, Laurent-Franck Liénard, a estimé que la reconstitution était importante car sur la vidéo, « on ne voit pas que (son client) est coincé dans un trottoir, que juste derrière lui, il y a un mur ». « Objectivement, il n’a pas été écrasé, mais il a pu ressentir qu’il aurait pu l’être », a-t-il relevé.
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